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Des restaurateurs du Vieux-Hull obligent des clients à signer des contrats illégaux

Une image de bars du Vieux-Hull avec deux pages du contrat.

Des propriétaires de restaurants du Vieux-Hull se sont concertés pour exiger un dépôt de 10 $ par personne, un montant qui sera conservé si la réservation n’est pas honorée.

Photo : Radio-Canada / Jonathan Dupaul

Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Des restaurateurs du Vieux-Hull, à Gatineau, imposent la signature d’un contrat illégal à leurs clients lors d’une réservation de groupe, selon ce qu’a appris Radio-Canada. Une dizaine de propriétaires de restaurants se sont concertés pour exiger une pénalité de 10 $ par personne, si la réservation n’est pas honorée. Cette clause va à l’encontre de la Loi sur la protection du consommateur.

Piz’za-za, Les Vilains Garçons, CoqLicorne, Le Troquet… Tous ces restaurants exigent que les groupes honorent leur réservation, sous peine de perdre leur acompte.

Radio-Canada a obtenu copie de trois contrats qui sont envoyés aux clients. Ces derniers doivent s’engager à annuler ou à modifier leur réservation de groupe au moins 48 h avant [la] date prévue. Dans le cas contraire, l’établissement gardera le dépôt, peut-on lire.

Par exemple, si vous avez réservé pour 12 personnes et que seulement 9 se présentent, le restaurateur conservera 30 $.

« Vous pouvez le voir comme une pénalité. Nous, on le voit comme un dédommagement d'une place qui n'a pas été attribuée et qui avait été réservée au départ. »

— Une citation de  Alexandre Leblanc, président de l’Association des commerçants du secteur Aubry

Cette façon de procéder est précisément contraire à la législation, rappelle de l’Office de la protection du consommateur (OPC), l’organisme responsable d’appliquer la Loi sur la protection du consommateur.

Il est interdit à tout commerçant de percevoir un montant en guise de dépôt si ce montant est destiné à être conservé à titre de pénalité, confirme par courriel le responsable des relations avec les médias, Charles Tanguay.

Une autre interprétation de la loi

Pourtant, l’Association des commerçants du secteur Aubry semble faire une autre interprétation de la loi. Quand les gens ont pris connaissance des conditions de réservation et ont signé, pour nous, il n'y a pas de problématique, souligne le président Alexandre Leblanc, également directeur général du restaurant Piz'za-za et du café Aux 4 jeudis. C'est l'interprétation qu’on fait de la Loi sur la protection du consommateur.

L’avocate chez Option consommateurs, Élise Thériault, est pour sa part choquée de constater que des restaurants forcent les clients à signer ces contrats qu'elle juge nuls.

Me Thériault répond aux questions du journaliste dans un bureau.

Élise Thériault, avocate chez Option consommateurs (archives)

Photo : Radio-Canada

On ne peut pas [en tant que client] renoncer à une protection de la Loi sur la protection du consommateur. Et on ne peut pas par écrit insérer dans un contrat quelque chose qui est contraire à la loi, affirme-t-elle. Me Thériault encourage les clients à ne pas signer cette entente et à déposer une plainte auprès de l’OPC.

Si le restaurateur a réellement subi des dommages en raison de l’absence de ses clients, il doit lui-même en faire la preuve devant les tribunaux, ajoute Charles Tanguay.

« L’objectif [de la loi] est d’obliger le commerçant à démontrer les dommages réels subis, plutôt que de les fixer à l’avance par un montant arbitraire. »

— Une citation de  Charles Tanguay, responsable des relations avec les médias de l’OPC

Les commerçants fautifs s’exposent à une poursuite pénale et ils pourraient recevoir une amende allant de 1000 $ à 40 000 $.

L’acompte, une forme de « protection »

Si des restaurateurs ont décidé d’exiger des acomptes, c’est pour se prémunir contre les clients qui réservent, mais qui ne se présentent pas. Ces réservations non honorées, dénoncées par l'industrie, peuvent faire perdre d’importants revenus.

La pratique n’est pas unique à Gatineau. L’Association Restauration Québec encourage elle-même ses membres à utiliser un contrat, semblable à celui des restaurateurs du Vieux-Hull, afin d’éviter les réservations non honorées.

D’ailleurs, la saison des partys de bureau bat son plein et les réservations de groupes se multiplient. Les annulations de dernière minute augmentent également, confirme Alexandre Leblanc.

M. Leblanc dans un bar dans la journée répond aux questions d'un journaliste.

Alexandre Leblanc est le directeur général du restaurant Piz'za-za et du café Aux 4 jeudis, situés sur la rue Laval (archives).

Photo : Radio-Canada / Jonathan Dupaul

Ça arrive de plus en plus. C'est pour ça que, cette année, on s'est mis d'accord pour un contrat de réservation pour une signature obligatoire pour confirmer une réservation, explique-t-il. On demande un dépôt par tête; c'est une protection.

« On va être permissifs », disent les restaurateurs

Si le contrat semble ferme à première vue, Alexandre Leblanc assure que les commerçants feront preuve de bon jugement et qu’ils ne pénaliseront pas les groupes où, par exemple, deux personnes ne se présentent pas à la réservation.

Nous, on fait du service à la clientèle, on va être permissifs, soutient-il. Mais c'est sûr et certain que si vous réservez pour 25 et que vous arrivez 10, on va avoir une sérieuse discussion!

Pour le moment, la plupart des restaurants ne prélèveraient pas d’acompte sur la carte de crédit de la personne qui réserve pour un groupe, selon Alexandre Leblanc. Mais ils conserveraient le numéro de la carte pour imposer une pénalité si les clients ne se présentaient pas à la réservation ou s’ils étaient moins nombreux que prévu.

Les autres restaurateurs que nous avons cités ont refusé de nous accorder une entrevue, déléguant M. Leblanc en tant que porte-parole de l’Association des commerçants du secteur Aubry.

Autre province, autre loi

Sur la rive ontarienne de la rivière des Outaouais, la situation est différente. La Loi sur la protection du consommateur n’interdit pas aux restaurateurs de faire signer aux consommateurs un contrat de réservation et de verser un acompte, a indiqué par courriel un représentant du ministère des Services gouvernementaux et des Services aux consommateurs.

De fausses déclarations sur l’objet de l’acompte ou un manque de transparence de la part du restaurant à ce sujet pourraient constituer une pratique déloyale, a-t-il précisé.

Le ministère invite toute personne ayant des questions ou des inquiétudes relativement à un contrat à contacter Protection du consommateur Ontario.

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