Poésie vivante à l’ère des réseaux sociaux

Poésie à l'ère des réseaux sociaux
Photo : iStock / peshkov
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Soirées de lecture sur scène, slam, baladodiffusions : trois poètes s'entendent pour dire que la poésie est toujours aussi vivante en 2019. Les réseaux sociaux semblent toutefois être un moyen de plus en plus utilisé pour véhiculer le 5e art.
Un texte de Christelle D’Amours pour Les malins
Suivant la règle de trois, Baron Marc-André Lévesque, Sonia Lamontagne et Alexandre Deschênes ont trois choses en commun : ils sont poètes, ont un lien avec la région de la capitale nationale et ont tous choisi de publier des recueils de poésie en format papier.
À ÉCOUTER : La poésie en 2019, à quoi ça rime?
En 2019, dire "je n’aime pas la poésie", c’est comme dire "je n’aime pas la musique". Si tu n’aimes pas ce style de poésie là, tu vas trouver ton style et tu vas finir par l’aimer, forcément.
Attachés à la forme puriste du livre imprimé, ils suivent néanmoins la vague poétique qui déferle sur les réseaux sociaux en expliquant comment ils ont fait de ceux-ci un outil de diffusion.

Faisons connaissance avec la poésie de Baron Marc-André Lévesque.
Photo : Radio-Canada / Christian Côté
Baron Marc-André Lévesque, 28 ans
Ottavien exilé à Montréal, le poète a publié Chasse aux licornes (2015) aux Éditions de l’Écrou, fait partie des 10 jeunes auteurs à surveiller en 2019 selon Plus on est de fous, plus on lit! et prépare un autre recueil attendu en 2020. Bien qu’il considère que la poésie n’est jamais plus vivante que lorsque clamée sur une scène devant collègues et amis, il croit que le bon vieux recueil de papier demeure une façon d’assurer la postérité de l’oeuvre d’un auteur.
Il n’en demeure pas moins que l'autoproclamé Baron endosse sa génération millénaire à petites doses en publiant tantôt des poèmes, tantôt des vidéos de ses lectures poétiques sur ses réseaux sociaux. Ce n’est pas tant la poésie qui va passer par là que le quotidien, les petits émerveillements. Je vais raconter des histoires, par exemple. Mais j’aime le format d’Instagram parce que la '' story'' Instagram est éphémère. Donc, tu peux tester des choses, voir s’il y a une réaction
, explique-t-il. Les gens réagissent, ils vont trouver ça drôle, ils vont m’en parler plus tard, des fois plus que mes lectures de poésie dans les soirées.
C’est assez rare, au Québec, des poètes qui vont publier uniquement sur Instagram ou sur Facebook, alors que dans le monde anglophone, il y a Rupi Kaur qui a fait sa gloire avec ça, par exemple, et qui est maintenant l’une des poètes les plus lues dans le monde.
Pour être un poète en 2019, ça prend : Un téléphone! Parce que sur un téléphone, on peut écrire, un ''téléphone-carnet''. J’ai beaucoup d’amis qui lisent et qui vont sur scène avec leur téléphone dans les mains. [...] Ou bien un crayon et un papier. C’est tout ce que ça prend. Il faut juste savoir écrire!
À ceux qui veulent se lancer dans l'écriture, il dit : Envoye donc! Trouve de quoi tu veux parler, trouve une façon dont tu veux en parler. La poésie, elle appartient à tout le monde! [...] Il y en a qui vont dire que ça prend une connaissance de la poésie, moi, je ne suis pas d’accord. Ce n’est pas tant de savoir ce qui s’est fait [avant], mais savoir ce qui peut se faire et ce qu’on veut faire avec la poésie.
La poésie en 2019, c’est : #Diversifié
Tout le monde a sa voix. Tu peux autant avoir une poésie super douce et contemplative, comme Joséphine Bacon, et autant, d’un autre côté, tu as Simon Boulerice, ça va être super le fun! Il y a toutes sortes de plumes, d’écoles de pensée et de façons de voir la poésie qui s’appuient sur plusieurs traditions en poésie.

