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Après des promesses ambitieuses, un bilan en demi-teinte pour le gouvernement Trudeau

Justin Trudeau en conférence de presse, devant des drapeaux du Canada.

Le premier ministre Justin Trudeau

Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick

Danielle Beaudoin
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement libéral a réalisé en tout ou en partie 92 % de ses promesses électorales, selon un groupe de chercheurs. Il n’a pas pour autant répondu aux multiples attentes créées par son ambitieux programme de changement. Et ce score élevé risque de n'avoir que peu d’influence sur le scrutin d'octobre.

Des chercheurs de l’Université Laval ont fait le suivi des 353 promesses électorales faites en 2015 par le Parti libéral du Canada. Selon leur outil, le Polimètre Trudeau/PLC, 54 % des promesses libérales ont été entièrement tenues, 38 % l’ont été en partie, et 8 % ont été rompues ou sont en suspens.

Parmi les promesses tenues, on retiendra notamment la légalisation du cannabis à usage récréatif et l’accueil de milliers de réfugiés syriens. Et parmi les promesses rompues : celles sur l’équilibre budgétaire et les faibles déficits, ainsi que la réforme du mode de scrutin.

Le classement des promesses

  • Réalisée : le gouvernement a fait tout ce qu’il fallait pour réaliser son projet (loi, règlement, politique, allocation budgétaire, etc.). 
  • Réalisée en partie ou en voie de réalisation : le gouvernement a entrepris une action pour réaliser la promesse, même si cela est fait en dehors du délai fixé. 
  • Rompue : le gouvernement a officiellement renoncé à tenir sa promesse ou il agit dans le sens contraire au projet.
  • En suspens : le gouvernement n’a entrepris aucune action pour réaliser la promesse.

Source : Polimètre Trudeau/PLC (Nouvelle fenêtre)

Par rapport à tous les gouvernements précédents, on a un taux de réalisation des promesses en tout ou en partie extraordinaire, constate Lisa Maureen Birch, directrice du Centre d’analyse des politiques publiques de l’Université Laval, cofondatrice du Polimètre et codirectrice du document Bilan du gouvernement libéral de Justin Trudeau, publié le 14 août.

Le score du gouvernement Trudeau est suivi de près par celui du troisième gouvernement Harper, qui a réalisé en tout ou en partie 85 % de ses promesses électorales, selon les analyses du Polimètre. 

Comment expliquer les résultats de ces deux gouvernements? Les chercheurs estiment que leur statut majoritaire a peut-être pesé dans la balance. Les gouvernements majoritaires réalisent une proportion plus élevée de promesses que ceux qui sont minoritaires, surtout parce qu’ils sont au pouvoir plus longtemps. Les bons scores de Justin Trudeau et du troisième mandat de Stephen Harper sont peut-être aussi liés à la croissance économique des dernières années. « La probabilité de réalisation des promesses augmente quand le produit intérieur brut est en croissance », peut-on lire dans le rapport des chercheurs.

Les chercheurs font aussi remarquer que ces deux gouvernements, dès leur arrivée au pouvoir, ont fait du respect de leur parole une haute priorité et une question de confiance et de leadership. Tant Justin Trudeau que Stephen Harper et leurs ministres « ont été soucieux » de remplir leurs promesses tout au long de leur mandat.

Le gouvernement de Justin Trudeau a fait 353 promesses électorales. La moyenne des autres gouvernements depuis 1993, en excluant celui de Justin Trudeau, est de 118 promesses.

Un programme ambitieux

Lisa Maureen Birch souligne qu’en moyenne, les gouvernements canadiens ont réalisé 58 % de leurs promesses complètement et 13 % en partie. Le score du gouvernement Trudeau est respectivement de 54 % et 38 %. 

Comment expliquer cette différence marquée entre l'administration Trudeau et les autres gouvernements quant au pourcentage de promesses réalisées en partie? La chercheuse avance que le Parti libéral ne s’attendait peut-être pas à être élu en 2015 et a proposé tout un programme de changement de la politique canadienne. Peut-être que c'est là une difficulté; quand on promet des grandes transformations, parfois, ça prend beaucoup plus de temps que seulement quatre ans, observe Lisa Maureen Birch.

