Un film anti-avortement mal accueilli au Canada

Le film américain « Unplanned » raconte la conversion au militantisme anti-avortement d'une directrice de clinique de planification des naissances.
Photo : Pureflix
La projection d’un film anti-avortement intitulé Unplanned est prévue dans plus de 24 salles de cinéma à travers le pays. La sortie du long métrage au Canada se tiendra ce vendredi, malgré les contestations de plusieurs personnes.
La nouvelle a fait des remous un peu partout au Canada, tant de la part des organismes de protection des droits de la femme que de la part des personnes qui sont contre la diffusion d’un tel long métrage, que plusieurs qualifient d’atteinte au droit à l’avortement.
Le responsable de la diffusion en sol canadien du film Unplanned est le pasteur BK McKelvie qui, en plus de son rôle d’homme d’Église, est aussi président du distributeur canadien de films Cinedicom, basé à Fredericton.
« Ce film est dans mes valeurs et mes croyances. »
Après avoir entendu parler de la diffusion du film aux États-Unis, il a été très intrigué d’en apprendre davantage. Le pasteur explique avoir été très déçu d’apprendre qu’il était possible que le film ne soit pas diffusé au Canada.
Je marchais dans le couloir, après avoir appris que le film serait peut-être banni et, en tant que pasteur, je n’étais pas content. Et c’est Dieu qui m’a dit : "Pourquoi toi tu ne le diffuses pas?’’
, raconte-t-il.
J’ai arrêté. Je me suis dit que oui, moi, je pouvais faire ça.
Après une longue recherche, le pasteur a été en mesure d’entrer en contact avec les producteurs du film américain, qui tentaient déjà de percer le marché du cinéma canadien, mais sans succès.
Ayant grandi auprès d’une famille œuvrant dans le domaine du cinéma, le pasteur McKelvie raconte que cela a été un jeu d’enfant pour lui de trouver une place dans les salles de cinéma pour la parution du film.
Au total, ce sont 24 salles de cinéma canadiennes qui diffuseront le film Unplanned, dont 14 dans des cinémas Cinéplex.
Au Nouveau-Brunswick, c’est à Bathurst, à Edmundston et à Moncton que ce film sera présenté. Les responsables tentent de se faire une place sur les écrans de Fredericton d’ici vendredi.
Une décision critiquée
Cinéplex, le géant canadien de la diffusion de films, a dû s’adresser au public, plus tôt cette semaine, pour expliquer sa décision de diffuser ce film grandement dénoncé.
Le PDG de Cinéplex, Ellis Jacob, a défendu sa décision dans une lettre publiée sur les médias sociaux.
Le pasteur admet pour sa part qu’il ne s’attendait pas à des réactions aussi vives sur la venue de ce film en territoire canadien, et il mentionne avoir été victime de messages haineux de la part du public.
L’opposition au film a été intense, mais le soutien a été tout aussi intense
, dit-il. Je vois les deux côtés, j’écoute les deux côtés.
M. McKelvie explique qu’il a lui-même été très touché par le film, après l’avoir regardé. C’est pourquoi il s’est battu pour qu’il soit diffusé ici.
Ça m’a dérangé. C’est un film dérangeant, mais un bon film. Ça te fait penser. Que tu sois pour l’avortement ou contre l’avortement, tu auras après le film ce débat-là en toi
, souligne l’homme d’Église.
Le pasteur McKelvie dit avoir l’intention de travailler sur ce film jusqu’à ce que Dieu lui demande de faire autre chose.
Un film très mal accueilli
La Coalition pour le droit à l’avortement au Canada n’a pas perdu de temps avant de communiquer son mécontentement quant à la venue de ce film au pays, qu’elle qualifie de dangereux morceau de propos anti-avortement
.
Le Regroupement féministe du Nouveau-Brunswick partage ce point de vue. La directrice générale, Nelly Dunnene, se dit très inquiète.
Ça nous a vraiment préoccupés, c’est pourquoi au regroupement on dénonce vivement la diffusion à large échelle de ce film
, dit-elle.
Ses membres et elle croient que la diffusion d’un tel film participe à tout un argumentaire d’un sentiment contre l’avortement
.
On l’a vu aux États-Unis, au Canada aussi, la recrudescence de l’argument contre l’avortement qui, rappelons-le, est un soin de santé, un droit fondamental
, souligne la directrice générale.
« C’est extrêmement dangereux. Nous, on le voit vraiment de cet oeil-là. »
Pour Nelly Dennene, ce n’est pas la sortie d’un film sur l’avortement qui est dérangeant, c’est plutôt que le film partage de la désinformation
sur un sujet déjà sensible.
Ce qu’on dénonce, nous, c’est la désinformation dans ce film-là. Il y a une désinformation sur tout l’aspect médical de la procédure [de l’avortement] comme telle
, dit Mme Dennene.
On voit dans le film une remise en question complète de l’avortement comme droit fondamental. Il y a une remise en question de la procédure, une remise en question du choix, une remise en question du libre [arbitre] et c’est ça qui est dangereux.
En Colombie-Britannique, les salles de cinéma Salmar sont revenues sur leur décision de présenter le film après que plusieurs de leurs employés ont été visés par des menaces de mort.
Avec les renseignements de Harry Forestell et du Téléjournal Acadie