Le défi colossal de la reconstruction des Broncos 2.0

Une bannière a été hissée au-dessus de la patinoire au domicile des Broncos de Humboldt pour rendre hommage à toutes les personnes qui étaient à bord de l'autocar lors de la collision.
Photo : Radio-Canada / Adnan Mohamad
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La réponse à la question que personne n'osait poser est arrivée cinq semaines après la tragédie du 6 avril 2018 : les Broncos de Humboldt ont confirmé qu'ils allaient être de retour dès la saison suivante. L'organisation avait alors quatre mois pour trouver de nouveaux dirigeants, recruter une vingtaine de joueurs et se préparer à être sous les feux de la rampe au mois de septembre.
À la suite de cette annonce, saluée par la communauté de Humboldt et les proches des victimes, l’équipe a rapidement entrepris le processus de reconstruction en invitant 80 hockeyeurs à un camp de recrutement à Saskatoon. Elle a ensuite procédé à la sélection de 10 joueurs appartenant à d’autres formations de la Ligue de hockey junior de la Saskatchewan (SJHL). Cependant, pour différentes raisons, 9 de ces 10 joueurs ne sont pas restés avec l'équipe.
À ce moment, l'organisation n’avait pas encore d’entraîneur-chef. Tout a changé avec la nomination de Nathan Oystrick comme directeur général et entraîneur-chef en juillet 2018. Avec lui, l'équipe a misé sur la notoriété de cet ancien joueur de la Ligue nationale de hockey (LNH), qui possède cependant peu d'expérience dans des postes de direction.

Le nouvel entraîneur-chef des Broncos de Humboldt, Nathan Oystrick, donne des indications au jeune hockeyeur Derek Patter.
Photo : La Presse canadienne / Kayle Neis
L'entraîneur-chef faisait face à la lourde tâche de recruter une vingtaine de hockeyeurs avant le mois de septembre. Il a pu piger au sein des organisations des autres provinces, car toutes les équipes Junior A au Canada sont autorisées à procéder à des transactions entre elles.
C'est de cette façon que Nathan Oystrick a pu dénicher les pièces maîtresses de sa formation, comme le gardien Dane Dow ainsi que les attaquants Michael Clarke et Owen Guenter, tous âgés de 20 ans. Il a également ajouté dans ses rangs le défenseur de 18 ans Chase Felgueiras, qui pourrait d'ailleurs être repêché dans la LNH l'été prochain.
« J’étais à la fois super excité et très nerveux d’être échangé aux Broncos. Je savais que j’allais devoir bien représenter l’équipe, la communauté, mais surtout les gars qui étaient ici l’an dernier », confie Michael Clarke, qui a connu la meilleure saison de sa carrière junior à Humboldt.

Quitter l'Alberta pour Humboldt a souri à l'attaquant Michael Clarke. Avec les Broncos, il a connu sa meilleure saison junior.
Photo : Radio-Canada
Des 22 joueurs de la nouvelle formation de Nathan Oystrick, seulement 2 sont des survivants de la collision entre l’autocar des Broncos et un camion semi-remorque. Il s’agit de Derek Patter et Brayden Camrud, les seuls de l’équipe qui auront connu la version antérieure des Broncos, avant l'accident dans lequel 16 personnes sont mortes et 13 ont été blessés.
Un premier match émouvant
Le premier défi de reconstruire une équipe en quatre mois étant relevé, les Broncos 2.0 devaient ensuite faire leurs preuves sur la glace. Le 12 septembre 2018, près de 2000 spectateurs se sont réunis dans les gradins de l’aréna Elgar-Petersen, à Humboldt, pour le tout premier match officiel depuis la tragédie routière.
Les hommes de Nathan Oystrick accueillaient pour l’occasion les Hawks de Nipawin, l’équipe qui devait justement affronter les Broncos le soir du 6 avril 2018.
Avant la première mise au jeu, une cérémonie attendait les spectateurs. Le numéro de tous les joueurs qui étaient à bord de l’autocar a été retiré dans les hauteurs de l’amphithéâtre. D’autres bannières rendent également hommage aux deux entraîneurs, au statisticien, au chauffeur de l’autobus, à la thérapeute sportive de l’équipe ainsi qu’au descripteur de match, qui ont tous péri dans la collision.
Puis, tour à tour, les hockeyeurs de la saison 2018-2019 ont été présentés.
Un des moments les plus prenants de la cérémonie a été de voir huit des joueurs qui ont survécu à l’accident se rendre sur la patinoire, certains portant encore les marques physiques de l'accident.

