Laïcité de l’État : François Legault défend un projet de loi « modéré »

Le premier ministre François Legault estime que son projet de loi est « modéré », à l'image de la population.
Photo : Gouvernement du Québec
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Dans une courte vidéo d'un peu plus de deux minutes diffusée dimanche en fin d'après-midi, le premier ministre François Legault a défendu le projet de loi sur la laïcité de l'État de son ministre Simon Jolin-Barrette.
« J’ai envie de dire "enfin!"; c’est un débat qui dure depuis plus de 10 ans, il est temps qu’un gouvernement mette en place des règles claires pour tout le monde », a déclaré M. Legault.
Au cours de sa brève allocution, François Legault a affirmé que « la laïcité [de l’État] ne va pas à l’encontre de la liberté de religion », […] mais qu’« il faut fixer des règles ».
Le projet de loi sur la laïcité de l'État a été déposé jeudi à l'Assemblée nationale par le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion du Québec Simon Jolin-Barrette.
Il comprend une clause de droits acquis protégeant les employés de l'État portant déjà des signes religieux et une disposition de dérogation pour soustraire la loi à une dizaine d'articles de la Charte canadienne des droits et libertés.
Le projet de loi ne se contente pas d’interdire le port de signes religieux aux employés de l’État en position de coercition (juges, policiers, procureurs de l'État) et aux enseignants des écoles primaires et secondaires du réseau public, comme promis en campagne électorale.
Les juges de paix et certains employés de l'État qui travaillent dans le système de justice (greffier, shérif, etc.) sont aussi visés par le projet de loi, de même que les directeurs d'école et le président et les vice-présidents de l'Assemblée nationale.
Éviter les contestations judiciaires
Dans son discours, M. Legault a dit que l’approche de son gouvernement respecte « l’histoire, les valeurs » et la volonté d’« une grande majorité de Québécois ».
Le premier ministre considère que le projet de loi de son gouvernement est « modéré, comme le sont les Québécois ».
François Legault a rappelé que l’utilisation de la clause dérogatoire, qui doit servir à éviter des contestations judiciaires du nouveau projet de loi, a été utilisée dans le passé par les premiers ministres René Lévesque et Robert Bourassa.
Selon une étude, cette disposition constitutionnelle aurait en fait été employée à une centaine d’occasions par l’Assemblée nationale depuis une quarantaine d’années.
« Il est temps de fixer des règles, parce qu’au Québec, c’est comme ça que l’on vit », a conclu le premier ministre dans sa vidéo.
Le gouvernement martèle le même message dans une publicité diffusée lundi par la plupart des quotidiens québécois, en y ajoutant une précision.
« J'ai la conviction que, dans une société dite laïque, ce que nous sommes depuis la Révolution tranquille, le gros bon sens veut que la religion n'interfère pas dans les affaires de l'État. Et l'inverse non plus », peut-on y lire.
Un projet de loi contesté
Bien que M. Legault affirme qu’une majorité de Québécois sont en accord avec le projet de loi, plusieurs partis politiques, groupes de pression et diverses organisations n’ont pas tardé à dénoncer son caractère jugé discriminatoire.
Ils reprochent notamment au projet de loi de viser spécifiquement les femmes portant le voile islamique, et ce, dans un contexte où ces femmes sont généralement déjà marginalisées.
Vendredi, sept groupes ont tenu une conférence de presse où le projet de loi a été caractérisé comme étant « raciste ».
Samedi, les membres de Québec solidaire (QS) ont voté pour empêcher toute interdiction de port de signes religieux au sein de la fonction publique.
Le parti politique appuyait auparavant le consensus qui se dégageait autour du rapport Bouchard-Taylor.
Le co-porte-parole de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, a cependant précisé dimanche que ces signes seraient interdits dans certains cas. Impossible, par exemple, d’enseigner en ayant le visage couvert, a-t-il dit.
Charles Taylor, l’un des philosophes ayant contribué à rédiger le rapport Bouchard-Taylor, il y a une décennie, a quant à lui qualifié le projet de loi caquiste de « pas en arrière ».