Huttopia à l’île d’Orléans : des agriculteurs inquiets

L'entreprise française Huttopia souhaite louer 21,7 hectares de terrain de la Pointe d'Argentenay.
Photo : Coalition citoyenne pour la sauvegarde de la Pointe d'Argentenay
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Problèmes d'approvisionnement en eau, perte de biodiversité, dégradation des terres agricoles, les craintes des agriculteurs et de citoyens de l'île d'Orléans sont nombreuses face au projet de l'entreprise Huttopia qui veut offrir 122 sites de camping de luxe à la pointe d'Argentenay.
Les partisans et opposants au projet de prêt-à-camper Huttopia à Saint-François-de-l’Île-d’Orléans étaient rassemblés mercredi devant la Commission de protection du territoire agricole du Québec qui tenait une consultation publique.
L'Union des producteurs agricoles (UPA) a notamment été appelée à témoigner. Celle qui, il y a un an, ne s'était pas opposée au projet, nuance aujourd'hui sa position à la lumière de nombreuses préoccupations soulevées par ses membres.
La présidente de l’UPA Capitale-Nationale-Côte-Nord, Jacynthe Gagnon, affirme avoir été contactée par plusieurs de ses membres installés à l’île. Ils craignent par exemple de manquer d’eau pour irriguer leurs champs si Huttopia vient s’installer dans le secteur.
Si ça nuit de quelque façon que ce soit au niveau des distances séparatrices et de l'approvisionnement en eau, nous c'est clair qu'on est le parti des producteurs, productrices agricoles, c'est l'avenir.
Une étude sur les impacts des changements climatiques à laquelle participe l’UPA révèle que les producteurs agricoles devront irriguer davantage dans le futur.
Déjà plusieurs producteurs de l’île manquent d’eau à certains moments pendant l’été, a affirmé devant la commission Valérie Lemelin, 9e génération de producteurs agricoles à la pointe d’Argentenay.
Un chargé de projet en hydrogéologie a d’ailleurs été mandaté par Huttopia pour étudier la question. Dans son rapport à la Commission, il affirme que l’installation d’un puits test a permis de démontrer que l’eau était disponible en quantité plus que suffisante pour répondre aux besoins de l’entreprise. Les tests ont été réalisés à la fin de l’automne.
L’agrotourisme
Le promoteur prévoit pour sa part créer entre 15 et 25 emplois. Il estime aussi que son camping attirera des clients en hébergement qui resteront sur l’île pendant plusieurs jours et qui seront incités à consommer des produits locaux. Parmi eux, de nombreux clients internationaux en raison de la réputation d’Huttopia.
Là-dessus, l’agronome Laurent Boissonneault, mandaté par la coalition citoyenne pour la sauvegarde de la pointe d’Argentenay pour réaliser une étude d’impact, estime qu’il est difficile d’imaginer une augmentation des ventes substantielles. Il souligne que sur 60 millions de dollars de vente de produits agricoles de l’île, seuls 5 % proviennent de l’agrotourisme.
La majorité de la production agricole de l’île d’Orléans est vouée à la vente en gros. L’argument de l’agrotourisme n’en est donc pas un pour les producteurs qui voient dans le projet Huttopia davantage d’inconvénients.
Caroline Roberge, une des avocates représentant les opposants, souligne également que les promoteurs n’ont pas fourni d’étude d’impact pour les agriculteurs.
« Le fardeau de prouver des retombées économiques autant pour l'agriculture que pour l'île d'Orléans appartient au demandeur et il n'y a eu aucune étude d'impacts économiques autant positifs que négatifs qui a été déposée au dossier », ajoute l'avocate qui est aussi résidente de l'île.
L’entreprise Huttopia était représentée par Raymond Desjardins. Il a refusé de nous accorder une entrevue. Questionné au sujet de l’échéancier de son projet, il a mentionné ne pas être pressé et avoir l’intention de rencontrer les citoyens inquiets quand la Commission aura rendu sa décision.
Le projet est appuyé par la municipalité de Saint-François-de-l’Île-d’Orléans et la MRC de l’île d’Orléans qui y voient un projet structurant.