Accès privilégié en pédopsychiatrie
Des ateliers artistiques sont offerts aux patients qui séjournent à l'hôpital de jour en pédopsychiatrie à l'hôpital Fleurimont.
Photo : Radio-Canada / Emilie Richard
À l'unité des adolescents en pédopsychiatrie, des bricolages colorés décorent les murs. À l'entrée, il y a aussi une série de casiers. Rapidement, un constat est fait : ici, on est loin des chambres d'hôpital qui se succèdent.
Dans cette section de l’hôpital Fleurimont, les salles d’ateliers et de consultation côtoient cuisine et salon.
Une classe est même aménagée au bout du corridor.
L’hôpital de jour s’adresse aux jeunes de 12 et 17 ans qui présentent des problématiques reliées aux troubles alimentaires, dépressifs, de stress post-traumatique ou anxieux, par exemple.
Le patient dépose ses effets personnels dans son casier lorsqu’il arrive le matin vers 9 h. Il les reprend vers 15 h, lorsqu’il termine sa journée avant de retourner à la maison.
Et le scénario se répète les jours suivants.
Les jeunes adolescents sont donc traités quotidiennement sans pour autant être hospitalisés, ce qui permet aux équipes soignantes d’avoir un suivi avec les parents et aux patients de continuer à vivre la dynamique familiale.
Pour être admis, le patient doit toutefois démontrer sa motivation et son implication.
C’est un traitement plus intensif. Au lieu de venir voir le psychologue une fois par semaine pour une thérapie, si on juge que le jeune a une rupture de fonctionnement assez importante et qu’il est en train de se déstabiliser dans son environnement, dans ce temps-là, on utilise cette forme de traitement
, explique le psychiatre de l’enfant et de l’adolescent, Dr. Yves Lajoie.
Il y a plus de trente ans, quand ce dernier a commencé sa pratique, le concept n’existait pas. Son domaine a beaucoup évolué depuis.
L’hôpital de jour a ouvert en 2006. Il a été mis en place par la pédopsychiatre Stéphanie Mailloux.
Quand l'anxiété prend toute la place
Les plus récents chiffres concernant l’anxiété chez les jeunes parlent d’eux-mêmes. D’ailleurs, selon Dr. Lajoie, la clientèle qui présente des troubles anxieux est de plus en plus fréquente à l’hôpital de jour.
Marianne Boucher, 13 ans, a été l’une de ses patientes. Elle a été traitée à l'hôpital de jour pour de l'anxiété, de janvier à avril 2019.
Elle n’allait plus à l’école.
On la sent cette souffrance, cette détresse que le jeune peut avoir parce qu'il n'est pas encore totalement en contrôle de lui-même, qu’il est encore dans sa recherche d'identité. Nos attentes comme société sont très grandes. C’est confrontant, même inquiétant quelque part. Ils ont accès à tellement n'importe quoi avec la télé, les réseaux sociaux. L'intimidation, si tu n'entres pas dans une certaine catégorie, t'es mis de côté, t'es jugé
, enchaîne-t-il.
Marianne souligne l’aide qui lui a été offerte. Elle s’est sentie écoutée et a vu concrètement des changements au fil de son traitement.
J’avais peur que mon problème ne soit pas légitime et que je ne sois pas à ma place. J’avais peur de devoir retourner à l’école. Je faisais aussi parfois des crises de panique. Dans ma tête, ces moments étaient toujours égaux à la défaite. À l’hôpital, on les voyait comme des opportunités pour mettre en action des trucs pour baisser mon anxiété et apprendre sur moi-même et ma maladie.
Les jeunes patients sont suivis de près par une équipe multidisciplinaire dont fait partie Kim Rouillard, infirmière assistante au supérieur immédiat. Elle explique que chaque patient a un psychoéducateur assigné à son dossier et que c’est ce dernier qui assure le suivi. Quand le jeune arrive, il a toujours une rencontre avec son psychoéducateur et avec le médecin ou le résident traitant
, explique la femme.
Aussi, quand l'évaluation de l'état mental des patients ne satisfait pas l'équipe, il arrive qu'ils demeurent hospitalisés. Quand on voit que ça ne fonctionne pas, on appelle le pédopsychiatre dans le dossier. C'est déjà arrivé de passer de l'hôpital de jour à l'hospitalisation et l'inverse aussi
, précise Mme Rouillard.
Lorsque les patients ne sont pas trop désorganisés, ils doivent passer un certain nombre d’heures par jour dans un local aménagé en classe. Ça leur évite d’accumuler trop de retard scolaire et l’enseignante peut également transmettre ses observations à l’équipe médicale.
Le but de l’hôpital de jour, ce n’est pas de les envoyer à l’école. En majorité, ils ne vont plus à l’école parce qu’ils sont en rupture de fonctionnement total. On va les réintégrer graduellement
, précise Dr. Lajoie.
Marianne a d'ailleurs vécu cette transition progressive. Au début, je faisais quatre jours en pédopsychiatrie, une journée d’école, puis, au fur et à mesure, j’y allais deux, trois et quatre jours.
La stabilité du personnel auprès du jeune est également priorisée. La première partie d'un bon traitement, c'est de faire une bonne alliance avec le jeune et avec sa famille
, affirme Dr. Lajoie, tout en précisant que le jeune doit travailler fort.
Lorsqu’il débute sa journée, l’adolescent doit consulter son horaire affiché au salon. Entre les ateliers et les rencontres, il y a aussi des périodes réservées au temps libre. Ils peuvent jouer au babyfoot, au ping-pong, on a des instruments de musique. Tout est thérapeutique ici. On voit comment ils se comportent, comment ils interagissent avec les autres. Par exemple, pendant deux demi-journées, ils vont au gymnase, ils ont des activités physiques à faire avec des intervenants, ça aussi ça sert d'évaluation
, exprime le psychiatre qui passe du temps à l’unité les mardis et les jeudis matins.
Le jeudi matin, on a une réunion d'équipe qui nous permet de parler de chacun des jeunes. De leur évolution d'une semaine à l'autre, quels objectifs ont été atteints, est-ce qu'il y a des obstacles? On décide des orientations pour la prochaine semaine. Je les rencontre aussi.
L’hôpital de jour se trouve au même endroit où d’autres jeunes sont hospitalisés 24 h/24. Ils participent donc tous aux ateliers de groupe.
Ce qui est beau avec les adolescents, c'est qu'on les encourage à travailler avec leurs pairs. Quand il y a un autre adolescent qui vit la même problématique, on voit beaucoup d'entraide. On utilise ça en thérapie
, précise Mme Rouillard.
De son séjour, Marianne retient justement le fait d'avoir été capable de s’exprimer librement et de ne pas s'être sentie jugée.
Après mon séjour à l’hôpital, j’ai eu des moments plus difficiles, mais j’arrive maintenant mieux à gérer mon anxiété
, témoigne, pleine de reconnaissance, Marianne.
Pour les tout-petits
La pédopsychiatrie offre aussi une clinique de suivi intensif pour les 0 à 12 ans, toujours à l'hôpital Fleurimont. Cette clinique s’appelle le Centre de jour.
Selon la problématique, lorsque l'enfant a de la difficulté à fonctionner, à l'école par exemple, il peut être suivi à cet endroit quelques demi-journées par semaine avec des professionnels.
Des jeux et des ateliers, lui sont également proposés.
Le département de pédopsychiatrie évalue aussi la clientèle avec un trouble du spectre de l'autisme. Son rôle se limite à l'évaluation, mais dans certains cas, il peut y avoir une prise en charge et l'enfant va fréquenter le centre de jour.