Des réacteurs miniatures pour optimiser la future usine de biométhanisation à Québec

Ces deux petits réacteurs de cinq litres sont arrivés à l'Université Laval au cours de l'été 2019
Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La construction de l'usine de biométhanisation de Québec commence à peine, mais déjà, des questions se posent. Comment optimiser ses futurs coûts d'exploitation? Comment réduire ses frais d'entretien? Pour trouver des réponses, la Ville de Québec compte faire des tests sur des réacteurs miniatures récemment installés à l'Université Laval.
Ces nouveaux jouets sont ceux de la professeure au département de génie chimique, Céline Vaneeckhaute. Achetés au Royaume-Uni pour environ 40 000 $, les deux réacteurs ont été installés cet été dans son laboratoire.
La professeure Vaneeckhaute affirme être la seule au Canada à disposer d'un tel équipement. Ce qui est unique avec ce système-là, par rapport aux autres systèmes en laboratoire, c'est que c'est plus représentatif parce qu'on peut vraiment faire ce qu'on fait en réalité.

La professeure de génie chimique Céline Vaneeckhaute manipule l'un de ses deux petits réacteurs
Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL
C'est pour cette raison que la Ville de Québec aimerait pouvoir l'utiliser en prévision de l'ouverture son usine de l'agglomération de Québec, en 2022. Grâce à ses deux petits réacteurs de cinq litres chacun, ce système simule le processus de biométhanisation de façon plus que réaliste.
À l'avant du système, la professeure Vaneeckhaute peut utiliser une grosse seringue pour injecter de la matière organique dans le système. Il peut s'agir de résidus de table, par exemple, ou encore de boues municipales issues du traitement des eaux usées.

La professeure Céline Vaneeckhaute injecte des matières organiques dans son système de biométhanisation
Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL
Un panneau de contrôle permet ensuite de régler différents paramètres : la fréquence à laquelle la matière est envoyée mécaniquement vers les réacteurs ou encore la température à l'intérieur de ceux-ci.
Ensuite s'amorce le processus de biométhanisation. Les déchets organiques vont fermenter grâce à des bactéries, puis se séparer en deux parties : le biogaz, qui peut servir à la production d'énergie, et le digestat, qui peut être transformé en engrais.

La professeure de génie chimique Céline Vaneeckhaute utilise le panneau de contrôle de son système de biométhanisation
Photo : Radio-Canada / Alexandre DUVAL
Tout au long du processus, la professeure Vaneeckhaute peut mesurer le taux de pH à l'intérieur des réacteurs. Grâce à des sondes, elle peut aussi tester la composition du biogaz ou du digestat au fur et à mesure qu'ils sont produits.
Avec toutes ces données, il devient possible de savoir comment la matière réagit dans des conditions précises et donc de prédire comment cela se passerait dans une vraie usine de biométhanisation, comme celle de Québec.
Ici, on peut tester des choses qui sont quand même complexes à tester à pleine échelle.
Former les futurs opérateurs
Rencontré sur le chantier de la future usine, l'ingénieur de procédés Steve Boivin confirme que cet équipement miniature représente une occasion en or pour la Ville.
On est déjà en train de se demander comment on pourrait réduire nos coûts d'opération, comment on pourrait réduire nos coûts d'entretien, comment on peut améliorer la performance environnementale du centre de biométhanisation
, énumère-t-il.

Le chantier de l'usine de biométhanisation de Québec, sur le boulevard Henri-Bourassa dans l'arrondissement La Cité-Limoilou
Photo : Radio-Canada / Carl Boivin
Si tout va comme prévu, un partenariat avec le laboratoire de la professeure Vaneeckhaute devrait voir le jour l'an prochain. Dès lors, des employés de la future usine pourraient être affectés à temps partiel au laboratoire.
Ça va être pertinent de les impliquer dans le projet de recherche pour les familiariser avec les principes, avec les opérations, avec les procédés.
Voir venir les coups
Avec ce projet, la Ville espère aussi recueillir des données pour bâtir un logiciel capable de simuler des solutions si un problème survient dans la future usine.

Les petits réacteurs du laboratoire de la professeure Vaneeckhaute ont la même fonction que celle des gros cylindres gris représentés sur cette maquette de la future usine de biométhanisation de Québec
Photo : Ville de Québec
Par exemple, l'un des défis réside dans le sulfure d'hydrogène, qui est produit pendant la biométhanisation. Lorsqu'il se retrouve dans le biogaz, le soufre peut entraîner la corrosion des tuyaux dans lesquels il circule.
Il existe des stratégies pour ajouter différents matériaux absorbants dans le réacteur pour absorber le soufre
, indique la professeure Vaneeckhaute. Son laboratoire permettrait donc de tester différentes méthodes pour contrôler la corrosion liée au soufre.
L'usine de biométhanisation doit être pleinement opérationnelle en 2022. C'est à ce moment que les résidus alimentaires des citoyens devront cesser d'être envoyés à l'enfouissement ou à l'incinérateur, et ce, comme partout ailleurs dans la province.
Toutefois, dès 2021, il est prévu que l'usine de Québec commence à traiter les boues municipales issues de la station de traitement des eaux usées qui est située juste de l'autre côté de la rue.
Puisque cette matière est déjà disponible, Steve Boivin espère pouvoir mener rapidement des tests avec celle-ci au laboratoire de la professeure Vaneeckhaute.

Steve Boivin croit que les petits réacteurs pourraient les aider à optimiser la future usine.
Photo : Radio-Canada / Carl Boivin
On a accès à la matière donc c'est la meilleure façon de rendre représentatifs les essais qu'on va faire en laboratoire. On va utiliser la même matière qui va être alimentée au centre de biométhanisation.
L'usine de biométhanisation traitera annuellement 96 000 tonnes de boues municipales et 86 600 tonnes de résidus alimentaires.