Replonger dans de douloureux souvenirs pour l’action collective des externats autochtones

Ottawa estime que près de 200 000 enfants autochtones ont été forcés de fréquenter un externat indien comme celui sur cette photo non datée.
Photo : Le Centre culturel Kanien’kehá:ka Onkwawén
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Le recours collectif des externats indiens fédéraux permet aux Autochtones les ayant fréquentés et y ayant reçu un mauvais traitement d’être indemnisés. Dans les communautés innues, de nombreuses personnes comptent soumettre une demande d’indemnisation. Trouver l’information et replonger dans de douloureux souvenirs n’est cependant pas simple.
Depuis le 13 janvier, il est possible pour les autochtones ayant fréquenté les écoles de jours fédérales de soumettre une demande d'indemnisation.
Sur la Côte-Nord, de tels établissements existaient dans presque toutes les communautés innues.
Il existe cinq niveaux de réclamation possibles pour les anciens étudiants, allant de 10 000 $ à 200 000 $ dépendant de la gravité du mauvais traitement ou du préjudice, physique ou sexuel, subi dans ces établissements.
Ces torts peuvent avoir été causés par le personnel de l'école, mais aussi par d’autres étudiants ou de tierces parties, comme un chauffeur d’autobus ou un dentiste.
Rosalie Jérôme, de Uashat mak Mani-Utenam, explique qu'elle vit toujours avec des phobies développées lors de son passage à l’école de jour de Mani-utenam.
Pour retrouver des documents scolaires, elle a créé un groupe Facebook avec ses anciens camarades de classe.
Mme Jérôme prend son temps pour rassembler ses souvenirs.
Quand le formulaire est sorti, je pensais que ce serait facile étant donné que je lis très bien le français. Mais quand tu commences à vouloir te remémorer des choses que tu as vécues quand tu étais jeune, émotionnellement, c’est difficile. Ça fait que depuis que je prends des notes dans un cahier et quand je serai prête à tout rassembler mon histoire, là je l’enverrai
, explique-t-elle.
Comme le laisse entendre Mme Jérôme, remplir la demande peut être plus complexe pour des personnes peu scolarisées ou maîtrisant moins le français.
La recherche documentaire est aussi un défi pour les anciens étudiants ayant déménagé depuis leur jeunesse.
Liette St-Onge, une Innue de Uashat, raconte avoir fréquenté brièvement l'école de jour à Wendake, près de Québec, en raison de l’emploi de son père.
Aujourd'hui, ce dernier souffre de la maladie d’Alzeimer et sa mère est décédée. Il est donc complexe de se souvenir des détails de son parcours scolaire.
Mme St-Onge dit avoir entrepris des démarches auprès des autorités de Wendake où on lui a indiqué ne pas retrouver son dossier.
Les juristes chargés d'épauler les demandeurs se veulent toutefois rassurants pour les cas comme celui de Mme St-Onge.
C’est le cabinet Gowling WLG qui est responsable du soutien juridique auprès des demandeurs d’indemnisation.
Vanessa Lessard, adjointe juridique chez Gowling WLG, insiste sur le fait qu’en l'absence de preuves documentaires, les demandeurs peuvent remplir une déclaration sous serment.
On le sait que dans plusieurs cas, c’est arrivé il y a plusieurs années
, explique Mme Lessard.
De garder des bulletins ou des photos scolaires, c’était peut-être pas une priorité lors des déménagements ou dans la vie en général
, poursuit-elle.
Le cabinet offre également gratuitement de l’aide.
On peut remplir le formulaire électroniquement pour les personnes et juste l’envoyer pour signature
, explique l’adjointe juridique.
Les personnes ayant fréquenté les externats ont jusqu'au 13 juillet 2022 pour soumettre leur demande d'indemnisation.
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