La bataille contre l’abus d’alcool n’est pas encore gagnée, montre une étude mondiale

Trois verres de bière sur une table
Photo : iStock
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Une vaste étude publiée dans The Lancet, réalisée à partir de données provenant de près de 200 pays, nous force à nous rendre à l'évidence : la bataille contre l'abus d'alcool est loin d'être gagnée.
Un texte de Normand Grondin
Même si l'Organisation mondiale de la santé (OMS) combat l'abus d'alcool depuis plus de 30 ans, rien n'y fait, nous dit une étude récente publiée dans la grande revue médicale britannique. Aujourd'hui, on lève son verre plus souvent que jamais.
« Ce qu’on apprend aujourd'hui, dit la Dre Catherine Paradis, analyste principale au Centre canadien sur les dépendances et l'usage de substances, c'est que l'OMS n'atteindra pas sa cible de 10 % de réduction des méfaits liés à l’alcool d'ici 2030. »
En 1990, révèle l’étude, on buvait en moyenne six litres d'alcool pur par année par personne adulte à l’échelle de la planète. L’équivalent de 350 bières par année.
En 2017, on consomme encore plus (6,5 litres / adulte) et en 2030, ce phénomène va se poursuivre (7,6 litres / adulte).
Évidemment, d'un pays à l'autre, les écarts peuvent être extrêmement prononcés. En Moldavie, on consomme en moyenne 15 litres d’alcool pur par personne par année, contre à peine 0,0005 litre d’alcool pur au Koweït.
Il faut aussi rappeler que 40 % des humains ne boivent pas une goutte d'alcool. C’est dire que l’autre 60 % en consomme régulièrement en grande quantité…
C'est en Asie du Sud-Est – particulièrement en Chine, au Vietnam et en Inde - que la consommation d'alcool a le plus augmenté.
« Les raisons principales pour ça, c'est bien sûr la croissance économique, qui fait que les gens ont les moyens de se procurer de l'alcool, et aussi peut-être une question de politique publique qu’il serait nécessaire de mettre en place », résume la Dre Nicole April, médecin spécialiste en santé publique à l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).
En Europe, la consommation est globalement en diminution, surtout en raison des baisses survenues en Russie et dans les anciennes républiques depuis quelques années.
En Amérique du Nord, la consommation reste stable, à près de 10 litres d’alcool pur par personne chaque année.
Mais le Canada n'est pas à l’abri des problèmes.
« D'une part, le nombre d'abstinents au Canada semble vouloir régresser, fait remarquer Dre Catherine Paradis. Un fait encore plus inquiétant, d'ici 2030, on voit se dessiner une hausse du nombre de femmes et d'hommes qui rapportent des épisodes de consommation excessive. »
La consommation nocive d'alcool fait 3 millions de morts par an. Les hommes en constituent plus des trois quarts, selon l'OMS. Ce décompte inclut notamment les personnes décédées dans des accidents de la circulation ou en raison d'actes violents liés à la consommation d'alcool.
Partout, le nombre de consommateurs excessifs – des amateurs de beuveries - est d'ailleurs en hausse, passant en moyenne de 18 % en 1990 à 23 % en 2017. Mais les statistiques indiquent que dans certains groupes d’âge et régions du monde, il atteint plus de 70 % des consommateurs d’alcool.
La solution pour réduire la consommation d’alcool, selon les experts, consisterait à encadrer plus strictement cette substance, un peu comme on le fait ici et ailleurs pour la cigarette et pour la marijuana.
« Ces stratégies-là sont rentables et efficaces, dit Dre April. On peut penser à imposer une taxation plus élevée, à limiter l’accessibilité en limitant les points de vente et les heures d'ouverture et même, éventuellement, à interdire toute forme de publicité. »
C'est un chemin semblable qu'a emprunté la Russie il y a une dizaine d'années et aujourd'hui, on y observe une diminution de 20 % de la consommation d'alcool dans la population.