La chercheuse donne comme exemple la promesse de Justin Trudeau de transformer les relations avec les peuples autochtones. On s'entend qu'avec une histoire de 150 ans de colonialisme et de génocide culturel, ça va prendre plus que quatre ans, dit-elle.

« Justin Trudeau a créé lui-même beaucoup d'attentes, parce qu'il avait un programme ambitieux. Et comme pour tout gouvernement, on se rend compte qu'il y a des enjeux qui sont très complexes. Il y a une diversité d'opinions et d'acteurs, et parfois ça rend la réalisation en entier des promesses un peu plus difficile. »

— Une citation de  Lisa Maureen Birch, directrice du Centre d’analyse des politiques publiques de l’Université Laval

La chercheuse fait remarquer que le gouvernement Trudeau a plus facilement tenu ses promesses lorsque leur réalisation ne dépendait que de lui. Mais dans tous les autres domaines où il faut une entente avec un partenaire au niveau des provinces, des Premières Nations ou un gouvernement étranger, cela a été beaucoup plus difficile.

Le bilan de Justin Trudeau

Parmi les promesses tenues par le gouvernement Trudeau, Lisa Birch retient notamment les suivantes :

Et parmi les promesses rompues :

Promesses tenues, réélection en vue?

Même si le gouvernement Trudeau a tenu une grande partie de ses promesses électorales, cela ne garantit en rien sa réélection en octobre prochain, selon les chercheurs du Polimètre. Lisa Maureen Birch explique d’abord que les citoyens ne suivent pas à la trace ce que le gouvernement promet et ce qu’il accomplit. Et souvent, ils font des raccourcis, ajoute-t-elle.

« Il y a un préjugé négatif très fort au Canada comme ailleurs selon lequel les politiciens sont menteurs, qu'ils ne tiennent pas leurs promesses, "plus ça change plus c'est pareil". Toute cette gamme de stéréotypes. »

— Une citation de  Lisa Maureen Birch, directrice du Centre d’analyse des politiques publiques de l’Université Laval

La chercheuse rappelle aussi que le gouvernement Trudeau a été élu avec 39,5 % du vote populaire. Donc, 60,5 % des Canadiens préféraient déjà un autre parti politique. Forcément, plus il tient ses promesses, plus il plaît à ceux qui ont voté pour lui. Par contre, il risque de décevoir les autres électeurs pour toutes sortes de raisons. Pour les partisans du Parti conservateur, il n’est pas assez à droite, pour ceux des néo-démocrates, il n’est pas assez à gauche, et pour les sympathisants du Parti vert, il n’est pas assez vert, précisent les chercheurs dans leur rapport.

Une autre explication, c'est que pour l’électeur ou l’électrice, c'est leur vie quotidienne qui compte, ajoute Lisa Maureen Birch.

« Nos recherches ont démontré que l'impact de la croissance économique a plus à voir avec la perception d'un gouvernement que la tenue des promesses ou non. »

— Une citation de  Lisa Maureen Birch, directrice du Centre d’analyse des politiques publiques de l’Université Laval

Les derniers sondages de mars sur les intentions de vote démontrent que dans les régions où la situation économique est plus difficile, la cote du gouvernement Trudeau est moins bonne, note Lisa Maureen Birch. 

La chercheuse mentionne aussi le fait que même si l’économie va bien, beaucoup de gens s’inquiètent pour leur avenir. Le coût de la vie augmente pour les denrées de base, et dans les grandes villes comme Toronto ou Vancouver, le coût d'une maison est exorbitant; et [ceux de] la nouvelle génération se demandent comment ils vont pouvoir s'acheter une maison un jour. Lisa Maureen Birch prédit que les conditions de vie de la classe moyenne seront d’ailleurs un des enjeux de la campagne électorale.

Cliquez ici  (Nouvelle fenêtre)pour consulter le Polimètre Trudeau/PLC

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