Aucune accusation après une enquête sur la construction du QG de la police de Winnipeg

Les travaux du nouveau quartier général du Service de police de Winnipeg ont été exécutés en 2016.
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Aucune accusation criminelle ne sera déposée après une enquête de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) lancée en 2014, qui portait sur des allégations de fraude et de falsification de documents entourant la construction du nouveau quartier général de la police, dans le centre-ville de Winnipeg.
Le 17 décembre 2014, la GRC a effectué une perquisition du quartier général de Caspian Construction, l'entreprise que la Ville de Winnipeg avait embauchée pour construire le nouveau quartier général de l'avenue Graham.
La GRC a déclaré à l’époque qu’elle menait une enquête criminelle sur le projet de construction, qui a coûté 214 millions de dollars à la Ville de Winnipeg, une fois mené à terme, en 2016.
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L’enquête s’est ensuite étendue à une autre construction menée par Caspian : celle du centre de traitement du courrier de Postes Canada, près de l’aéroport de Winnipeg.
Dans des documents présentés en cour en 2015, la GRC alléguait que le propriétaire de Caspian, Armik Babakhanians, avait gonflé et modifié des factures et des devis de sous-traitants pour escroquer la Ville de millions de dollars pour des travaux qui ont coûté moins cher que ce qui lui a été frauduleusement soumis
.
Selon les allégations contenues dans les dossiers initiaux déposés au tribunal, Caspian aurait facturé à la Ville des travaux qui n’avaient rien à voir avec le quartier général du service de police, tel que l’aménagement d’une piscine dans la maison de Shaun, le fils d’Armik Babakhanians.

Les bureaux de l'entreprise de construction Caspian ont été la cible d'une perquisition en décembre 2014.
Photo : Radio-Canada / Brett Purdy
Vendredi, la province a indiqué par communiqué que le Service des poursuites du Manitoba (SPM), en se basant sur la preuve disponible, n’allait pas déposer d’accusations criminelles.
Après un examen complet des questions juridiques et des faits fournis par l’enquête, le SPM a conclu qu'il ne détient pas de preuves suffisantes pour approuver le dépôt d’accusations criminelles et estime qu’une condamnation ne serait pas probable
, indique le communiqué provincial.
La province précise que l’enquête policière a duré deux ans et demi. Les documents relatifs à l'enquête ont été acheminés à la Couronne en 2017 pour que cette dernière détermine quelles pourraient être les accusations possibles.
Sur quoi a porté l’enquête
À l’été de 2016, l’enquête policière s’est intéressée à l’ancien directeur général de la Ville, Phil Sheegl. La GRC a allégué dans des documents judiciaires qu'il avait reçu des pots-de-vin
pour aider Caspian à obtenir le contrat de construction du quartier général de la police.
En cherchant des comptes bancaires liés à Caspian et à son propriétaire, la GRC a découvert une société-écran contrôlée par les Babakhanians. Le gestionnaire de Caspian avait versé 200 000 $ à une société appartenant à Phil Sheegl, selon les documents judiciaires.
Dans une déclaration sous serment soumise à un juge en juin 2016, la sergente de la GRC Breanne Chanel écrivait : Ce paiement a été fait moins de deux semaines après que Phil Sheegl, en tant que directeur général de la Ville, eut obtenu la responsabilité d’accorder les contrats pour le projet de QG de la police, et par la suite, Caspian a obtenu le contrat de plus de 100 millions de dollars.
Selon l’avocat winnipégois Robert Tapper, qui représente l’ancien maire de Winnipeg Sam Katz et Phil Sheegl, ce versement ne représentait pas un pot-de-vin, comme l’allègue la GRC, mais s’inscrit dans une transaction immobilière de 327 000 $ entre ses clients et la famille Babakhanians en mai et en juin 2011.

De gauche à droite : l'ancien maire de Winnipeg, Sam Katz, l'ancien directeur général de la Ville, Phil Sheegl, et le propriétaire de Caspian Construction, Armik Babakhanians.
Photo : Radio-Canada
Robert Tapper a déclaré cette semaine qu’il était scandaleux
que cette enquête, ayant donné une image négative de ses clients, ait traîné en longueur pendant cinq ans.
Il leur est arrivé quelque chose de grotesque et d’horrible, a-t-il déclaré mardi, avant que la province annonce qu’il n’y aurait pas d’accusations. La GRC devrait déclarer qu’elle n’a rien qui lui permet de porter des accusations contre ces deux hommes.
La décision de la Couronne
La province indique qu’en consultant la preuve fournie elle ne pensait pas pouvoir obtenir une condamnation en cour.
Le ministère de la Justice explique par communiqué avoir consulté d’autres procureurs et évalué un certain nombre d’accusations possibles sous le Code criminel du Canada : abus de confiance, fraude dépassant 5000 $, fabrication de faux, emploi de documents contrefaits, possession de livres comptables et documents contrefaits et blanchiment d’argent.
Premièrement, la preuve doit être suffisante pour démontrer qu’on peut raisonnablement s’attendre à obtenir une condamnation, précise le ministère de la Justice. Deuxièmement, il faut savoir si les accusations sont dans l’intérêt du public
, ce dont la province tient compte seulement si la réponse à la première question est positive, explique le communiqué.
Réactions des élus
Pour le maire de Winnipeg, Brian Bowman, il y a toujours des questions sans réponses dans ce dossier. Il dit avoir été surpris qu'aucune accusation n'ait été portée par le bureau des poursuites judiciaires.
Il y a un besoin continu d’une enquête publique
, lance-t-il. Le maire souhaite que ce soit la province qui mène l’enquête.
Or, le ministre provincial de la Justice, Cliff Cullen, de son côté, estime que le cas est clos et qu’il n’y a aucun besoin de s’étaler sur le dossier. Je vais me tenir à mes points de discussion
, a-t-il même dit aux journalistes.
Avec des informations de CBC