Sonia Lamontagne
Photo : Radio-Canada / Sophie Houle-Drapeau
Sonia Lamontagne, 33 ans
L’auteure a publié Comptine à rebours en 2015 et travaille présentement sur ses troisième et quatrième ouvrages. Originaire du Nord de l’Ontario, Sonia Lamontagne s’est récemment découvert un talent pour la poésie engagée en mettant sa plume au service d’un recueil de poésie de la résistance franco-ontarienne en réaction aux compressions du gouvernement de Doug Ford.
Je trouve que ça a donné un nouvel élan à la poésie. Ça nous a vraiment amenés à nous mobiliser, puis à retourner vers l’écriture, vers un outil d’expression collective.
Avant de publier un poème sur Facebook : Souvent, j’hésite avant de peser ''Publier'', donc c’est plus la peur de ce que les autres vont penser qui est un obstacle, parce que la plupart du temps, quand je publie, les réactions sont bonnes. [...] J’essaie de ne pas trop m’inquiéter avec ça et je me dis que tout le monde a son opinion. Les gens qui n’aiment pas ça ont le droit.
Les réseaux sociaux comme moyen de diffusion, c’est pertinent parce que : La poésie fait peur à beaucoup de monde. [...] Ça la met hors des murs de l’institution. Ça démystifie un peu ce que c’est, la poésie, dans le fond. C’est tellement malléable! C’est la vie, en fait. La poésie, c’est juste d’être à l’écoute de la vie, je trouve, puis en faisant ça, c’est qu’on parle à d’autres gens.
La poésie en 2019, c’est : #DonnerVoix
En toute authenticité, c’est presque une mise à nu, la poésie, aussi. Puis, si tu ne fais pas de mise à nu, je trouve que ça n’a pas autant d’impact. Si tu ne te montres pas tel que tu es dans ta poésie, les gens vont le sentir que ça ne vient pas du coeur, que ce n’est pas ton corps.

Le poète Alexandre Deschênes rédige d'abord ses poèmes sur Facebook avant de les intégrer à ses recueils.
Photo : Facebook d'Alexandre Deschênes /Crédit : La Fabrique culturelle
Alexandre Deschênes, 40 ans
Artiste derrière l’oeuvre Buckingham Palace (2017), publiée aux Éditions de l’Écrou, il attend patiemment la publication de son recueil En chaloupe dans l'crushed stone le 27 avril prochain.
Alexandre Deschênes est convaincu que la poésie est toujours aussi en vogue en 2019. Plus que jamais
, précise-t-il. La poésie transcende et est un reflet de son époque. [...] C’est quelque chose qui va toujours rester aussi, selon moi.
J’écris mes textes sur Facebook, puis, pour mes recueils, je m’en vais les rechercher par la suite.
Les réseaux sociaux comme moyen de diffusion, c’est pertinent parce que : C’est un réseau à utiliser où, au lieu d’avoir seulement des initiés qui vont lire, il y a des gens qui ne sont pas nécessairement habitués ou proches de la poésie qui vont voir un poème passer. [...] Comme ça, j’ai été chercher des gens qui, maintenant, vont à nos soirées. Leur première approche à la poésie, autre que le cégep, a été les médias sociaux.
À ceux qui veulent se lancer dans l'écriture, il dit : Go! Je pense que les jeunes, aujourd’hui, quand je lis la poésie qui se fait, ce n’est plus ce que c’était. On a tellement accès à beaucoup de choses, justement, par les médias sociaux, par le slam, par le rap. Il y a tellement une multitude de facettes à la poésie que les jeunes vont avoir une qualité tellement plus grande que celle que, nous, on avait quand on était jeunes, où on écrivait en alexandrins, parce que le seul rapport à la poésie qu’on avait, c’était Nelligan puis Baudelaire.
La poésie en 2019, c’est : #Steampunk
C’est comme ça que je l’approche. #Steampunk, parce que je suis loin d’être un anarchiste, mais on ne se met pas de barrières. Puis, je pense que c’est le plus gros danger de s’en mettre. Essayons, éclatons-nous, ayons du fun!