Québec serre la vis aux propriétaires de chien

Québec dépose une réglementation plus sévère pour encadrer la possession d'un chien au Québec et réduire le nombre de morsures.
Photo : Reuters / Jas Lehal
Dans son règlement d'application de la loi sur l'encadrement des chiens, le gouvernement Legault définit et resserre davantage les règles qui entourent la possession de ces animaux au Québec, qu'ils soient dangereux ou non. Lise Vadnais, la sœur de Christiane Vadnais, morte après avoir été mordue par un pitbull, accueille favorablement cette mesure.
Un texte de Stéphane Bordeleau et Sarah Molkhou
Dans une déclaration lue mercredi matin à l’Assemblée nationale, la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, a donné un aperçu des règles auxquelles devront désormais se plier les propriétaires de chiens, les municipalités et les vétérinaires pour assurer la sécurité du public.
Bien que la loi qui prévoit l’encadrement des chiens au Québec ait été adoptée en juin 2018 par l’ancien gouvernement libéral, aucun cadre d’application n’avait été mis en place depuis.
Selon une étude de Léger Marketing citée par la ministre Guilbault, environ 164 000 cas de morsures de chiens sont répertoriés chaque année au Québec.
Le quart des victimes sont des enfants de moins de 12 ans et, dans 38 % des cas, le chien impliqué dans l’incident était l’animal de la famille.
Rappelant la mort tragique de Christiane Vadnais, tuée par le pitbull de son voisin en 2016 alors qu’elle était assise dans la cour de sa résidence dans l’est de Montréal, la ministre Guilbault a promis aux Québécois un « encadrement uniforme pour tous les chiens, tout en respectant l’autonomie des municipalités qui souhaiteraient aller plus loin » que la loi actuellement en vigueur.
Des pouvoirs accrus pour les municipalités
Ce sera aux municipalités de veiller à l’application du règlement provincial sur leur territoire, puisqu'elles sont les autorités les plus proches des propriétaires de chiens.
Une municipalité pourra donc déclarer qu’un chien est potentiellement dangereux avant qu’il ne s’en prenne aux citoyens si son dossier répond à certains critères établis.
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Lorsqu’un chien sera déclaré dangereux par une ville, son maître ne pourra plus déménager dans une autre ville pour se soustraire à une déclaration ou une ordonnance rendue contre lui, prévient la ministre Guilbault.
Toute déclaration faite par une municipalité concernant un chien potentiellement dangereux sera désormais valide partout au Québec.
En cas d’attaque ou de morsure causant des blessures graves ou la mort de la victime, la Ville devra désormais ordonner sur-le-champ l’euthanasie de l’animal.
Enfin, toute municipalité qui désirerait mettre en place des normes plus sévères encore sera libre de le faire dans la mesure où elles ne sont pas incompatibles avec la réglementation provinciale.
Des règles plus strictes pour tous les propriétaires
Outre la responsabilité des municipalités, Québec pose également une série de conditions qui s’appliqueront à tous les propriétaires de chien de la province, que l’animal soit potentiellement dangereux ou non.
Par conséquent, chaque propriétaire de chien sera désormais obligé d’enregistrer son animal auprès de sa municipalité.
Son ou ses chiens devront par ailleurs porter en tout temps la médaille que leur fourniront les autorités municipales.
Dans les lieux publics, les propriétaires devront également s’assurer que leur animal est en tout temps sous le contrôle d’une personne capable de le maîtriser en cas de problème.
Les propriétaires dont l’animal aura été déclaré potentiellement dangereux devront de plus s’assurer qu’il soit vacciné contre la rage, stérilisé et doté d'une micropuce.
Ils devront également veiller en tout temps à ce que leur chien ne puisse sortir des limites de leur propriété et que, dans un endroit public, l’animal porte en tout temps un licou ou une muselière-panier, en plus d’être tenu en laisse.
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Déclaration obligatoire pour les médecins et les vétérinaires
En ce qui a trait aux attaques et au cas de morsures de chien, la ministre de la Sécurité publique va plus loin en obligeant désormais les médecins et les vétérinaires à « signaler sans délai à la municipalité concernée » tout cas de blessure infligée par un chien à une personne ou à un autre animal domestique.
Les médecins et vétérinaires seront également tenus de préciser dans leur rapport la nature et la gravité des blessures.
Bien que la ministre Guilbault ait reconnu d’emblée qu’aucun règlement, aussi sévère soit-il, ne peut empêcher toutes les morsures ou attaques de chien, elle croit néanmoins qu’en responsabilisant davantage les propriétaires d’animaux il y a moyen de réduire les risques d’événements tragiques causés par les chiens.
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Une réglementation bien accueillie
Lise Vadnais, la sœur de Christiane Vadnais, tuée par un chien en 2016, estime que cette réglementation est une grande avancée pour éviter de nouveaux drames.
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Elle a souligné l’importance d’éduquer et de responsabiliser les propriétaires de chien tout en précisant que la réglementation devra être bonifiée au fil du temps.
« Mon combat n’est pas tout à fait terminé, il faut que la réglementation soit mise en application de façon sérieuse. Il faut que le monde se rende compte qu’adopter un chien entraîne une responsabilité publique », a-t-elle affirmé.
De son côté, la présidente de l'Ordre des vétérinaires du Québec, Caroline Kilsdonk, insiste sur l’importance d’avoir une réglementation qui s’applique à la grandeur de la province : « Cela permet de s’assurer qu’il y ait un minimum de fait dans l’ensemble des municipalités ».
Néanmoins, elle émet certaines réserves sur un aspect particulier de la réglementation, qui devrait être raffiné.
« Le règlement demande que toutes les morsures soient obligatoirement déclarées par les médecins vétérinaires, alors qu’aucune grille de morsure n’est prévue. C’est impossible pour les médecins de signaler tous les incidents sur les animaux ou sur les humains », soutient-elle.