De plus en plus « d’ambassadeurs » de marque sur les réseaux sociaux

De plus en plus d'ambassadeurs de marque, de simples citoyens qui font la promotion gratuitement d'un produit, sont approchés sur Instagram et Facebook.
Photo : Getty Images / bigtunaonline
Le phénomène des ambassadeurs, simples citoyens qui font la promotion d’une marque moyennant des rabais, prend de l’ampleur, estiment des spécialistes. Offrir des échantillons ou des rabais en échange de visibilité coûte moins cher aux entreprises que d’avoir recours à des égéries ou à des influenceurs sur Instagram ou Facebook.
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Pas besoin d'être très populaire sur les réseaux sociaux pour recevoir une offre comme celle-là.
Les offres d’être ambassadeur d’une marque, même lorsqu’un compte est suivi par moins de 3000 abonnés sur Instagram, sont de plus en plus fréquentes.
Ce qu’on appelle des ambassadeurs, ce sont des gens comme vous et moi. On s’abonne à ces gens-là, parce qu’on est souvent amis avec ces gens-là. Donc, il y a plus d’interactions naturelles
, explique le professeur en publicité de l’Université Laval, Christian Desîlets.
Or, aucune rémunération monétaire n'est offerte à ces internautes, qui n'ont droit qu'à des rabais ou des échantillons. Certaines offres nécessitent même que l'ambassadeur achète le produit pour lequel il fait de la promotion.
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Le spécialiste en publicité indique que cette pratique fait d’abord et avant tout appel à la flatterie pour convaincre les internautes de se prêter au jeu.
On fait appel à la vanité de ces gens pour qu’ils disent à leur réseau qu’ils ont été ciblés, sélectionnés et invités à devenir ambassadeurs de leur marque, indique M. Desîlets. Pour l’égo, c’est formidable, mais financièrement, c’est ridicule.
Christian Desîlets dénonce la pratique qu’en échange d’un rabais, une entreprise demande de la visibilité. Selon lui, d’un point de vue éthique, les compagnies devraient au minimum fournir un échantillon du produit dont ils veulent mousser la vente.
« C’est du cheap labor. [ ...] C'est non seulement condamnable, mais il faut que ce soit dénoncé sur la place publique. [ ...]C'est scandaleux. »
Selon lui, les marques utilisent de plus en plus d’ambassadeurs ou de micro-influenceurs, parce qu’il coûte moins cher de faire appel à eux qu'aux influenceurs très connus.
Des agences ciblent des comptes avec de belles photos dont la thématique cadre avec celle de l’entreprise, indépendamment du nombre d’abonnés. Selon lui, les faux abonnés de comptes très populaires posent un risque que les entreprises tentent d’éviter.
Il y a aussi de plus en plus d’influenceurs et c’est comme dans tous marchés, quand ils commencent à être sursollicités, les prix augmentent,
élabore M. Desîlets.
Selon le site Influenceurs Québec, géré par l’agence de marketing Leeroy, la belle province aurait environ 1600 influenceurs, dont une grande proportion a moins de 3000 abonnés sur Instagram. Il n’existe aucun registre pour connaître le nombre exact d’influenceurs au Québec, selon les spécialistes en publicité questionnés par Radio-Canada.
Les règles pour les mineurs
L’avocate spécialisée en droit du marketing, Sophie Deschênes-Hébert, est souvent sollicitée pour des questions de droit entourant la publicité sur les réseaux sociaux. Elle indique que la loi permet aux entreprises d'offrir à leurs ambassadeurs des rabais à titre de rémunération. Par ailleurs, la loi ne prescrit pas un traitement spécifique pour les ambassadeurs d'âge mineur.
C'est sûr que par rapport à l'âge des influenceurs, à partir du moment où ils sont en âge de consentir à l'achat de produits, ou de faire des achats eux-mêmes, je vous dirais que d'un point de vue légal, il n'y a pas nécessairement d'implication mise à part l'interdiction de faire de la publicité destinée aux enfants de moins de 13 ans
, indique l’avocate.
Parmi la soixantaine de plaintes reçues à l’Office de la protection du consommateur dans la dernière année, concernant la publicité qui cible les enfants, une seule porte sur la publicité dans les réseaux sociaux. Celle-ci dénonce une publicité sur YouTube.
Me Deschênes-Hébert indique que la loi évolue avec les nouvelles technologies. Les internautes qui font la promotion d'un produit ou d'un service sur le web doivent obligatoirement indiquer qu'ils prennent part à une campagne publicitaire.
Les normes canadiennes de la publicité ont changé les règles récemment. [ ...] Il faut indiquer clairement que ce témoignage-là est motivé par une rétribution monétaire, en produits ou en rabais.