Décès de l’architecte Roger Taillibert

L'architecte français Roger Taillibert assistait au lancement d'une exposition sur les Jeux olympiques de 1976 à Montréal, le lundi 6 juin 2016.
Photo : La Presse canadienne / Graham Hughes
L’architecte du stade olympique de Montréal, le Français Roger Taillibert, est décédé à Paris. Il avait 93 ans.
Roger Taillibert a étudié l'art égyptien à l'École du Louvre et à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris avant de devenir un spécialiste de constructions destinées au sport.
Il disait avoir privilégié les courbes dans ses bâtiments afin de susciter des émotions.
« Si le monument apporte de l'émotion, il y a immédiatement une présence permanente du monument parmi les hommes. »
Outre le stade conçu pour les Jeux olympiques de 1976, devenu un édifice emblématique de Montréal, il a aussi réalisé le parc des Princes de Paris et la piscine de Deauville. Il a également signé un bâtiment pour un groupe pharmaceutique à Toulouse, de même que des tours au Qatar.
Il s'était d'ailleurs proposé il y a quelques années pour dessiner le nouveau pont Champlain, dont il voulait faire un monument plutôt qu'un bricolage de pont
, avait-il expliqué dans une entrevue accordée l'hiver dernier à Radio-Canada.
Roger Taillibert, qui a réalisé près de 500 projets au cours de ses 70 ans de carrière, a toujours défendu bec et ongles la conception du stade olympique, fortement critiquée au fil du temps.
C’est un stade exceptionnel au point de vue de la construction. C’est reconnu dans le monde entier
, soulignait-il encore en février dernier.
« M. Taillibert est pour Montréal, pour le Québec, une signature architecturale. […] Le stade olympique, c’est une des plus belles lignes, des plus belles courbes. Il était amoureux des courbes. »
Le stade a été conçu par Roger Taillibert pour accueillir les Jeux olympiques, mais aussi les Expos de Montréal. Il avait imaginé un stade doté d'une immense tour de béton avec un toit rétractable. C'est aussi lui qui a conçu le vélodrome et la piscine olympique qui y sont adjacents.
Il a été choisi par le maire Jean Drapeau, sans appel d'offres, pour concevoir les installations en vue des Jeux de 1976. C'était la première fois de l'histoire des Jeux modernes qu'un pays hôte avait recours aux services d'un architecte étranger.
« Nous avons été assez réalistes, au cours des 10 dernières années que nous avons été à l'administration municipale, pour ne pas lancer la Ville dans une aventure, avait expliqué M. Drapeau à l'époque. Et la construction du grand stade, ce ne sera pas non plus une aventure. Nous avons résolu pas mal de problèmes ensemble, bien celui-là va être résolu aussi d'une façon logique, économique et réaliste. »
Le bâtiment, de forme ellipsoïdale, est une grande masse de béton, avec un toit rétractable attaché par des câbles suspendus à une structure, qui, du haut de ses 165 mètres, est devenue la plus haute tour inclinée du monde.
Roger Taillibert a toujours souligné qu'il n'aurait pas beaucoup modifié son projet s'il avait eu à le refaire.
« M. Taillibert est un architecte de génie. Il faut que le Québec commence, très tard, trop tard, à le reconnaître. C’est un architecte qui a fait des choses magnifiques et d’avant-garde un peu partout dans le monde. »
Son contrat terminé, il avait gardé un lien avec le Québec : une maison à Saint-Sauveur, dans les Laurentides, où il se consacrait à la peinture ces dernières années. Un art qui, selon lui, s'apparente tout à fait à l'architecture.
C’était un homme très passionné encore par la ville de Montréal. Jusqu’à tout récemment, on pouvait se parler deux à trois fois par jour pour parler de Montréal, de sa vision de Montréal, de l’est de la ville
, a par ailleurs souligné l'architecte Maxime-Alexis Frappier, un des commissaires de l'Exposition Roger Taillibert, Volumes et lumières, qui s'est tenue à Repentigny tout l'été.
« Pour M. Taillibert, il était important d’achever ce rêve, cette vision que M. Drapeau et lui avaient eue pour l’est de Montréal. »
Un héritage toujours vivant
Plus de quatre décennies après sa construction et malgré les problèmes techniques du toit en voie de se régler, Michel Labrecque, PDG du Parc olympique, assure que le stade est toujours un actif majeur pour Montréal.
« C’est monumental, c’est complexe, c’est un bâtiment qui est en bon état qui vit toujours 43 ans plus tard. »
Le centre sportif est plein tous les jours, il y a des bébés, des gens du voisinage qui viennent s’entraîner, des athlètes olympiques, il y a des gens qui y vivent dans la tour, donc il a toujours sa valeur d’usage.
À écouter et à lire :
- Le journaliste Richard Garneau s'entretient avec Roger Taillibert au moment de la construction du stade, le 26 novembre 1974
- Cinq minutes avec Roger Taillibert
- Les chefs-d’œuvre et les regrets de Roger Taillibert, artisan sportif
- Le toit du stade olympique est « un tas de ferraille », dénonce son architecte
- Roger Taillibert défend la conception du Stade olympique