Déterrer l’histoire des Afro-Albertains, une archive à la fois
Depuis près de 4 ans, Bashir Mohamed fouille les archives provinciales de l’Alberta pour documenter l’histoire des noirs de la province.
Photo : Radio-Canada / Andréane Williams
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
L’histoire de la communauté descendante d'Afrique en Alberta ne date pas d’hier et pourtant, peu d’Albertains la connaissent. C’est pourquoi l’activiste et historien à ses heures, Bashir Mohamed, en fait son cheval de bataille depuis quelques années.
Depuis 4 ans, Bashir Mohamed épluche les archives provinciales pour mettre en lumière la discrimination envers la communauté noire à travers l’histoire, mais aussi ses mouvements de résistance.
Nous avons créé cette image du Canada, meilleure que celle des États-Unis, avec l’idée que nous n’avons pas ces problèmes [de discrimination], mais lorsque les gens le réalisent, ils sont choqués et ne veulent pas gérer ça
, explique-t-il.
Le dossier Charles Daniels
Il lui a fallu entre 6 mois et 1 an pour rassembler l’histoire de Charles Daniels et de sa poursuite contre le Sherman Grand Theatre de Calgary.
« C’est arrivé en 1914, la même année où Viola Desmond est née et elle se trouve maintenant sur nos billets de 10 $! »
À l’époque, l’homme avait voulu assister à une représentation du Roi Lear, mais le directeur du théâtre a voulu l’obliger à s'asseoir au balcon, à l’abri du regard des spectateurs blancs. Charles Daniels a non seulement refusé, mais il a intenté une poursuite de 1000 $ contre le théâtre pour discrimination.
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Cela peut prendre des heures, voire des jours, avant que Bashir Mohamed ne mette la main sur une pièce d’archive qui témoigne de la vie de la communauté noire ou de la discrimination dont ils faisaient les frais, y compris de la part de cellules du Ku Klux Klan en Alberta.
Lorsque nous pensons au Ku Klux Klan, nous pensons souvent aux États-Unis, mais ils étaient très actifs ici et possédaient beaucoup de pouvoir
, explique-t-il en montrant les images d’une croix brûlée par le groupe près de Connors Hill en 1931.
Mais la tâche est colossale, explique l’archiviste des archives provinciales de l’Alberta, Michael Gourlie. Tout est principalement répertorié par nom et par date.
Le plus grand défi pour trouver de l’information sur la communauté afro-descendante à Edmonton ou en Alberta, c’est que l’information est cachée dans un certain sens. Pas volontairement, mais ce n’est pas organisé ou identifié sous ce nom
, précise-t-il.
« Si nous placions les boîtes d’archives côte à côte, ça s’étirerait sur 53 km! »
Des photos montrant des personnes arborant le blackface peuvent donc se retrouver dans la filière simplement nommée enfant
pour un carnaval.
Difficile aussi de savoir la quantité d’archives disponibles sur l'histoire des noirs, affirme Michael Gourlie. Nous trouvons constamment de nouvelles archives… mais nous ne savons pas toujours que nous les avons avant que quelqu’un ne vienne nous les demander,
dit-il.
Un travail pour la postérité
En plus de partager ses découvertes sur son compte Twitter, Bashir Mohamed espère que ses recherches pousseront le gouvernement provincial à inclure l'histoire des noirs de la province au curriculum des étudiants albertains.
Ce dont nous avons besoin, ce sont des gens qui comprennent que ces événements se sont produits pour qu’ils puissent, lorsque de terribles incidents [racistes] se reproduisent, réagir efficacement plutôt qu’en les ignorant
, illustre-t-il.
Avec les informations d'Andréane Williams