Les crimes ou incidents haineux seraient en baisse à Québec

Une voiture de police stationnée devant la mosquée de la Capitale, à Québec.
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Trois fois moins de crimes ou d'incidents haineux ont été rapportés à la police de Québec en 2018 par rapport à 2017. Des chiffres à interpréter avec une certaine prudence, selon le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence.
Plus précisément, 85 crimes ou incidents haineux avaient été rapportés à la police en 2017, année de la tuerie au Centre culturel islamique de Québec, le 29 janvier.
Pour 2018, leur nombre a chuté à 27, selon des données fournies par le Service de police de la Ville de Québec (SPVQ).
De ces crimes, 43 visaient la communauté musulmane en 2017, comparativement à 18 en 2018.
Selon ces chiffres, les musulmans demeurent le groupe le plus ciblé, avec 66 % des cas rapportés.
Sensibilisation
La police de Québec émet quelques hypothèses pour expliquer la baisse observée.
D'une part, la poussière pourrait être en train de retomber à la suite de l'attentat qui a fait six morts, des blessés graves et plusieurs victimes collatérales.
Selon le capitaine Dominic Gaudreau, le nombre de dénonciations du public pour des incidents haineux a augmenté dans les mois qui ont suivi la fusillade.
Par le fait même, les pratiques policières ont changé, dit-il, notamment parce que les dénonciations ont été plus nombreuses.
« On a été très fortement sensibilisés depuis [l'attaque de la mosquée]. [...] Ça a permis aux enquêteurs de voir ce qui pouvait être fait en amont et de ne pas attendre que survienne un crime », soutient M. Gaudreau.
Crimes et incidents rapportés au SPVQ
2016 : 58
2017 : 85
2018 : 27
Source : Service de police de la Ville de Québec
« Plusieurs cas de menaces sur Internet se sont aussi retrouvés devant les tribunaux, ce qui peut avoir découragé certains » de commettre des gestes, ajoute le capitaine Gaudreau comme piste de réflexion.
Certains de ces crimes ont en effet été médiatisés, et les auteurs, dévoilés au grand jour.
Ne pas « surinterpréter »
Les chiffres du SPVQ sont à interpréter avec prudence, prévient cependant le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence.
« Il faut toujours prendre les chiffres avec une dose de distance », insiste Benjamin Ducol, responsable de la recherche du Centre. « Il ne faut pas les surinterpréter. »
M. Ducol explique que « nous sommes dans les chiffres qui nous sont rapportés » par le public, ce qui implique une part de mystère quant au vrai nombre de crimes ou incidents commis. La grande question : combien ne sont pas dénoncés?
« On sait qu'il y a plusieurs facteurs qui vont influencer la volonté des gens [à dénoncer] », affirme M. Ducol, qui soutient qu'on ne peut donc pas faire une adéquation entre les données du SPVQ et la réalité.
Il concède que la baisse rapportée par le SPVQ « peut être réaliste ». Dans un tel cas de figure, il se rendrait à des arguments similaires à ceux avancés par les policiers, selon lesquels la population était plus sensible en 2017 après la tuerie.
« Sûrement parce que les gens, d'un point de vue traumatique, ont vécu l'attentat comme un choc », avance M. Ducol.
Cette sensibilité pourrait s'être estompée en 2018, selon lui, ce qui expliquerait une baisse des cas rapportés.
Avec les informations de Louise Boisvert