Le plan du SPVM pour combattre le profilage social et racial

Le directeur désigné du SPVM, Sylvain Caron, a présenté son plan stratégique de lutte contre le profilage racial en compagnie de Simonetta Barth, chef de cabinet du directeur du SPVM, Josée Blais, inspectrice en chef au service de l’administration, et Julie Rosa, conseillère à la direction des services corporatifs.
Photo : Radio-Canada / Benoit Chapdelaine
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a dévoilé mardi son plan pour enrayer le profilage racial et social.
Un texte de Yannick Donahue
Intitulé Écouter, comprendre, agir, le plan stratégique pour soutenir le personnel du SPVM en matière de prévention du profilage racial et social 2018-2021 a été présenté à la Commission sur la sécurité publique de la Ville de Montréal, lors d’une audience publique tenue à l’hôtel de ville. L’état-major du service de police était aux premiers rangs.
La publication de ce plan stratégique découle de la consultation publique sur la lutte contre le profilage social et racial, tenue en 2017 par la Commission de la sécurité publique.
D’entrée de jeu, le président de la Commission, Alex Norris, a souligné que 31 recommandations avaient été transmises à l’administration pour mesurer l’ampleur de la problématique, prévenir les comportements de profilage, faciliter la dénonciation des gestes problématiques, de même que viser la réconciliation et le rétablissement de la confiance et du respect des citoyens à l’égard des institutions municipales.
Des 31 mesures issues de la consultation publique de juin 2017, 12 touchaient spécifiquement le SPVM et se retrouvent dans le plan que nous vous présentons.

Simonetta Barth, chef de cabinet du directeur du SPVM.
Photo : Radio-Canada
Le plan vise à mettre en œuvre ces recommandations.
« Ce plan est d’abord et avant tout conçu pour nous assurer que la prestation de service de notre personnel est exempte de profilage racial et social. Du même coup, ce plan vise à soutenir les gestionnaires qui sont face à des comportements douteux ou inacceptables de la part de certains policiers. D’où le nom du plan stratégique Écouter, comprendre, agir », a déclaré Simonetta Barth, chef de cabinet du directeur du SPVM.
Elle souligne que le plan s’adresse aussi aux citoyens, ajoutant que les policiers du SPVM interagissent avec les citoyens plus d’un million de fois par année, notamment pour répondre aux appels du 911, faire appliquer le Code de la sécurité routière, lutter contre la criminalité et faire respecter les règlements municipaux.
Concrètement, le plan s'articule autour de quatre axes : actualiser les connaissances et les compétences des policiers, assurer l’inclusion et l’égalité de traitement, aviver la confiance et le respect de la population, et assurer la transparence des actions.
Le plan contient une série de 10 actions, par exemple établir les mécanismes permettant l’analyse des données d’interpellations, voir à ce que les mécanismes de gestion des ressources humaines favorisent l’ouverture à la diversité ou diffuser des contenus d’apprentissage assurant une prestation de services exempte de pratiques de profilage racial et social.
L’importance de la formation
L’information et la formation occupent des places de choix dans le plan stratégique du SPVM, qui a fait l’objet d’une diffusion à l’interne avant d’être remis au grand public.
« À ce jour, il a été présenté à tous les cadres policiers, et ceux-ci avaient la responsabilité de le transmettre à leur personnel dans chacune de leur unité », a dit Josée Blais, inspectrice en chef au service de l’administration du SPVM.

