Un régime riche en gras accélère la progression du cancer de la prostate

D’autres études ont déjà montré que l'apport en gras saturé est associé à la progression du cancer de la prostate. Celle-ci dévoile le fondement mécanistique à ce lien.
Photo : iStock / ozanuysal
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La consommation de gras saturé induit une « reprogrammation cellulaire » qui est associée à la progression et à la létalité du cancer de la prostate, affirment des chercheurs québécois de l'Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill.
Les résultats des travaux du Pr David P. Labbé et de ses collègues pourraient permettre d'identifier des patients dont le cancer pourrait être plus agressif et mortel.
En outre, ces chercheurs pensent qu’un changement de régime alimentaire impliquant une diminution de l’apport en graisses animales et plus particulièrement en gras saturés chez les hommes atteints d'un cancer de la prostate à un stade précoce pourrait éventuellement réduire ou retarder le risque de progression de la maladie.
D’autres études ont déjà montré que l'apport en gras saturé est associé à la progression du cancer de la prostate. Celle-ci dévoile le fondement mécanistique de ce lien.
Repères
- Cette glande fait partie des appareils reproducteur et urinaire de l’homme.
- De la taille d’une noix, elle se trouve juste sous la vessie, devant le rectum.
- La prostate produit du mucus et le liquide prostatique, qui se mélangent aux spermatozoïdes et à d’autres liquides pour former le sperme.
- Pas moins de 22 900 Canadiens recevront un diagnostic de cancer de la prostate cette année; et 4100 autres en mourront.
Le gras et la prostate
Certains gènes – appelés oncogènes – tiennent un rôle de premier plan dans l’apparition et la progression du cancer. Le gène MYC est l'un d'entre eux.
Nous avons montré que la consommation de gras saturé aggrave le cancer de la prostate en provoquant une réaction semblable à la surexpression de MYC.
La surexpression du gène MYC refaçonne profondément les programmes cellulaires et produit une signature transcriptionnelle distinctive
, explique le professeur.
MYC est un facteur clé de la tumorigenèse, c’est-à-dire qu’il induit des propriétés malignes dans les cellules normales et favorise la croissance des cellules cancéreuses.
Dans leurs travaux, en s’appuyant sur des questionnaires sur la fréquence de consommation d'aliments de patients, les chercheurs ont pu les catégoriser en fonction de leur consommation de gras.
En combinant ces informations alimentaires aux données sur l’expression des gènes provenant de 319 patients, les chercheurs ont découvert que la consommation de gras animal, et plus particulièrement de gras saturé, imitait une surexpression de MYC.
Les patients qui présentaient le taux le plus élevé de la signature de MYC associée à la consommation de gras saturé étaient quatre fois plus susceptibles de mourir du cancer de la prostate que les patients présentant le taux le plus faible, indépendamment de leur âge ou de l'année du diagnostic.
Comme la consommation de gras peut être liée à une augmentation de la graisse corporelle et de l'obésité, et que l'obésité est également un facteur de risque associé au cancer de la prostate, les chercheurs ont utilisé l'indice de masse corporelle (IMC) pour s'assurer que seule la consommation de gras saturé, et non l'obésité, favorisait la progression vers une maladie métastatique et fatale.
Même après avoir éliminé l'obésité de l'équation, les patients présentant des taux élevés de la signature de MYC associée à la consommation de gras saturé sont encore trois fois plus susceptibles de mourir d'un cancer de la prostate.
Les tissus tumoraux ciblés
L'étude a également montré que pour que les gras saturés induisent la reprogrammation de MYC, les tissus doivent être transformés.
Chez un patient atteint d'un cancer de la prostate, la prostate contient à la fois des tissus tumoraux et des tissus normaux
, affirme le chercheur.
Nous avons montré que la consommation de gras saturé n'affecte que le programme transcriptionnel dans les tissus tumoraux.
Selon le Pr Labbé, ces résultats suggèrent qu’une proportion importante de patients atteints de cancer de la prostate, y compris ceux chez qui aucune amplification de MYC n'est observée, pourraient bénéficier de traitements épigénétiques ciblant l'activité transcriptionnelle de MYC ou d'interventions diététiques ciblant des dépendances métaboliques régulées par MYC
.
Le détail de cette étude est publié dans la revue Nature Communications (Nouvelle fenêtre) (en anglais).