Un projet pilote met fin aux formations policières en français des cadets de la GRC

Des cadets de la GRC pendant la cérémonie de fin de formation à Regina, le 5 juin 2017
Photo : Reuters / Valerie Zink
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Depuis le 1er avril, les cadets de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) n'ont plus la possibilité de recevoir leur formation policière en français. Cette formation, qui pouvait normalement être suivie dans l'une ou l'autre des deux langues officielles, est désormais offerte seulement en anglais ou dans un format bilingue.
Chaque année, la GRC forme en moyenne entre 35 et 40 troupes de 32 cadets chacune dans son école de formation à Regina, en Saskatchewan. C’est à cet endroit que les recrues apprennent leur métier de policier fédéral.
En règle générale, une de ces troupes est formée en français. Toutes les autres formations sont données en anglais.
La GRC a récemment revu son programme et, dans le cadre d’un projet pilote de deux ans, elle a décidé d’abolir l’unique formation en français pour la remplacer par des formations bilingues.
En 2019-2020, la GRC prévoit donc accueillir 40 troupes de cadets à son école de Regina. Deux de ces troupes suivront une formation bilingue. Les 38 autres troupes de recrues apprendront leur métier en anglais.
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L’absence d’offre de formation policière en français à l’école de la GRC à Regina a déjà été portée à l’attention du commissaire aux langues officielles du Canada, Raymond Théberge, qui promet d’y jeter un coup d’oeil.
Je peux confirmer que nous avons reçu deux plaintes à ce sujet, et que nous sommes présentement en train d’analyser leur recevabilité
, a-t-il déclaré par voie de communiqué. Vous comprendrez toutefois que je ne peux discuter davantage de cette question puisque la loi m’oblige au secret des enquêtes.
La place des francophones à la GRC
Si la formation en français devait complètement disparaître après le projet pilote, cela enverrait un mauvais message aux cadets unilingues français qui désirent monter les échelons de l’organisation dans leur langue maternelle, a indiqué Stéphanie Chouinard, professeur au Collège militaire royal du Canada.
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Dans la Loi sur les langues officielles, il y a le principe des égalités des opportunités au sein de la fonction publique canadienne
, rappelle Stéphanie Chouinard. Si on fait fi de toutes formations majoritairement en français à l’école de Regina, cela envoie le signal que, finalement, les opportunités dans la langue française à la GRC ne sont pas très réelles.
La GRC défend son projet pilote de formation bilingue et dit respecter l’esprit de la Loi.
Une moitié des cours seront offerts en français et l’autre moitié en anglais. Les cadets auront accès à du matériel de formation dans les deux langues officielles et pourront soumettre leurs travaux dans leur langue officielle de préférence
, a-t-on spécifié.
De plus, soutient-on, les cadets qui suivront la formation bilingue peuvent profiter d’un programme de langue seconde dans les semaines précédant leur formation policière à Regina.
Cela permettra, entre autres, aux futurs policiers de la GRC d'acquérir un niveau de compétence supérieur dans la langue seconde
, déclare-t-on.
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Mais pour Stéphanie Chouinard, ça ne change pas la donne selon laquelle il subsiste une iniquité entre la tonne d’unités anglophones qui vont être sur place, les quelques unités bilingues et la disparition totale des unités francophones
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Et selon son expérience, les francophones ne sont jamais favorisés dans un contexte bilingue.
Ce qu’on sait, c’est que lorsqu’il y a des cours bilingues, dans la très grande majorité du temps, c’est aux francophones de s’ajuster aux anglophones. Donc, un cours bilingue devient quasiment automatiquement un cours en anglais
, résume-t-elle.
Ce n'est pas la première fois qu'une politique de la GRC soulève la controverse. Le commissaire aux langues officielles promet qu'il demeurera attentif.
Le respect de ses obligations liées à la Loi sur les langues officielles par la GRC est loin d’être acquis autant en ce qui a trait au service offert au public (partie IV) qu’aux droits de langue de travail des employés de la GRC (partie V). Nous continuons de surveiller la performance de cette institution de près
, déclare Raymond Théberge.