De la nature, de l'espace et... plus d'argent pour l'école de demain, propose le Lab-École à Québec

L'architecte et professeur Pierre Thibault, le chef et homme d'affaires Ricardo Larrivée et l'athlète et entrepreneur Pierre Lavoie présentent le rapport du Lab-École à Québec.
Photo : Radio-Canada / Nicolas Vigneault/Anne Marie Lecomte
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Après des mois de consultation, le Lab-École a rendu public mercredi un rapport dans lequel il formule douze propositions au ministère de l'Éducation pour rénover et construire « les écoles de demain ». Les projets du Lab-École coûteraient jusqu'à 25 % plus cher qu'une rénovation conventionnelle.
Certes, la vision que propose le Lab-École prévoit plus d'espace pour les élèves et donc... des coûts plus élevés pour ces écoles du futur.
Mais, comme le dit en substance l'un des auteurs du rapport, l'architecte et professeur Pierre Thibault : pour tout l'argent investi, combien de décrochages en moins? Combien d'enfants plus motivés? Combien de personnes qui ne souffriront pas de surmenage?
Créé au printemps 2017 et doté d'un budget de 3 millions de dollars, le Lab-École a été confié par le gouvernement au chef et homme d'affaires Ricardo Larrivée, à l'athlète et entrepreneur Pierre Lavoie et à Pierre Thibault.
Au total, sept projets soumis par les commissions scolaires au Lab-École ont été retenus par le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur :
Québec : École Stadacona
Maskinongé : Rénovation et agrandissement - École Saint-Joseph
Rimouski : construction neuve
Shefford : construction neuve
Saguenay : rénovation - École primaire Antoine-de-Saint-Exupéry
Gatineau : Rénovation et agrandissement - École Pierre-Elliott-Trudeau
Montréal : étude de faisabilité en cours
Les écoles issues des projets de ce laboratoire seront prêtes pour la rentrée scolaire 2021. Des discussions sont en cours avec le ministère de l'Éducation pour augmenter le financement des sept projets.
Un concours d'architecture sera lancé dans les semaines à venir pour la construction ou l'agrandissement d'écoles à Gatineau, Maskinongé, Saguenay, Shefford et Rimouski. Depuis plus d'un demi-siècle, c'est la première fois au Québec qu'un concours d'architecture est lancé pour des écoles primaires, soulignent les auteurs du rapport intitulé Penser l'école de demain.
Une école entourée de vert, sans asphalte
Le rapport du Lab-École se veut un « outil de référence » et, pour le produire, MM. Larivée, Lavoie et Thibault se sont entourés de 70 collaborateurs dont la réflexion a porté sur trois axes : l'environnement physique, un mode de vie sain et actif, et l'alimentation.
Afin de repérer « des modèles de réussite en architecture de bâtiments scolaires », MM. Larrivée et Lavoie ont visité des écoles au Québec. Pierre Thibault, lui, s'est rendu aux États-Unis, au Japon, au Danemark et en Finlande.
Pierre Thibault raconte par ailleurs ce qu'il a découvert lors de vacances en Suède : « J’allais partout autour des écoles et il n’y avait pas d’asphalte. Il y avait des arbres partout et les enfants y jouaient… Quelqu’un m’a dit : pour chaque élève, il doit y avoir un mètre de nature autour de l’école ».
Au Québec, dès septembre 2019, les écoles devront offrir, au minimum, deux périodes de 20 minutes de récréation aux élèves. « La cour de récréation, il faut [...] [la] rendre agréable et y investir massivement », dit Pierre Lavoie, qui ajoute qu'il ne suffit pas d'y « refaire les lignes ».
Les incontournables de l'école de demain

Une maquette exposée lors de la présentation du rapport du Lab-École Penser l'école de demain, à Québec.
Photo : Radio-Canada / Nicolas Vignault/Anne Marie Lecomte
Les auteurs du rapport qualifient d'« incontournables » les propositions faites au gouvernement du Québec.
Et ces propositions sont à mille lieues du « modèle linéaire qui est celui de bon nombre d'écoles québécoises : un corridor central distribue tous les espaces de l'école; classes, gymnases; bureaux administratifs, etc. ».
En lieu et place, le Lab-École préconise la lumière et la ventilation naturelles, des aires multifonctionnelles comme « espaces de collaboration », du mobilier permettant « de varier les positions corporelles », des gradins « au coeur de la vie scolaire », une cuisine adaptée et sécuritaire...
Et pour composer avec le bruit, les auteurs du rapport recommandent une fenestration et une acoustique adéquates.
[...] Ne pas situer les salles de classe à proximité des espaces achalandés et bruyants. Lorsque ce n’est pas possible, il est envisageable d’utiliser des zones tampons comme barrière acoustique, telles que les espaces de circulation et de rangement, ainsi que les toilettes.
Les vestiaires : zone de conflit et de stress
Autre recommandation : mettre les « lieux névralgiques » que sont les vestiaires dans des zones où il n'y a pas de circulation, et non dans un couloir central très passant, comme c'est le cas actuellement.
Plusieurs enseignants ont mentionné que les vestiaires représentaient une zone potentielle de conflits et de stress, car les dégagements trop étroits contribuaient à une proximité non souhaitée entre les élèves. Les études soulignent même que ce serait un lieu propice à l’intimidation.
De plus, lorsque le beau temps succède à l'hiver, les vestiaires pourront servir à d'autres fins, suggère aussi le rapport.
Manger à l'école
Bon nombre d'élèves entrent aux aurores à l'école, y mangent le midi et y attendent leurs parents jusqu'à quelques heures après la fin des classes.
Or au Québec, seul le quart des écoles possèdent un lieu spécifique pour les repas. L'étude de Frerichs et coll., menée en 2015, illustre que « le peu d’espace destiné au dîner oblige une rotation de groupes à l’heure du midi, ce qui aurait pour effet de restreindre le temps consacré au repas ».
« Ton cerveau a besoin de 20 minutes pour savoir ce qu'il a mangé, affirme M. Larrivée. Si tu manges trop rapidement, tu vas trop manger ou tu ne mangeras pas assez. »
L'alimentation et ses grands principes doivent eux-mêmes être intégrés aux apprentissages, insiste Ricardo Larrivée. « Jusqu’à il y a tout récemment, dit-il, l’école a toujours été présente, depuis les débuts de la colonie, dans l’enseignement alimentaire. »
Jardiner à l'école : ça se fait déjà...
Le rapport recommande entre autres de doter les écoles d'un potager où l'on peut faire du « jardinage pédagogique ». Ça existe déjà : à Montréal, l’École Barthélemy-Vimont dispose depuis 2005 de légumes et de plantes aromatiques en pleine terre et en bacs.
Les auteurs du rapport ciblent ainsi leurs priorités : repenser l’école en synergie avec la communauté, arrimer la conception architecturale aux visées du projet éducatif de l’école, investir dans de nouveaux espaces, intégrer l’environnement extérieur en amont et réviser les paramètres actuels.
Avec les informations de Nicolas Vigneault