De gauche à droite: Brayden Camrud, Derek Patter, Tyler Smith, Jacob Wasserman, Chris Beaudry, Graysen Cameron et Bryce Fiske.
Photo : La Presse canadienne / Jonathan Hayward
Ce sont finalement les Hawks de Nipawin qui sont sortis vainqueurs de cette rencontre pour le moins significative.
Néanmoins, les nouveaux Broncos de Humboldt ont connu un début de saison étincelant remportant 19 de leurs 27 premières joutes, ce qui leur a permis de trôner au sommet du classement général de la SJHL jusqu’à la fin du mois de novembre.

Les Broncos d'Humboldt après leur premier match depuis la tragédie
Photo : La Presse canadienne / Jonathan Hayward
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Nathan Oystrick démissionne
Après huit défaites en dix matchs, le 28 décembre, l’entraîneur-chef et directeur général Nathan Oystrick remet sa démission. Dans un message publié sur son compte Twitter, il évoque « le stress extrême et la pression constante » reliés à son poste.
Son adjoint, Scott Barney, a aussitôt hérité des fonctions par intérim. L’Ontarien Troy Smith est venu l’épauler derrière le banc.

Scott Barney a laissé sa femme et ses enfants en Ontario. S'il revient à Humboldt l'an prochain, sa famille va déménager en Saskatchewan.
Photo : Radio-Canada
Lorsqu’il est devenu le patron, Scott Barney n’avait pas l’intention de brasser la cage. « Je voulais seulement ramener une éthique de travail et le plaisir de venir à l’aréna. Certains joueurs l’avaient un peu perdu », a souligné celui qui en est à sa première expérience comme entraîneur.
« Au hockey, il est important de gérer les hauts et les bas, surtout au niveau junior. Parfois, les joueurs ont tendance à se concentrer sur les résultats, en oubliant le processus. Je leur rappelle qu’il est important de venir à l’aréna chaque jour pour travailler et s’améliorer. »
Je suis fier de mes gars.
Confondre les sceptiques
Au cours de l'été, il a été possible de lire, de voir et d’entendre des amateurs et des analystes prédire que les nouveaux Broncos de Humboldt allaient connaître une saison difficile.
Ces commentaires n'ont pas empêché Reagan Poncelet de faire de son mieux. Ce dernier a joué 21 matchs avec l'équipe lors de la saison 2017-2018. Cette année, le natif de Humboldt a obtenu une place régulière au sein de l'équipe. Il confirme que ses coéquipiers et lui étaient déterminés à faire taire les critiques.
Dès le début du camp d’entraînement, j’ai senti que notre groupe de gars était spécial.

Reagan Poncelet n'a pas oublié son premier but dans la SJHL. « C'était vraiment spécial de le marquer à Humboldt, devant ma famille et mes amis. »
Photo : Radio-Canada
« Les gens peuvent dire ce qu’ils veulent, mais le hockey se joue sur la glace. Ce ne sont pas des personnes individuelles qui gagnent des matchs, ce sont des équipes. Il n’y a pas un joueur plus important que l’autre. »
Quant à lui, l'attaquant Michael Clarke n’entendait pas venir à Humboldt pour vivre une année de reconstruction. Il avait d'autres projets pour son dernier tour de piste dans le hockey junior. « Nous sommes tous venus ici pour gagner. Nous ne faisons pas attention à ce qui se dit hors de notre vestiaire. Nous nous en fichons. »
Sept matchs en séries éliminatoires, mais pas de championnat
En s'inclinant en prolongation lors du septième duel dans leur série de deuxième tour contre les Bruins d'Estevan, les Broncos de Humboldt ont vu leur rêve de remporter le championnat prendre fin.
La saison 2018-2019 aura permis à l'équipe reconstruite de remporter 35 victoires en 58 matchs, pour terminer au sixième rang du classement général.
« Les gars se sont battus et nous ont rendus fiers », a-t-il été partagé sur la page Facebook de l'équipe après la défaite du 26 mars.