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Des mots qui causent des maux : lire aux enfants virtuellement, tout en suivant la loi

Une famille réunie autour d'une table, derrière des tablettes.

Les conseils scolaires, les enseignants, les parents et les élèves tentent de poursuivre l'apprentissage à distance.

Photo : getty images/istockphoto / monkeybusinessimages

Nos réseaux sociaux sont bondés de mots et d'oeuvres qui ne nous appartiennent pas toujours. Pour des enseignants qui misent sur la lecture avec leurs élèves, même virtuellement, les droits d'auteur constituent une mer de zones grises souvent difficile à naviguer.

Lire aux enfants à travers des écrans et en toute légalité n'est pas si simple, admet l'enseignante Brigitte Lafare, qui découvre peu à peu les règles en matière de droits d'auteur.

Chaque matin, elle donne rendez-vous sur Facebook aux bambins de la prématernelle Les Petites Abeilles de l'École Notre-Dame des Vallées à Cochrane, en Alberta, pour mener une heure du conte en direct.

Je trouve ça un peu stressant de savoir que ça peut devenir compliqué et qu'on pourrait me mettre des bâtons dans les roues. Moi, je ne suis pas professionnelle [de ça]. Je suis une professionnelle avec les enfants.

Une citation de Brigitte Lafare, enseignante
Un portrait de Brigitte Lafare, habillée en salopette, qui sourit à la caméra.

Brigitte Lafare enseigne la prématernelle à l'école francophone de Cochrane depuis 16 ans.

Photo : photo de Marither Veroni

Des enseignants, comme elle, ont reçu des conseils de leur direction d'école sur le respect des droits d'auteur pendant que l'enseignement se poursuit à distance durant la pandémie de coronavirus.

Pandémie ou pas, ces directives doivent être respectées, soutient Élisabeth Schlittler qui dirige la Société des auteurs et compositeurs dramatiques au Canada.

Si vous voulez utiliser ma voiture, vous me demandez l'autorisation. Vous ne prenez pas les clés pour partir, lance-t-elle.

Depuis la fermeture des écoles au Canada, beaucoup de maisons d'édition ont assoupli leurs politiques pour permettre la lecture d'oeuvres en ligne, avec certaines conditions. La plupart d'entre elles réclament une mention de l'éditeur, de l'auteur et un retrait de la vidéo dès la levée des mesures de confinement.

Même si le propriétaire des droits a le dernier mot à ce sujet, Élisabeth Schlittler craint que ces mesures exceptionnelles ouvrent la porte à des prises de liberté une fois que ce chapitre de notre histoire sera terminé.

Le problème auquel on peut être confronté, c'est de donner de mauvaises habitudes, parce qu'elles se prennent vite, ces mauvaises habitudes, prévient-elle. La pandémie va arrêter un de ces quatre matins. Mais, si on prend de mauvaises habitudes maintenant qui vont perdurer après... et bien, les auteurs ils seront encore là, après.

Comprendre l'utilisation équitable

Le web n'est pas une plateforme libre où faire circuler des oeuvres. Il est aussi soumis à une série de règles abritées par la Loi sur le droit d'auteur.

La loi prévoit tout de même certaines exceptions, dont l'une appelée « l’utilisation équitable ». Son but est de reconnaître que certaines utilisations d'oeuvres protégées sont bénéfiques pour la société.

L'utilisation équitable touche entre autres les éducateurs, explique l'avocat expert en droit d'auteur, Guillaume Lavoie Ste-Marie.

Si on prend l'exemple d'un éducateur qui pourrait lire un livre ou faire jouer un extrait de film, la loi à la base interdit ce genre de comportement, dit-il. Ceci dit, il y a certaines exceptions à la contrefaçon de droit d'auteur. Une d'elles, c'est l'utilisation équitable, notamment pour les fins d'enseignement.

Il rappelle toutefois que les exceptions, elles aussi, ont leurs limites.

Si on parle d'un livre entier, c'est certain que c'est plus risqué, parce que l'utilisation équitable prend en compte certains facteurs, dont le pourcentage de l'oeuvre qui pourrait avoir été utilisé, indique Guillaume Lavoie Ste-Marie.

Une photo professionnelle de Guillaume Lavoie Ste-Marie, en complet cravate.

Selon l'avocat Guillaume Lavoie Ste-Marie, les enseignants devraient se poser les mêmes questions qu'ils font habituellement en salle de classe, avant d'utiliser une oeuvre.

Photo : Smart & Biggar S.E.N.C.R.L., srl.

Pour ne pas jouer avec le feu et augmenter les chances d'une utilisation équitable, il suggère de mentionner systématiquement la source du contenu, le détenteur des droits et le nom de l'auteur.

Selon Me Lavoie Ste-Marie, les enseignants ne devraient pas avoir à trop s'écarter de leurs habitudes pratiquées en salle de classe.

L'objectif serait de ne pas trop déroger à la pratique habituelle, mais tout simplement de l'adapter aux technologies qui doivent être utilisées dans les circonstances.

Une citation de Guillaume Lavoie Ste-Marie, avocat à Smart & Biggar

Si c'est pour diffuser du contenu à des élèves, [les enseignants devraient] s'assurer que le contenu soit uniquement diffusé à des élèves et pas à la population dans son ensemble, dit-il.

Des éditeurs qui veulent aider

Une bonne communication avec la maison d'édition est souvent la meilleure façon d'éviter de tomber sur un os, dit Emmanuelle Rigaud, directrice générale des Éditions du Blé au Manitoba.

Si les gens font parfois des erreurs, dit-elle, c'est qu'ils ne sont pas bien informés.

Photo professionnelle, en noir et blanc, d'Emmanuelle Rigaud.

Emmanuelle Rigaud est la directrice générale d'une maison d'édition francophone au Manitoba.

Photo : Reza Rezai

C'est juste un travail en bonne confiance, en bonne connaissance et intelligence. Si quelqu'un lit un livre du Blé demain, puis le met sur Facebook, on ne va pas aller le poursuivre. Mais, on va peut-être lui faire prendre conscience qu'il y a des droits d'auteur.

Une citation de Emmanuelle Rigaud, directrice aux Éditions du Blé

Elle tient à rappeler que sa maison d'édition, comme d'autres, est une fidèle alliée des enseignants.

On veut nous aussi que les élèves puissent avoir accès à ce matériel, alors il suffit de contacter l'éditeur et dire ''comment on s'organise?'', et puis ça marche en général, explique-t-elle.

Même si le partage continu de textes peut causer des ennuis, Emmanuelle Rigaud estime que l'isolement fera aussi du bien au monde littéraire francophone de l'Ouest.

Les auteurs n'ont pas toujours le temps opportun pour s'assoir et écrire. Là, je pense qu'après la période de confinement, on va recevoir beaucoup de manuscrits, prédit-elle.

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