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Carnaval des communautés antillaises : entre unité et différences

Portrait d'un homme qui porte une coiffe de jaune avec une couronne et qui fait une grimace.

Le défilé du carnaval caribéen de Toronto Caribana animera la fin de semaine à Toronto.

Photo : La Presse canadienne / Victor Biro

Radio-Canada

Les festivités carnavalesques des Antilles seront au cœur des événements incontournables prévus durant cette longue fin de semaine à Toronto, avec notamment le Carnaval caribéen de Toronto Caribana et le Festival Kompa Zouk Ontario.

Une chronique de Francesca Mérentié

On compte une vingtaine de communautés antillaises, francophones et anglophones, dans la région du Grand Toronto. Et bien qu’ayant de multiples points communs, en raison de leur histoire insulaire qui remonte bien avant l'époque coloniale, ces communautés ne sont guère homogènes.

Des danseurs et danseuses lors d'un défilé du carnaval.

Le défilé du carnaval caribéen de Toronto Caribana attire les foules à Toronto.

Photo : La Presse canadienne / COLE BURSTON

Si l’on sépare les communautés antillaises francophones et celles des Antilles anglophones, on peut constater cette différence non seulement dans l’appartenance à la langue, mais aussi dans leurs manières de célébrer le carnaval, a expliqué la présidente du Festival Kompa Zouk Ontario.

Les francophones des Antilles ont souvent été confondus ou assimilés à leurs homologues anglophones, a indiqué Marie-Jennyne Mayard. Traditionnellement, il existe toutefois des différences culturelles entre ces deux groupes, ne serait-ce que par la musique, la gastronomie ou encore au niveau des costumes de carnaval.

Portrait d'une femme noire aux yeux bleus.

D'origine haïtienne, Marie-Jennyne Mayard est la présidente du Festival Kompa Zouk Ontario, qui met de l'avant la culture afro-caribéenne.

Photo : Fournie par Marie-Jennyne Mayard

En ce qui concerne la musique, les Antillais anglophones, comme les Jamaïcains, feront la promotion du reggae, un style de musique alliant les traditions africaines et le RnB. Les Trinidadiens, de leur côté, feront celle du calypso et de la musique soca, une musique populaire au rythme très africain alliant le funk et le soul.

Du côté des francophones, les Haïtiens mettront de l'avant le kompa tandis que les Guadeloupéens feront valoir le zouk. Le kompa et le zouk sont deux styles musicaux différents bien qu’ils soient tous les deux inspirés du merengue dominicain.

Des carnavals aux traditions multiples

Les carnavals des Antilles francophones et anglophones se différencient dans leurs intentions.

En Martinique, en Guadeloupe, des femmes au défilé vont porter de longues jupes, ou des coiffes en tissu traditionnel, par exemple. C’est très rare de trouver des femmes uniquement en maillot de bain. C’est très différent, a expliqué Marie-Jennyne Mayard.

Dans les Caraïbes, plus particulièrement dans les îles antillaises comme Haïti dont l’héritage est francophone et africain, le carnaval révèle l’histoire des populations, des premiers habitants de l’île aux transformations sociales. Il est par exemple récurrent qu’on aperçoive au défilé des participants en tenues traditionnelles, personnifiant les premiers habitants d’Hispaniola, les Autochtones appelés Taïnos.

Un danseur

L'histoire des peuples antillais qui remonte à celle de l'Afrique inspire les costumes des danseurs.

Photo : La Presse canadienne / Victor Biro

Parmi ces danseurs, certains personnifient les esclaves, tandis que d'autres peuvent représenter les héros de la bataille de l’indépendance.

Chez les Antillais francophones, tels que les Haïtiens, le carnaval devient ainsi un terrain pour exorciser le passé et un lieu de revendications économiques et politiques, où les conflits de genre, de classe sont portés à travers la musique, les costumes ainsi que les bandes à pied en Haïti ou bande à peau en Guadeloupe. Les bandes à pied sont des troupes de musiciens qui déambulent dans les rues et qui, à travers les chants, les slogans, tirés du répertoire traditionnel et de l’actualité sociopolitique, animent la vie sociale des municipalités.

des gens défilent dans la rue la nuit et jouent de la musique.

Les bandes à pied sont des troupes de musiciens qui déambulent dans les rues en animant la vie sociale des municipalités.

Photo : Knight Foundation

Les costumes au défilé carnavalesque des Antilles francophones sont également porteurs de sens historique ou sociétal, comme l’explique Sabine Monpierre, présidente de Femmes & Traditions.

Contrairement aux célébrations du carnaval des Antilles francophones, aux Antilles anglophones, les festivités sont davantage une exhibition du corps. C'est un lâcher-prise total, la liberté corporelle. Le carnaval n'est plus une opportunité de tourner au ridicule des faits sociaux récents ou des politiciens véreux, explique-t-elle.

Portrait d'une femme

Originaire de la Guadeloupe, Sabine Monpierre est la présidente de l'organisme montréalais Femmes & Traditions, qui promeut entre autres la culture et les traditions antillaises.

Photo : Radio-Canada

Le défilé ne se résume pas non plus à l’histoire des peuples antillais et aux revendications sociales. Il constitue surtout un moment de réjouissance pour s'évader des tracas du quotidien. Une tendance que certains considèrent en effet moins ancrée dans la culture antillaise francophone.

Au Carnaval caribéen de Toronto Caribana, qui s'inspire de celui de Trinité-et-Tobago, où l'anglais est la langue officielle, les costumes qui ne sont pas sans rappeler ceux du Carnaval de Rio qui se caractérisent par les paillettes, les plumes, les bikinis, ou encore ses différents chars allégoriques.

Des danseuses du défilé caribana de Toronto se prennent en photo.

Les danseuses au défilé du carnaval caribéen de Toronto Caribana sont reconnues pour leurs tenues légères.

Photo : La Presse canadienne / Christopher Katsarov

Selon Frantz Voltaire, le directeur du Centre international de documentation et d'information haïtienne caribéenne et afro-canadienne, ces différences s’expliquent par rapport aux tensions de l’époque, aux conditions dans lesquelles le carnaval s’est développé.

Le côté vindicatif est une tendance qui ne répond pas au contexte social canadien dans un festival comme le carnaval caribéen de Toronto Caribana. Nous sommes ici dans un contexte migratoire qui fait en sorte que le carnaval est d’abord et avant tout un lieu pour se retrouver, un espace ludique où des gens malgré leurs différences peuvent se rencontrer parce que le carnaval abolit les hiérarchies sociales, explique Frantz Voltaire.

Toutefois, il explique qu’à travers le temps, les Antilles anglophones, comme Trinité-et-Tobago, se sont aussi servies des festivités carnavalesques pour exorciser le passé colonial et les tensions sociales. Il signale que l'exhibitionnisme corporel peut être aussi une forme de revendication. D’ailleurs, cette année, plusieurs danseuses défileront seins nus dans l’objectif de célébrer le corps des femmes.

Malgré les défis d’intégration et le parcours migratoire qui peuvent parfois différer entre les groupes antillais, une chose reste commune à tous : se retrouver pour fêter au rythme des Caraïbes, loin des défis quotidiens.

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