COVID-19 : des sans-papiers réclament des soins de santé sans risque d'expulsion
En 2016, certains chercheurs estimaient qu'il y aurait entre 200 000 et 500 000 sans-papiers au pays.
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Au Canada, des sans-papiers réclament l’accès aux soins de santé sans risque d'expulsion vers leur pays d’origine en raison de la COVID-19. La propagation du nouveau coronavirus touche à présent toutes les provinces et ces personnes craignent que leur état de santé ne soit affecté.
Selon l'organisme Sanctuary Health, qui travaille auprès de personnes sans-papiers à Vancouver et en Colombie-Britannique, il est difficile d'estimer le nombre exact de ces personnes dans la province. Mais en 2016, certains chercheurs estimaient qu'il y en aurait entre 200 000 et 500 000 au pays.
Attraper le virus, rentrer chez soi, et réaliser que tu ne peux même pas le dire dehors à voix haute parce que tu n’as pas de papiers
est un scénario que redoute Roberto*, un ouvrier du milieu de la construction qui habite dans la région de Vancouver.
Le Salvadorien est arrivé au pays il y a cinq ans. Il habite aujourd’hui avec sa femme, qui n’a également aucun papier et ses enfants, nés en sol canadien.
Roberto évite les visites à l’hôpital parce qu'il craint que ces derniers partagent ses informations avec les autorités. Son statut précaire le met à risque élevé d'expulsion du pays.
C’est comme si je n’existe pas. Je suis ici, mais je n’existe pas.
Mais en pleine pandémie, ce travailleur de chantier craint que cette invisibilité le rende susceptible au virus.
Je ne sais pas quoi faire. Ma famille, ma femme ou mes enfants, s’ils se retrouvent dans une situation où ils nécessitent une attention médicale, je ne sais pas si nous y aurons accès
, craint-il.
Je dois savoir : qu’en est-il des personnes comme moi?
Roberto aimerait voir le gouvernement offrir des soins de santé pour tous sans que les personnes sans-papiers risquent de se faire exposées aux autorités. Il souhaite aussi que le gouvernement canadien étende ses mesures d’aide financière aux sans-papiers - si son chantier met fin à la construction pendant une durée indéterminée, il ne sait où il aura accès à un salaire.
Il croit que l'exclusion des Canadiens sans-papiers laisse place à une crise humanitaire
au pays.
À lire aussi :
Selon Santé Canada, les questions concernant l'accès aux soins de santé en temps de pandémie sans risque que leur contact avec le système de santé canadien puisse mener à une arrestation ou une expulsion doivent être dirigées vers Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC
). IRCC n'a pu répondre à nos questions à temps pour la publication de cet article.Des soins pour tous
Byron Cruz, membre clé de l’organisme Sanctuary Health, à Vancouver, est un point de contact en temps de crise pour plusieurs personnes sans-papiers. De nombreuses cliniques refusent de soigner les personnes qui ne présentent aucune carte de santé, dit-il, les envoyant plutôt aux salles d’urgence.
Les hôpitaux acceptent éventuellement de soigner les enfants, mais pour les sans-papiers, une visite à l’hôpital pour enfants coûtera 975 $. Et si l’enfant doit y passer la nuit, ça peut coûter 6000 $ ou même 7000 $ par nuit.
Selon lui, la pandémie devrait pousser tous les niveaux de gouvernement à offrir un statut aux sans-papiers.
Au niveau du gouvernement provincial, nous demandons que les services soient ouverts à tous. Au niveau fédéral, nous maintenons notre demande que le processus de régularisation [du statut des sans-papiers] soit enclenché
, explique-t-il.
C'est le temps de le faire maintenant. Les gens ont besoin d'avoir accès aux services.
* Roberto est un nom fictif. L'homme souhaite demeurer anonyme pour protéger son identité, éviter les répercussions sur son emploi et éviter tout risque de déportation.