Cultiver avec des résidus de pâtes et papiers pour réduire les GES
Il y a moins de gaz à effet de serre lorsqu'on fait l'épandage plutôt que l'enfouissement des résidus de pâtes et papiers.
Photo : Associated Press / Eric Albrecht
En plus d'enrichir leurs terres, les agriculteurs qui utilisent les boues de papetières contribuent à diminuer les émissions de gaz à effet de serre (GES), concluent des chercheurs de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC). Une pratique qui pourrait cependant être encore plus encouragée, selon un expert.
On connaissait déjà les propriétés fertilisantes des résidus d’usines de pâtes et papiers, mais voilà qu’une étude confirme que l’utilisation agricole serait meilleure pour l’environnement.
Les travaux de recherche de la Chaire en éco-conseil de l’UQAC démontrent qu'il y a moins de gaz à effet de serre quand on fait l’épandage plutôt que l’enfouissement des boues de papetières.
Les chercheurs ont découvert que lorsqu’ils sont enfouis, en plus de produire du méthane, ces résidus produisent aussi du protoxyde d’azote, un gaz à effet de serre 10 fois plus puissant que le méthane et 300 fois plus que le CO2.
L'application sur des champs émet beaucoup moins de gaz à effet de serre parce que les bactéries ont accès l'oxygène et peuvent faire une décomposition beaucoup plus complète.
D’après le plus récent bilan du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC), qui remonte à 2012, l'industrie papetière au Québec génère 1,3 million de tonnes de boues par année
Entre 35 et 40 % de ces résidus vont toujours vers l’enfouissement, selon le professeur Villeneuve.
Soutenir les papetières
Il n’y a pas de progrès de l’enfouissement vers l’épandage
, remarque l’agronome Marc Hébert, expert-conseil et formateur.
Selon lui, l’épandage dans les champs devrait être encore plus encouragé, considérant que c’est probablement une des façons les plus efficientes pour réduire les gaz à effet de serre
, dit-il.
Mais si les usines de pâtes et papiers se tournent encore vers l’enfouissement, c'est qu'il y a un enjeu économique, affirme Marc Hébert.
Dans ce contexte, selon lui, il serait important que les papetières aient un soutien financier qui pourrait les encourager à éviter l'enfouissement.
Lorsque l’épandage n’est pas possible, il faudrait par exemple que l’accès au compostage soit plus avantageux que l'enfouissement.
Bien que ce soit la solution la plus économique pour ces entreprises, le recours à l’épandage n’est pas toujours possible, de sorte que les camions sont parfois redirigés vers un site d’enfouissement.
C’est le cas notamment lorsque les conditions météorologiques ne sont pas favorables à la livraison dans les champs.
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Autre solution?
Une autre option pourrait s’offrir aux usines de pâtes et papiers pour valoriser leurs résidus.
Les professeurs Claude Villeneuve et Patrick Faubert, de la chaire en éco-conseil de l’UQAC, des étudiants et autres chercheurs travaillent en collaboration avec le laboratoire de l’UQAC pour mettre au point un engrais à base de résidus industriels provenant de la production papetière et de la production d’aluminium.
Notre hypothèse, c'est qu'on peut en faire un engrais qui va être efficace pour la fertilisation des bleuetières, mais aussi la fertilisation forestière
, explique le professeur Claude Villeneuve.
Une idée qui permettrait aux usines de pâtes et papiers de maximiser le recyclage de leurs résidus. Le professeur Villeneuve fait la comparaison avec le compost de crevettes.
Avant, on débarquait les crevettes et on enfouissait les écailles dans un dépotoir. Et aujourd’hui, on fabrique du compost de crevettes qui, lorsqu’il arrive chez vous, est débarrassé de ses odeurs, puis on peut utiliser ses valeurs fertilisantes dans les plates-bandes et le potager
, illustre-t-il.
Si le projet fonctionne, le professeur Claude Villeneuve et son équipe pensent que la production de cet engrais permettrait d’utiliser l'ensemble des résidus de pâtes et papiers de façon rentable pour les usines qui les génèrent.
Par ailleurs, M. Villeneuve affirme que ce produit serait beaucoup moins coûteux que le fumier de poulet qui est présentement utilisé comme fertilisant dans la culture du bleuet.