Josée Blais, inspectrice en chef au service de l’administration du SPVM.
Photo : Radio-Canada
Mme Blais souligne entre autres qu’une journée de formation est offerte aux policiers afin qu’ils saisissent mieux la réalité de certaines communautés ou de groupes de citoyens, comme les Autochtones, les itinérants et les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale.
À ce jour, plus de 1000 policiers depuis mai 2018 ont reçu cette journée de formation et nous comptons en 2020 que l’ensemble des policiers puissent avoir cette sensibilité à certaines réalités de nos citoyens.
L’inspectrice en chef indique que des outils sont disponibles pour les cadres afin de les guider lors de possibles situations de profilage.
« Nous assurons que les gestionnaires […] puissent avoir des mécanismes de suivi quand il est nécessaire de recadrer des policiers selon l’information, les indicateurs qu’ils reçoivent », affirme-t-elle.
Elle précise : « Nous avons notamment un guide d’accompagnement des comportements à risque. Une fiche spécifique qui est liée au profilage racial y est introduite, pour que la façon de recadrer ou d’accompagner ou de soutenir nos employés [soit] uniforme à travers l’organisation ».
Des questions du public
Le chef du SPVM, Sylvain Caron, s'est fait demander par un citoyen s’il envisageait de réduire la « surveillance abusive de certaines populations » à Montréal.
« Le SPVM s’inscrit dans une démarche de transparence, et la préoccupation du profilage racial est une préoccupation constante et qui est non tolérée dans notre organisation. Parfois, des gestes posés par nos policiers peuvent être perçus comme étant du profilage ou [être] interprétés également comme une protection de la sécurité des citoyens. Alors, la ligne est mince entre la perception d’un profilage et l’application d’un règlement quelconque », a-t-il répondu.

Sylvain Caron, directeur désigné du SPVM.
Photo : Radio-Canada
Un autre citoyen a demandé comment ces principes allaient se manifester de façon concrète.
« La formation Pouvoir et devoir fait en sorte qu’on applique la justice procédurale indépendamment de la personne qui est devant nous. Quand nous faisons notre action policière, on doit s’assurer que la procédure est la même pour tout le monde. C’est pour cela que, si les policiers appliquent la loi en ayant une sensibilité humaine face au citoyen qui est devant eux, c’est une façon de contrer le profilage racial », a répondu Mme Blais.
Un Montréalais a critiqué le processus de plaintes pour les citoyens victimes de discrimination policière, jugeant irréaliste la nécessité pour eux de se rendre au poste de quartier pour y déposer une plainte contre un de ses employés. Il demande au SPVM de modifier le processus pour faciliter le dépôt de plaintes.
Josée Blais a rétorqué qu’il existe plusieurs façons de porter plainte, y compris celle d’aller rencontrer un agent au poste de quartier. La présumée victime pourrait également porter plainte directement en déontologie policière ou au tribunal des droits de la personne.
« La commission de déontologie du Québec s’applique à l’ensemble des policiers du Québec. C’est une institution qui est assez bien instaurée un peu partout dans la province. Il n’est pas prévu de mécanismes additionnels au moment où on se parle. La seule chose à laquelle je me suis engagé le 9 novembre dernier c’est en 2019, sur une année, la révision du règlement de discipline du service de police », a ajouté le chef Sylvain Caron.
Tolérance zéro

Le président de la Commission sur la sécurité publique de la Ville de Montréal, Alex Norris.
Photo : Radio-Canada
Au sortir de la salle d’audience, le président de la Commission sur la sécurité publique de la Ville de Montréal, Alex Norris, semblait satisfait de la présentation du SPVM.
« Je suis très heureux des mesures qui ont été annoncées aujourd’hui par le SPVM. C’est le fruit d’un long dialogue entre le public et les élus, entre les élus et les services, dont le SPVM. On a eu beaucoup de discussions. On a poussé très fort pour avoir des mesures costaudes et je crois qu’on les a obtenues », a-t-il commenté.
Alex Norris estime que la position de la Ville de Montréal au sujet du profilage social et racial a été clairement entendue.
« Le message est déjà passé qu’il y a tolérance zéro pour le profilage racial dans l’administration de Montréal et au sein du SPVM. On reconnaît que c’est un phénomène présent dans tous les services de police dans toutes les grandes villes en Amérique du Nord et ailleurs. Ce n’est pas unique à Montréal. L’objectif c’est d’avoir des politiques costaudes qui vont empêcher, qui vont prévenir ce phénomène », a-t-il affirmé.