Accouchements forcés à l'Hôpital de Moncton : un recours collectif est déposé
L'infirmière Nicole Ruest a travaillé pour l'Hôpital de Moncton pendant 15 ans.
Photo : Instagram : nicoleruest191
Des cabinets d'avocats à Moncton et à Halifax déposent une demande de recours collectif au nom des femmes qui auraient reçu sans leur consentement le médicament ocytocine, utilisé pour accélérer un accouchement, à l'Hôpital de Moncton. Une infirmière de l'hôpital, Nicole Ruest, a été congédiée, la semaine dernière, lorsque cette affaire a éclaté au grand jour.
L'infirmière en question, qui fait l'objet d'une enquête criminelle, est visée par la poursuite, de même que le réseau de santé Horizon, qui administre l'Hôpital de Moncton.
La poursuite est déposée au nom d'une mère, Jayde Scott, qui a dû subir une césarienne d'urgence après avoir reçu de l'ocytocine. Cette demande de recours collectif reste à être approuvée par les tribunaux.
Des dizaines de mères pourraient s'être trouvées dans la même situation que Mme Scott et pourraient ajouter leur nom à la poursuite, selon l'avocat John McKiggan, du bureau McKiggan Hebert à Halifax. Le réseau Horizon disait d'ailleurs mardi dernier avoir reçu une quarantaine d'appels de patientes inquiètes, après avoir rendu publique l'affaire.
La demande de recours collectif couvre la période qui s'étend de 2005 à 2019, au cours de laquelle Nicole Ruest a travaillé au sein du service d'obstétrique de l'établissement.
Les allégations n'ont pas été prouvées en cour.
Des accouchements difficiles
La poursuite allègue que Nicole Ruest s'est servi de sa fonction pour administrer de l'ocytocine sans leur consentement à des femmes sur le point d'accoucher. Elles auraient ainsi subi des effets indésirables comme des contractions très fortes et incontrôlées, une baisse dangereuse du rythme cardiaque de leur bébé, des césariennes d'urgence et des accouchements prématurés.
Le réseau de santé Horizon est poursuivi parce que l'Hôpital de Moncton était au courant, selon la poursuite, qu'un nombre inhabituel de césariennes y était pratiqué de même que d'accouchements au cours desquels des instruments comme des forceps devaient être utilisés. Les autorités auraient donc dû faire enquête pour tenter d'élucider ces faits, selon la poursuite.
La demande de recours vise à obtenir des excuses et un aveu de responsabilité de la part de l'Hôpital, l'établissement d'un programme de suivi pour les mères traitées par Nicole Ruest ainsi que des dommages et intérêts pour les blessures physiques et émotionnelles des présumées victimes. Le montant de ces dommages n'est pas précisé.
Accouchement d'urgence
Le document de la poursuite comprend une description de faits allégués qui se seraient produits lors de l'admission de Mme Scott à l'hôpital, le matin du 28 mars. Son obstétricienne, la Dre Erin Hemsworth, avait prévu induire l'accouchement ce jour-là. Elle a donc été branchée à une intraveineuse qui devait contenir une solution saline.
Or, cinq minutes après que cette solution lui a été administrée, Mme Scott s'est mise à avoir de fortes contractions sans interruption. Presque simultanément, les battements de coeur des bébés se sont mis à baisser dangereusement.
Mme Scott a alors subi une anesthésie générale et une césarienne d'urgence. Le lendemain, la Dre Hemsworth est venue lui expliquer que la saline utilisée pendant son accouchement avait été testée et qu'elle contenait de l'ocytocine. La médecin lui aurait alors dit que de petits trous avaient été percés dans la poche qui contenait la solution, ce qui aurait permis d'y injecter l'ocytocine. Elle aurait ajouté que l'infirmière Ruest en était responsable.
C'était très traumatisant
, a témoigné Mme Scott, en pleurs, lors d'une conférence de presse à Moncton, en compagnie de l'avocat McKiggan et de Mathieu Picard, qui représente le deuxième bureau d'avocats engagé dans la poursuite, Fidelis Law Droit de Moncton. Je ne peux pas comprendre pourquoi une personne a pu faire cela
, at-elle ajouté.
Le réseau de santé Horizon a ouvert une ligne téléphonique pour les femmes qui auraient reçu de l'ocytocine sans y avoir consenti. Il leur a aussi demandé de communiquer avec la GRC, mais s'est refusé à tout autre commentaire, puisque l'affaire fait l'objet d'une enquête criminelle. Cette enquête n'a pas pour l'instant débouché sur des accusations.