La crise sociale perdure au Chili, Piñera évoque la fin de l'état d'urgence

Des manifestants lancent des pierres sur un canon à eau de la police à Santiago.
Photo : The Associated Press / Rodrigo Abd
Le président chilien Sebastian Piñera a entrouvert la porte à une levée des mesures d'exception en tentant de faire baisser la tension au Chili, où ont eu lieu jeudi de nouvelles manifestations.
Nous travaillons à un plan de normalisation de la vie de notre pays [...] afin de cesser le recours au couvre-feu et, nous l'espérons, de lever l'état d'urgence
, a déclaré jeudi le président conservateur.
Les manifestants sont retournés dans les rues jeudi, insatisfaits des concessions économiques annoncées par le gouvernement. Ils ont lancé des pierres alors que la police ripostait avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau, à Santiago et dans le port de Valparaiso.
Environ 6000 autobus ont été déployés pour compenser la paralysie du réseau de métro, dont seulement trois lignes fonctionnaient.
Les organisations syndicales et une vingtaine d'autres mouvements ont appelé les fonctionnaires à cesser le travail et à se joindre aux manifestations à Santiago, à quelques stations de métro du palais présidentiel de La Moneda.
« Jusqu'à présent, ce qu'a fait le président Piñera a été de polariser le pays et d'accroître les tensions. Nous avons aujourd'hui dans la rue des jeunes avec un fusil dans les mains, contre leurs propres compatriotes. »
L'explosion de colère sociale, avec de violentes manifestations et des pillages, a été provoquée par l'annonce d'une hausse de 3,75 % du prix du billet de métro à Santiago, mais ne s'est en rien calmée après l'annonce de la suspension de cette mesure.
« Les mêmes propositions depuis des mois »
Le mouvement, hétérogène et sans dirigeants identifiables, s'est amplifié, nourri par le ressentiment face à la situation socioéconomique et aux inégalités dans ce pays de 18 millions d'habitants.
L'annonce d'une série de mesures sociales mardi par M. Piñera, qui a reconnu n'avoir pas anticipé la crise et demandé « pardon » à ses compatriotes, ne semble pas avoir eu l'effet escompté.
Nous espérions une sensibilisation avec ce conflit social, mais ce sont les mêmes propositions depuis des mois
, a observé Izkia Siches, présidente du Colegio Médico, l'association des médecins chiliens, présente parmi les manifestants.
L'ONU envoie une mission d'enquête
Dix-huit personnes, dont un enfant, sont mortes depuis le début des troubles le 18 octobre, selon des chiffres officiels. En outre, l'Institut national des droits humains (INDH) a compté 535 personnes blessées, dont 239 par armes à feu, et 2410 arrestations.
La haute-commissaire aux droits de l'homme de l'ONU a annoncé jeudi l'envoi d'une mission d'enquête au Chili pour vérifier les allégations de violations des droits de l'homme.
Michelle Bachelet, qui a été à deux reprises présidente du Chili, a ajouté dans un tweet que les parlementaires et le gouvernement [chiliens] ont tous exprimé le désir d'une mission des droits de l'homme de l'ONU
.
Les protestataires réclament notamment le retrait des militaires alors que 20 000 policiers et membres des forces armées sont déployés dans les rues, et que 9 des 16 régions du pays sont sous état d'urgence.
Malgré l'intensité de la crise, le gouvernement a confirmé jeudi la tenue du sommet de Coopération économique Asie-Pacifique (APEC), du 13 au 17 novembre, à Santiago, où sont notamment attendus les présidents des États-Unis, de la Russie et de la Chine, soit Donald Trump, Vladimir Poutine et Xi Jinping.