Hausse des agressions dans les hôpitaux psychiatriques

Plus d'agressions du personnel dans les hôpitaux psychiatriques, l'augmentation du nombre de cas lourds serait une des causes.
Photo : Radio-Canada
Les agressions survenues cette semaine à l'Hôpital Albert-Prévost reflètent un problème qui s'accentue au Québec. Entre 2014 et 2018, le nombre d'agressions signalées a augmenté de 40 % dans les hôpitaux psychiatriques et les centres de désintoxication. Un problème attribué au grand nombre de cas lourds et à la formation insuffisante du personnel.
Malgré sa longue expérience en psychiatrie, il affirme se sentir souvent en danger. C'est de la peur, je dirais. La peur d'être le prochain
, indique le Dr Stéphane Proulx, directeur de l'urgence psychiatrique de l'Hôpital Notre-Dame à Montréal. Un sentiment répandu dans les départements de psychiatrie de la région de Montréal. J'ai été menacé de mort, frappé par un patient au cou. Je me suis fait cracher au visage
. Le médecin affirme que c'est pire pour les préposés aux bénéficiaires, les agents de sécurité et les infirmières.
Des agressions sont survenues à d'autres endroits qu'Albert-Prévost. L'an dernier, un membre du personnel de l'hôpital Douglas s'est retrouvé dans le coma après une très violente agression. L'homme a subi des mois de réhabilitation.
Si les cas ne sont pas tous aussi dramatiques, les chiffres indiquent une croissance de la violence. En 2016, on rapportait 66 agressions dans les hôpitaux psychiatriques et les centres de désintoxication. Cinq ans plus tard, on en dénombrait 92, une augmentation de 40 %. Au total, 390 événements violents ont été rapportés au cours de ces 5 années, un chiffre qui serait inférieur à la réalité, selon les professionnels du secteur.
Le Dr Stéphane Proulx pense qu'un des principaux facteurs est l'augmentation du nombre de cas lourds. Parce que les unités de psychiatrie légale sont rares, bien des patients qui ont un potentiel de violence se retrouvent dans les hôpitaux conventionnels. Est-ce qu'on est équipés pour ça? La réponse est non
, affirme le Dr Proulx. Ses propos sont corroborés à micro fermé par plusieurs sources consultées par Radio-Canada depuis un an.
Une formation à améliorer
L'autre problème se situe au niveau du personnel. Le niveau de dangerosité augmente et les équipes sont moins bien formées
, résume Karine Cabana, coordonnatrice aux affaires sociales pour le Syndicat canadien de la fonction publique. Elle estime qu'un cercle vicieux s'installe dans les établissements de psychiatrie comme l'Institut Philippe-Pinel. Les plus expérimentés décident de sortir des milieux violents pour aller vers ceux qui le sont moins
, dit Mme Cabana. Cette perte d'expertise fait peser un lourd fardeau sur les épaules des jeunes qui restent. Dans le milieu, on s'entend aussi pour dire que la formation des intervenants doit être améliorée.
« On doit intervenir de manière sécuritaire et non de manière répressive. Ça demande une formation élevée et on ne l'a pas toujours. »
Il pense que les sanctions données aux établissements fautifs sont risibles. Au Québec, contrairement au reste du Canada, on a peu de mesures dissuasives
, dit-il. Par courriel, le cabinet de la ministre de la Santé Danielle McCann affirme accompagner les établissements dans la recherche de solutions
.
Un groupe de travail sur la sécurité des usagers et du personnel en psychiatrie a d'ailleurs été mis sur pied. Le Dr Stéphane Proulx pense que le temps presse pour le personnel et les patients. Et il affirme souscrire aux récriminations de groupes de défense des droits en santé mentale. Ils nous disent que les soins ne sont pas humains et c'est vrai qu'ils sont déshumanisés.