L'ONU craint un embrasement du conflit en Bolivie

L'ONU dénonce « l'usage disproportionné de la force » par les autorités boliviennes, qui pourrait mener à une aggravation du mouvement de contestation.
Photo : Reuters / Danilo Balderrama
L’usage « inutile et disproportionné » de la force par les autorités boliviennes contre les manifestants risque de faire « dégénérer » la situation, a prévenu l’ONU samedi, en réclamant la tenue d'une enquête sur la répression qui secoue le pays.
Le mouvement de contestation qui ensanglante la Bolivie depuis un mois a fait jusqu’à maintenant près de vingt morts. Encore vendredi, des affrontements entre les forces de sécurité et des producteurs de coca ont fait au moins huit morts.
Les premiers décès étaient dus surtout à des affrontements violents entre manifestants rivaux, mais les plus récents semblent être le résultat d'un usage inutile et disproportionné de la force par la police et l'armée
, s’est désolé la Haute-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Michelle Bachelet.
Cet usage excessif de la force est extrêmement dangereux
, a-t-elle ajouté par voie de communiqué, craignant notamment que la situation devienne bien pire, plutôt que d’apaiser la violence
La situation en Bolivie pourrait dégénérer si les autorités ne la gèrent pas avec délicatesse et en accord avec les normes internationales qui régissent l'usage de la force.
D’autant plus que le pays d'Amérique latine est plongé dans l'inconnu depuis la démission du président Evo Morales, dimanche, sous la pression de l'armée et de la police.
Les premiers heurts étaient survenus après l'élection présidentielle du 20 octobre, que Morales affirmait avoir remportée. Des soupçons d'irrégularités électorales, confirmé par le dévoilement récent d’un rapport, ont attisé les tensions.
L’ex-président a depuis trouvé refuge au Mexique, où il crie au coup d’État et dénonce la répression brutale des forces de sécurité contre ses partisans.
Michelle Bachelet a d’ailleurs estimé que 14 personnes avaient été tuées depuis la fuite d’Evo Morales, il y a six jours. « Les actions répressives des autorités pourraient faire obstacle à tout dialogue », a-t-elle renchéri.
Le pays est maintenant dirigé par l'opposante et sénatrice conservatrice Jeanine Áñez, qui s'est proclamée mardi présidente par intérim. Sa première décision de politique étrangère a été de reconnaître le président par intérim du Venezuela, Juan Guaido, plutôt que le président socialiste Nicolas Maduro – un allié d'Evo Morales.
Nouvel affrontement
Des affrontements ont opposé, vendredi, des milliers de manifestants aux forces de l'ordre dans la banlieue de Cochabamba, un fief politique de l'ancien président Morales.
La confrontation s’est conclue par au moins huit morts et une centaine de blessés. La majorité de ces décès et des blessures ont été causés par arme à feu.
Des partisans de Morales ont tout de même continué à manifester samedi dans le centre pays, bloquant des axes routiers, coupant certains oléoducs ou défilant dans les rues.
La Haute-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Michelle Bachelet a par ailleurs dénoncé des arrestations et des détentions massives
, estimant à plus de 600 le nombre de personnes détenues depuis le 21 octobre. Plusieurs de ces arrestations sont survenues au cours des derniers jours
, a-t-elle soutenu.
Six Cubains, notamment, ont été arrêtés vendredi, parce qu'ils étaient soupçonnés de financer des manifestations contre le nouveau gouvernement par intérim de Jeanine Añez. En réaction, le gouvernement de Cuba a rapatrié 226 médecins cubains, qui offraient des services de santé locaux dans différents secteurs de la Bolivie.
Michelle Bachelet a exigé la tenue d’une enquête rapide, impartiale, transparente
et réclamé des autorités qu’elles dévoilent le nombre de personnes arrêtées, blessées et tuées au cours des manifestations.