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Le syndrome de l’imposteur, la source du doute féminin au travail

Une femme de dos se tient devant une rue achalandée d'un centre-ville.

Le syndrome de l'imposteur touche de nombreuses femmes dans leur milieu professionnel.

Photo : iStock / monzenmachi

Carolle-Anne Tremblay-Levasseur
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Souffrez-vous parfois du syndrome de l'imposteur? C'est un fléau très répandu chez les femmes. Des professionnelles refusent d'accorder des entrevues, déclinent des responsabilités et se remettent en question... même si elles ont toutes les compétences nécessaires.

En tant que recherchiste et chroniqueuse, j’observe ce phénomène au quotidien. Je ne compte plus le nombre de fois où des expertes ont refusé d’accorder des entrevues en me disant qu’une autre personne plus compétente pourrait sans doute répondre à mes questions. Chez les hommes, ça arrive plus rarement.

Mais pourquoi au juste?

Le sentiment de ne pas avoir de compétence dans un domaine dans lequel on en a; c’est la définition du syndrome de l’imposteur que donne Louise Cossette, professeure au Département de psychologie à l’Université du Québec (UQAM).

Selon elle, les hommes et les femmes peuvent en souffrir, mais force est de constater que la gent féminine est davantage touchée.

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— Une citation de  Hélène Lee-Gosselin, directrice de l’Institut Femmes, Sociétés, Égalité et Équité

Camille Robert, candidate au doctorat en histoire à l’UQAM, reconnaît cette réalité dans les couloirs universitaires.

Elle observe que les femmes sont nombreuses à porter seules la responsabilité de ce sentiment d’inadéquation. Elle ajoute que ce doute tient des racines sociales et ne relève pas du caractère individuel.

Des stéréotypes persistants au travail

Hélène Lee-Gosselin note que les stéréotypes culturels sur le genre associent le masculin à l’expertise. Les femmes ne se voient pas « attribuer spontanément cette caractéristique, sauf dans les domaines féminins comme les soins et la maternité ».

Hélène Lee-Gosselin, professeure titulaire, directrice de l'Institut Femmes, Sociétés, Égalité et Équité (IFSEE) de l'Université Laval, lors d'une entrevue dans les studios de Radio-Canada à Québec
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Hélène Lee-Gosselin, professeure titulaire, directrice de l'Institut Femmes, Sociétés, Égalité et Équité (IFSEE) de l'Université Laval.

Photo : Radio-Canada

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— Une citation de  Hélène Lee-Gosselin

Selon elle, les structures d’opportunité ne sont toujours pas les mêmes selon le genre, ce qui renforce ce sentiment d’inéquation chez les femmes. Par exemple, ces dernières ne bénéficient pas toujours de liens avantageux avec des personnes influentes au sein de leur entreprise.

Mme Lee-Gosselin explique que la progression des femmes vers les postes décisionnels est plus lente que celle des hommes. Les hommes qui sont dans les métiers traditionnellement féminins grimpent beaucoup plus vite l'échelle hiérarchique.

Une étude de Statistique Canada publiée en janvier dévoile que, parmi les personnes qui gagnent le plus d'argent au Canada, seulement une sur cinq est une femme.

Au total, environ 35 000 femmes contre 137 000 hommes appartiennent à la tranche de revenu supérieure de 1 %.

Elle considère que des femmes refusent des responsabilités, car l’idée d’être sous les projecteurs les effraie. Elles seraient alors confrontées à leur doute lié à leur compétence et préfèrent se retirer. D’autres refusent des responsabilités parce qu’elles portent un poids disproportionné du travail domestique et doivent répondre à ces obligations familiales.

« Pour plusieurs gestionnaires, ces refus renforcent leur idée selon laquelle c’est un choix personnel des femmes. Ils oublient souvent les dimensions relationnelles et organisationnelles. » – Hélène Lee-Gosselin

Le syndrome de l’imposteur, produit social et systémique?

Pour Camille Robert, la socialisation, la sous-représentation des femmes dans le milieu professionnel et décisionnel ainsi que la discrimination basée sur le genre alimentent le syndrome de l’imposteur.

L'étudiante Camille Robert discute au micro de Radio-Canada.
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Camille Robert est candidate au doctorat en histoire à l’UQAM.

Photo : Radio-Canada / Christian Côté

Elle considère que les défis s'additionnent pour les femmes racisées et les mères qui subissent plusieurs systèmes d'oppression.

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— Une citation de  Camille Robert

Ce sentiment d’exclusion pousse les femmes à croire qu’elles doivent « prouver leur compétence constamment pour mériter leur place », note-t-elle.

« La majorité se décharge de sa responsabilité pour reproduire le système dont elle a profité vers les groupes qui ont historiquement été défavorisés et en leur assignant à eux un fardeau disproportionné de la transformation. » – Hélène Lee-Gosselin

Vers l’égalité de confiance

Selon Camille Robert, le problème doit être nommé pour le régler. Elle croit que de connaître les rouages du syndrome de l’imposteur chez les femmes permet à celles-ci de s’outiller pour se défaire du sentiment d’inadéquation.

Le réseau de soutien (la famille, les amis, les collègues...) agit comme véritable baume et armure de protection pour les professionnelles, qui retrouvent, dans ces relations, un miroir plus authentique de leur véritable valeur.

Mme Lee-Gosselin ajoute que des évaluations de rendement adéquates, une réceptivité des gestionnaires aux employés et un souci de développement des talents et des compétences assurent un environnement de travail plus adapté aux défis des femmes professionnelles.

La peur de l’échec, symptôme du syndrome de l’imposteur, pousse les femmes à juger sévèrement leur insuccès. Pour atténuer ces récriminations, Mme Robert propose de dédramatiser les refus et les échecs qui viennent nécessairement avec le milieu universitaire et professionnel.

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