Les vieux arbres géants du Canada de plus en plus exportés en Asie
La forêt ancienne a presque complètement disparu sur l'île de Vancouver; le Canada est le dernier pays du G7 pour la protection des aires terrestres.

Cet arbre de plusieurs centaines d'années a été abattu par une compagnie forestière, l'an dernier, sur l'île de Vancouver.
Photo : TJ Watt
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Des siècles pour pousser. Quelques heures pour être coupés. Le Canada exporte des quantités records d'arbres vers les marchés asiatiques ces dernières années.
La souche mesure au moins deux mètres de diamètre. On pourrait s'y coucher sans dépasser. Autour de nous, une immense coupe à blanc, comme un carreau dans une forêt transformée en damier.
Nous sommes à Port Renfrew, municipalité autoproclamée « capitale canadienne des grands arbres ». Sur l'île de Vancouver, certaines souches mesurent jusqu'à six mètres de diamètre, ce qui témoigne de l'âge qu'avaient ces arbres avant d'être abattus.
Dans la forêt pluviale tempérée de l'Ouest, qui capte particulièrement bien le carbone, certains arbres ont plus de 1000 ans.
« Ce sont des écosystèmes importants pour les espèces en danger, pour le climat, pour le tourisme, pour la culture autochtone, explique TJ Watt, de l'Ancient Forest Alliance. La protection de ces arbres est vraiment déficiente. »
« Cette forêt est coupée à un rythme de 10 000 terrains de football par an. »
Comment l'intensité des coupes peut-elle se maintenir, alors que l'industrie forestière a connu un important déclin ces dernières années, avec une vingtaine de fermetures de scieries en Colombie-Britannique? La réponse se trouve du côté de l'Asie.
La quasi-totalité des troncs exportés depuis le Canada vient de Colombie-Britannique.
Les usines canadiennes ont priorité sur l'exportation, mais comme elles sont moins nombreuses et que la demande est forte ailleurs, les billes de bois d'ici partent à l'étranger sur de gigantesques navires.
En plus, les acheteurs japonais ou chinois sont prêts à payer plus cher nos arbres. Ironiquement, certains produits créés avec ce bois, comme des meubles, finissent par revenir chez nous et être achetés par les Canadiens.
Au milieu d'une coupe à blanc vieille de sept ou huit ans, un gigantesque douglas apparaît. Il mesure 66 mètres de haut et 4 mètres de diamètre à sa base.
L'arbre a été laissé là par la compagnie forestière à la demande d'un ingénieur forestier qui s'était ému qu'on coupe ce géant de plusieurs siècles.
Couper ces arbres est légal, puisque le territoire n'est pas protégé.
Les compagnies forestières rappellent que leurs activités génèrent des milliards de dollars et emploient des dizaines de milliers de Canadiens.
La Colombie-Britannique se vante d'offrir une protection à 55 % de la forêt ancienne, mais c'est un chiffre à prendre avec des pincettes, selon Andrea Inness, d'Ancient Forest Alliance. « Les 55 % sont un pourcentage de la forêt encore debout, mais le chiffre n'inclut pas tout ce qui existait à l'origine. Selon cette logique, plus on coupe en dehors des zones protégées et plus le pourcentage de protection augmente. »
Même si la foresterie est de compétence provinciale, l'exportation de ressources naturelles est de responsabilité fédérale. Ottawa peut intervenir dans la conservation des milieux naturels.
« Le gouvernement fédéral devrait demander à chaque province d'adopter les cibles de conservation des aires terrestres protégées sous l'égide de la Convention de l'ONU sur la biodiversité : 17 % d'ici 2020. »
En ce moment, le Canada protège 10,7 % du territoire terrestre, ce qui en fait le plus mauvais élève de tous les pays du G7.
De son côté, la Chine protège de plus en plus ses forêts. Selon les données de l'ONU, les Chinois conservent 15,6 % de leur territoire terrestre, soit plus que le Canada.