Trudeau rattrapé par l'affaire SNC-Lavalin en début de campagne

Andrew Scheer a commenté les révélations du « Globe and Mail » avant même de lancer officiellement sa campagne.
Photo : La Presse canadienne / Paul Chiasson
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Le chef libéral Justin Trudeau a été rattrapé par l’affaire SNC-Lavalin avant même le lancement de la campagne électorale, après que de nouvelles révélations du quotidien Globe and Mail ont fourni des munitions à ses opposants.
S’appuyant sur des sources non identifiées, le quotidien torontois a indiqué mercredi que la Gendarmerie royale du Canada (GRC) se penche sur de possibles entraves à la justice dans cette affaire, qui a fortement ébranlé le gouvernement Trudeau cet hiver.
L’enquête serait toutefois bloquée par le fait que des témoins ne peuvent parler à la police fédérale, étant donné qu’ils doivent respecter la confidentialité des discussions au sein du Conseil des ministres.
Selon le Globe, cela empêche toute personne couverte par ce sceau du secret de parler ou de transmettre des documents concernant cette affaire à la police fédérale. La GRC a par ailleurs décidé de suspendre ses opérations le temps de la campagne électorale.
Avant même que la campagne n'ait été officiellement lancée, le chef conservateur Andrew Scheer est tombé à bras raccourcis sur son adversaire libéral, à qui il a demandé de lever le privilège de confidentialité entourant les échanges au sein du Cabinet.
Nous avons appris deux choses ce matin
, a-t-il déclaré avant de prendre l’avion pour venir lancer sa campagne au Québec. Un, la GRC fait enquête sur une possible entrave à la justice. Et deux, Justin Trudeau va tout faire pour la bloquer. Alors, je lui demande de lever le privilège dès maintenant.
M. Scheer, qui avait déjà demandé à la GRC d’enquêter sur cette affaire, a saisi l’occasion pour placer la question de l’intégrité du chef libéral au cœur de ses attaques de la journée. Selon lui, le premier ministre a déjà menti aux Canadiens à plusieurs occasions dans ce dossier.
Ce n’est pas une question d’impact sur les sondages. C’est une question d’intégrité. Est-ce que Justin Trudeau a l’autorité morale de continuer à gouverner?
a demandé le chef conservateur.
« Pendant les cinq prochaines semaines et quelques jours, je vais démontrer aux Canadiens les raisons pour lesquelles Justin Trudeau a perdu l’autorité morale de continuer de gouverner. [...] Les Canadiens veulent un gouvernement qui respecte les lois d’éthique. »
Pressé de questions dès sa sortie de la résidence de la gouverneure générale, Justin Trudeau s’est défendu d’avoir empêché la levée du privilège de la confidentialité, un principe de base de la gestion gouvernementale.
Nous respectons toujours les décisions faites par notre fonction publique, nous respectons la décision du greffier
du Conseil privé, a-t-il déclaré, se dédouanant du coup de toute responsabilité.
Andrew Scheer avait déjà dit ne pas croire cette version. Le pouvoir de lever le privilège [appartient au] premier ministre; ça, c’est clair. Alors la seule raison pour laquelle Justin Trudeau va continuer de refuser lever le privilège, c’est parce qu’il y a quelque chose à cacher de plus grave [que ce] qu’on sait aujourd’hui
, a-t-il dit.
Trudeau a violé la loi sur les conflits d'intérêts, rappelle Singh
Le chef néo-démocrate a aussi demandé à Justin Trudeau de lever le secret du Cabinet et permettre à la GRC de faire son travail
dans un tweet publié en début de journée.
Lors du discours de lancement de sa campagne, il en a rajouté, déplorant que le chef libéral trouve des excuses et érige toutes sortes d'obstacles pour empêcher les Canadiens de connaître la vérité dans cette affaire.
Ce scandale porte sur le fait que M. Trudeau a choisi de violer la loi sur les conflits d'intérêts afin d'aider de puissants intérêts aux plus hauts sommets
, a encore dit le chef néo-démocrate.
« Quand SNC-Lavalin a appelé en disant : "Nous faisons face à des accusations criminelles, pouvez-vous nous aider?", M. Trudeau et le gouvernement ont sauté dans la mêlée [...], mais quand les Canadiens disent qu'ils ne peuvent pas s'offrir des médicaments, il leur dit d'attendre. »
De passage à Trois-Rivières, mercredi, M. Scheer a repris cette attaque, après avoir souligné que M. Trudeau est devenu le premier chef de gouvernement canadien à avoir violé la loi sur les conflits d’intérêts à deux reprises. Il avait déjà été épinglé pour un séjour sur l'île de l'Aga Khan avant d’être à nouveau pris en défaut dans le dossier de SNC-Lavalin.
Il est maintenant plus clair que jamais que Justin Trudeau croit qu’il y a un ensemble de lois pour lui et ses puissants amis et un ensemble de lois pour tous les autres Canadiens qui travaillent fort comme vous
, a-t-il notamment lancé.
Je vais toujours défendre les emplois
, réitère Trudeau
Après avoir enquêté, le commissaire à l'éthique Mario Dion a conclu, dans un rapport publié le mois dernier, que M. Trudeau a contrevenu à la Loi sur l'éthique dans l'affaire SNC-Lavalin en exerçant des pressions indues sur l'ex-ministre de la Justice Jody Wilson-Raybould.
M. Trudeau s'est prévalu de sa position d'autorité sur Mme Wilson-Raybould pour tenter d'influencer sa décision concernant l'infirmation de la décision de la directrice des poursuites pénales, laquelle avait conclu qu'elle n'inviterait pas SNC-Lavalin à entamer des négociations en vue de conclure un accord de réparation
, a-t-il écrit.
Mario Dion a aussi reproché au gouvernement de lui avoir mis des bâtons dans les roues au cours de son enquête. Il a indiqué que neuf témoins l'ont approché pour lui faire part d'informations pertinentes concernant ce dossier, mais n'ont pas pu le faire, n'y étant pas légalement autorisés.
Comme il l'avait fait après la publication de ce rapport, M. Trudeau a défendu mercredi sa décision d’intervenir auprès de l’ex-ministre Wilson-Raybould.
Je vais toujours défendre les emplois des gens. J'ai été sans équivoque à ce sujet depuis le début, et c'est ce que je vais continuer de faire
, a-t-il dit en réponse à une journaliste qui lui demandait quelles erreurs il avait commises dans ce dossier.
L'affaire SNC-Lavalin a entraîné la démission des ministres Jody Wilson-Raybould et Jane Philpott, qui briguent toutes deux les suffrages comme candidates indépendantes. Le principal conseiller de M. Trudeau, Gerald Butts, a aussi remis sa démission.