Les propriétaires devront s'inscrire auprès de Québec pour louer sur Airbnb

Le gouvernement du Québec va déposer un projet de règlement pour mieux encadrer les locations illégales, qui se font parfois, comme ici à Montréal, avec des boîtes à clefs accrochées devant une fenêtre.
Photo : Radio-Canada / Romain Schué
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Les propriétaires souhaitant offrir leur logement principal sur une plateforme d'hébergement touristique devront désormais obtenir un numéro d'enregistrement auprès du ministère du Tourisme, a appris Radio-Canada. Grâce à cette mesure, Québec espère mieux retracer et punir les propriétaires ou agences offrant de multiples logements à un usage uniquement touristique.
D’ici la fin de la première semaine de juin, la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, déposera un projet de règlement visant à éclaircir l’actuelle loi sur les établissements d’hébergement touristique, qu’elle avait récemment qualifiée de « floue ».
L’idée est de « moderniser » cette réglementation, car le gouvernement « croit beaucoup en l’économie collaborative », mais aussi de lutter principalement contre les personnes ou entreprises qui acquièrent des immeubles d’appartements et offrent ces logements en location sur des plateformes comme Airbnb, sans respecter la législation en place, a-t-on confié à Radio-Canada.
« On veut faciliter l’environnement pour les gens qui veulent louer leur résidence principale, aussi leur résidence secondaire, pour arrondir les fins de mois. C’est l’objectif », a mentionné une source proche du dossier.

La ministre du Tourisme, Caroline Proulx, va déposer ce projet de règlement au début du mois de juin.
Photo : Radio-Canada / Marc-Antoine Lavoie
Une autorisation du syndicat de copropriétaires nécessaire
Dès l’adoption de ce texte, s’il est approuvé par le Conseil des ministres, les propriétaires souhaitant offrir leur résidence principale pour des locations touristiques auront l’obligation d’obtenir un numéro d’attestation auprès de la Corporation de l’industrie touristique du Québec (CITQ), chargée de la classification.
L’autorisation du syndicat de copropriété sera nécessaire dans le cas d'un immeuble comprenant des propriétaires différents. Les locataires, de leur côté, pourront également louer légalement leur résidence, s’ils obtiennent l’approbation de leur propriétaire.
Ainsi, il ne sera plus nécessaire pour un propriétaire souhaitant louer sa résidence principale d’obtenir une attestation de classification [le panonceau étoilé], comme évoqué dans le règlement actuel.
En revanche, s’il veut mettre en location une résidence secondaire, tel un chalet, il devra obligatoirement obtenir ce document, ainsi qu’un autre numéro d’enregistrement. Cette démarche sera désormais valable pour les locations se faisant sur ce qui est qualifié de « base régulière », mais aussi pour des locations occasionnelles.
Pas de nombre de nuitées
Contrairement à la France [un maximum de 120 nuitées] ou encore à la Ville de Québec, qui devrait, dans les prochains jours, annoncer son intention de limiter à 90 le nombre de jours en hébergement touristique, le gouvernement provincial ne reprendra pas cette idée. Trop difficile, glisse-t-on, de vérifier si un propriétaire ne change pas de plateforme après avoir atteint le plafond défini.
Il n’y aura donc aucune limitation du nombre de nuitées pour les locations touristiques concernant les résidences principales. Seule obligation : ne pas excéder 31 jours consécutifs. Au-delà de ce chiffre, les règles de la Régie du logement s’appliqueront.
Un numéro à afficher dans les annonces
À quoi va servir ce numéro d’enregistrement? À mieux retracer notamment les propriétés disponibles à la location touristique, souligne-t-on.
À ce jour, les 25 agents de Revenu Québec, qui disposent pourtant depuis près d’un an de ce pouvoir, n’ont délivré aucun constat d’infraction, malgré des milliers de visites. Des amendes allant jusqu’à 50 000 $ par jour sont prévues, mais le flou actuel pourrait entraîner des contestations judiciaires.
Le ministère du Tourisme compte, par cette révision du règlement, donner « plus de mordant » aux inspecteurs de Revenu Québec. En étudiant les documents qui seront présentés lors de la demande de numéro d’enregistrement, comme le compte de taxes, ces agents pourront ainsi vérifier si c'est bien une résidence principale qui est offerte sur ces plateformes de location de courte durée.
Ce numéro devra obligatoirement être affiché dans toutes les annonces dans le descriptif du logement, qu’elles soient sur le web ou dans les journaux locaux. Dans le cas contraire, des amendes seront prévues pour forcer les intéressés à se plier à la loi.

Un numéro d'enregistrement devra être indiqué dans le descriptif des annonces.
Photo : Radio-Canada / MARIE-EVE LAPOINTE
Des réactions positives
Cette révision est « un très bon pas dans la bonne direction », selon l’Association des hôtels du Grand Montréal, qui réclame de telles mesures depuis plusieurs mois.
Il faut distinguer, explique Eve Paré, sa présidente, « l'économie collaborative, donc un propriétaire qui loue sa maison à des touristes, de ce qu'on va appeler l'économie commerciale ».
« Ce qui est problématique, complète-t-elle, ce sont les parcs à condos qui sont loués à des touristes et qui font vraiment une forme de concurrence déloyale à l'hôtellerie. »
Ce constat est partagé par la Ville de Montréal, qui dénonce de son côté une pénurie de logements locatifs disponibles.
C’est une bonne initiative. Ça donne des outils de plus pour Revenu Québec pour mieux intervenir auprès des illégaux. Pour nous, [les amendes] c’est la seule façon pour endiguer le problème de l’illégalité touristique.
Bien que soulignant le « bon pas » du gouvernement, le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) assure qu’ « il faudra en faire plus ».
« Il faut resserrer drastiquement Airbnb et les plateformes semblables qui retirent des milliers de logements du parc locatif, juge Maxime Roy-Allard, porte-parole du RCLALQ. Le gouvernement du Québec a la responsabilité d’assurer la protection du parc locatif. Ça a des impacts importants pour les locataires. »