La Vérif : trois promesses libérales au « degré d'incertitude élevé »

La Vérif, avec Vincent Maisonneuve.
Photo : La Presse canadienne / Ryan Remiorz
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Après avoir présenté une série de promesses électorales, Justin Trudeau a dévoilé son cadre financier et les recettes envisagées pour les financer. Ces sources de revenus sont-elles assurées? L'analyse du Directeur parlementaire du budget apporte certaines nuances.
Les mesures de la plateforme libérale ont, pour la plupart, été soumises à l'évaluation du bureau du Directeur parlementaire du budget (DPB), qui n’examine pas l’ensemble de la plateforme, mais uniquement des promesses qui lui ont été présentées.
Trois niveaux d’incertitude sont présentés : faible, modéré et élevé.
Une réponse claire est indiquée dans l’analyse finale de cette institution indépendante, chargée d’évaluer le budget mais aussi les promesses électorales :
L’évaluation comporte un degré d’incertitude élevé
, est-il mentionné dans trois des principales propositions apparaissant dans les « nouvelles recettes » présentées par le Parti libéral du Canada (PLC) :
- Une lutte contre les échappatoires fiscales
- Une forme de taxation des géants du web
- Une taxe sur les biens de luxe
Ces promesses sont censées rapporter près de 3 milliards de dollars dès 2020-2021 et, ainsi, financer en partie les propositions évoquées tout au long de cette campagne électorale par Justin Trudeau.
« En allant chercher plus d’argent chez les mieux nantis, en fermant des échappatoires fiscales, on va pouvoir aller chercher des revenus significatifs. »
Les échappatoires fiscales dans la ligne de mire de Trudeau
Parmi les plus de 5 milliards de dollars que compte récupérer un éventuel nouveau gouvernement Trudeau pour financer son programme, le PLC compte en grande partie sur une lutte « contre les échappatoires fiscales des entreprises ».
Le parti veut notamment sévir contre « les montages financiers complexes visant à trouver des territoires où les taux d'imposition sont plus bas ».
Le DPB, qui évalue les changements réglementaires entrant en vigueur le 1er janvier 2020, reste cependant très prudent et souligne que « l’évolution du comportement des sociétés en matière d’évitement est [...] très difficile à prédire et à quantifier ».
« Les sociétés qui s’adonnent à une planification fiscale "agressive" pourraient tenter d’employer de nouveaux stratagèmes d’évitement ou réorganiser leurs activités pour tirer parti d’autres procédés connus qui demeurent accessibles. »
Une taxe contre les géants du numérique
À l’image de la France d’Emmanuel Macron, le Canada de Justin Trudeau imposerait dès l’an prochain les géants du numérique, que l’on regroupe communément sous l’acronyme GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon), et qui inclurait ici Netflix.
Contrairement à ce que souhaite le premier ministre du Québec, François Legault, Justin Trudeau n’attendrait pas un consensus des principaux pays mondiaux et les recommandations de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pour aller de l’avant.
Un impôt de 3 % « sur les recettes générées par la vente de publicité en ligne et les données des utilisateurs par les sociétés dont les recettes globales sont d'au moins un milliard de dollars par année, et les recettes canadiennes d'au moins 40 millions de dollars » serait instauré dès avril prochain.
Les libéraux évoquent des revenus de 540 millions de dollars pour l’exercice financier 2020-2021.
L’incertitude provient principalement de la difficulté d’estimer précisément l’assiette fiscale
, souligne le DPB.
On s’attend aussi à ce que les entreprises des secteurs ciblés adaptent leurs services et leurs prix en fonction de la nouvelle loi. Ces changements de comportement sont difficilement estimables et reposent sur une hypothèse forte ajoutant de l’incertitude à l’estimation
, peut-on également lire.
« Une modification du comportement des acheteurs » attendue
Le « degré d’incertitude élevé » concerne également la taxe de vente de 10 % envisagée sur les articles de luxe, soit les automobiles, les bateaux et avions privés d’une valeur égale ou supérieure à 100 000 $.
À noter que les automobiles, bateaux et avions commerciaux seront exonérés de cette taxe.
Une somme recueillie de 585 millions de dollars est mentionnée pour 2020-2021, avant de grimper à 621 millions en 2023-2024.
Cependant, « on ignore quel est le volume de vente réel », prévient le DPB, qui « s’attend à une modification du comportement des acheteurs » vers des « produits moins chers ».
Par ailleurs, les vendeurs « pourraient offrir un éventail de prix plus large pour éviter cette taxe ».
Avec la collaboration de Nathalie Lemieux et Vincent Maisonneuve