COVID-19 : pas d’isolement obligatoire pour les migrants passant par le chemin Roxham

Devant le chemin Roxham, les agents de la GRC disposent de masques de protection.
Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
À ce jour, les migrants en situation irrégulière souhaitant obtenir l’asile au Canada peuvent toujours traverser le chemin Roxham sans être forcés à un isolement. Un dépistage sera néanmoins mis en place.
On parle d’environ 60 à 80 personnes qui traversent quotidiennement le chemin Roxham en ce moment, selon une estimation du président du Syndicat des douanes et de l’immigration, Jean-Pierre Fortin.
Ces personnes proviennent des États-Unis, durement touchés par la propagation de la COVID-19, mais sont aussi susceptibles d'avoir traversé d'autres frontières.
Souvent, ces personnes transitent par plusieurs pays avant d’arriver au Canada. Elles sont dans le besoin. Et on peut imaginer qu’elles ont fréquenté plusieurs personnes
, souligne M. Fortin.
Le chemin Roxham, qui est situé à la frontière canado-américaine, à moins d’une heure de Montréal, permet aux migrants qui le traversent de venir présenter une demande d’asile au Canada. Cette possibilité est offerte dans le cadre de l’Entente sur les tiers pays sûrs.
Aux abords de cette route, rien ne semble avoir changé. Des agents de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) sont toujours présents et installés dans une bâtisse blanche, en attendant l’arrivée de migrants en situation irrégulière, qu’ils transféreront au poste frontalier de Saint-Bernard-de-Lacolle. Des agents des services frontaliers se chargent par la suite du traitement des demandes d’asile.
Des milliers de passages
En 2019, plus de 16 000 personnes ont présenté au Québec une demande d’asile en utilisant, comme l’indique le gouvernement canadien, un point d’entrée terrestre
, soit, dans les faits, le chemin Roxham. En janvier 2020, on a dénombré 1115 passages.
Pas d’isolement obligatoire
Quelle est la procédure en vigueur? On demande aux demandeurs d’asile de se mettre en quarantaine. Il n’y a aucune obligation
, regrette Jean-Pierre Fortin.
Il n’y aurait également aucune surveillance concernant le parcours de ces migrants, après leur arrivée, de la part des autorités canadiennes, poursuit-il.
« Il y a des préoccupations. Il faut mettre en place des mesures pour que [les demandeurs d’asile] puissent entrer en toute sécurité et ne pas contaminer les citoyens canadiens. »
Les agents présents disposent néanmoins de l’équipement nécessaire pour se protéger de la propagation du virus, dit-il.
Radio-Canada a d’ailleurs constaté sur place que des agents portaient des masques.
S’il y a des symptômes, on a des masques et du matériel à disposition
pour ces migrants, a expliqué un agent de la GRC, devant l’entrée du chemin Roxham.
Des inquiétudes
transmises à Ottawa, un dépistage mis en place
Jean-Pierre Fortin assure avoir soulevé ces inquiétudes
au cabinet du ministre de la Sécurité publique, Bill Blair.
La solution pourrait être de les garder sur place, avec des gens de Santé Canada, de la Croix-Rouge, dans des installations temporaires, le temps de l’isolement. On pense que ce serait la solution la plus viable
, croit Jean-Pierre Fortin.
En réaction, l'Agence des services frontaliers (ASF) a indiqué mardi après-midi à Radio-Canada qu'un dépistage est désormais réalisé pour chaque personne passant notre frontière
.
Ces migrants en situation irrégulière subissent des examens auprès des agents de la GRC et de l'ASF, précise cette dernière, tout en mentionnant que les agents sont sensibilisés à la possibilité de signes de maladies
.
Des entrevues individuelles sont faites avec les demandeurs d’asile afin d’établir leurs antécédents de voyage et d’évaluer leur état de santé, y compris l’observation de symptômes. Des salles d’isolement ont aussi été fournies en cas de contamination éventuelle afin d’éviter la propagation
, détaille Judith Gadbois-St-Cyr, porte-parole de l'ASF.
« Les Canadiens peuvent avoir confiance dans les mesures prises par nos agents pour atténuer le risque d’entrée de la COVID-19 à tous les points d’entrée du pays. »
Si les demandeurs d'asile irréguliers présentent des symptômes, ils sont référés à la santé publique pour un examen plus approfondi
, ajoute-t-elle.
Un dépliant
présentant les symptômes et la recommandation de s'isoler
durant 14 jours est également remis à ces migrants, reprend-elle.
Qu’est-ce que l’Entente sur les tiers pays sûrs?
Cet accord, entré en vigueur en 2004, désigne le Canada et les États-Unis comme des pays sûrs pour les demandeurs d’asile. Normalement, les immigrants qui veulent présenter une demande d’asile doivent, en vertu de cette entente, le faire obligatoirement dans le premier de ces deux pays qu’ils traversent. Cette demande doit se faire à un poste frontalier, ce que n’est pas le chemin Roxham. En utilisant ce passage, ces migrants en situation irrégulière peuvent ainsi contourner l'accord et demander l’asile au Canada, malgré leur passage initial aux États-Unis.
Le Bloc québécois veut une fermeture sans délai
Devrait-on fermer ce chemin pour limiter les risques de propagation? Cette demande a été faite dimanche par le chef du Bloc québécois, qui réclame également une suspension de l'accord binational sur les tiers pays sûrs.
Selon Yves-François Blanchet, le gouvernement Trudeau doit fermer sans délai tous les points d’entrée irréguliers
et un isolement obligatoire d’une durée indéterminée
doit être imposé aux personnes entrant actuellement par ce passage.
Il y a une incohérence actuellement, affirme pour sa part l’avocat en immigration Stéphane Handfield. D’un côté, on impose des mesures contraignantes aux Canadiens, et de l’autre, on permet encore à des gens de passer à la frontière comme si de rien n’était.
La suspension de l'entente semble néanmoins écartée. Les accords internationaux sont maintenus
, souligne le président de l’Association québécoise des avocats en droit de l’immigration, Guillaume Cliche-Rivard.
Nous avons décidé [...] de continuer de respecter notre politique vis-à-vis des réfugiés
, a de son côté déclaré le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, au 98.5 FM.
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