La flottille des crabiers traditionnels acadiens se morcelle : inquiétudes dans la Péninsule acadienne

La pêche au crabe est un maillon important de la chaîne économique de la Péninsule acadienne
Photo : Radio-Canada / Alix Villeneuve
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Des permis de la flottille des crabiers de la Péninsule acadienne, un fleuron de l'économie de la région, ont été transférés à des personnes de l'extérieur du Nouveau-Brunswick, une situation qui peut mettre en danger de nombreux emplois de la Péninsule acadienne.
Un texte de René Landry
Le phénomène est assez important pour inquiéter la Fédération régionale acadienne des pêcheurs professionnels (FRAPP).
Son directeur général, Jean Lanteigne, déplore la situation. Selon les données qu'il a compilées au cours des sept ou huit dernières années, pas moins de huit permis transférés [ou « remplacés », selon les termes du ministère des Pêches et des Océans] par des capitaines-propriétaires sont aujourd'hui contrôlés par des personnes de l'extérieur de la province.
Où est-ce que ça va arrêter cette affaire-là, se demande-t-il. On est victime de notre succès. Ça crée une envie des gens des autres provinces de venir acheter, par toutes sortes de façons, un permis du Nouveau-Brunswick. C'est un petit peu comme si on était à l'épicerie : on magasine les permis et on s'en va avec. C'est très dommage. Nos parents ont tellement travaillé fort pour bâtir cette industrie.
Le directeur général de la FRAPP illustre l'impact négatif, au plan économique, de la perte de ces bateaux de pêche.
Si on met un minimum de quatre pêcheurs par bateau, ça signifie qu'il y a 32 pêcheurs de la Péninsule acadienne qui ont perdu leur emploi avec cette histoire-là, explique-t-il. Selon une étude, un bateau de pêche équivaut à 20 emplois. Si on a perdu 8 bateaux, on a donc perdu 160 emplois dans la Péninsule acadienne dans le secteur des pêches. Et 160 emplois, c'est une usine. C'est un peu comme si on avait perdu une usine. Ce sont des millions de dollars qui sont sortis du Nouveau-Brunswick et qu'on ne reverra jamais. C'est parti ad vitam aeternam. C'est très regrettable!
Pourtant, des pêcheurs de crabe de la Péninsule acadienne offrent déjà leurs prises à des entreprises de transformation de l'extérieur de la province. Mais la situation n'est pas du tout du même ordre, selon Jean Lanteigne.
On a des pêcheurs qui viennent vendre ici, dit-il. On a des nôtres qui vont vendre à l'extérieur. Ça se fait pour différentes raisons, que ce soit pour des conditions, pour des bris mécaniques, le mauvais temps, le prix, etc. Mais c'est occasionnel. Un pêcheur va vendre un voyage de pêche, deux voyages, une saison. Mais de façon permanente, ce n'est pas tout à fait la même chose. On est venus chercher de quoi ici qui appartenait au Nouveau-Brunswick et on l'a emmené dans une autre province.
Comment éviter que la flottille des crabiers de la Péninsule acadienne se désagrège davantage?
Jean Lanteigne suggère de miser sur deux choses : la sensibilisation auprès des pêcheurs et des mesures fiscales qui les encourageraient à transférer leur permis dans la Péninsule acadienne ou, du moins, au Nouveau-Brunswick. Il invite donc les élus à prendre la chose très au sérieux.
Comme province, il va falloir qu'on se réveille pour s'assurer qu'on maintienne une industrie qui nous appartient et qui a été développée par notre monde, ici
insiste-t-il.