Stages rémunérés : le mouvement de grève étudiante gagne Québec

Des étudiants au département de physique de l'Université Laval ont manifesté ce matin.
Photo : Radio-Canada / Pascal Poinlane
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Des centaines d'étudiants du collégial et d'universités de la région de Québec sont en grève aujourd'hui pour réclamer la rémunération de tous les stages. Ils promettent de poursuivre la mobilisation aussi longtemps que nécessaire et n'excluent pas de déclencher une grève générale illimitée à l'hiver.
Un texte de Louis Gagné
Emma, une étudiante de première année en soins infirmiers au Cégep Limoilou, juge inadmissible que les stages en milieu hospitalier ne soient pas rémunérés. Tout travail mérite salaire, soutient-elle.
« Ça représente des centaines d’heures. Durant la dernière année du programme, on a trois jours de stage par semaine. C’est beaucoup de travail qu’on fait de façon bénévole et ça ne paie pas le loyer », fait-elle valoir.
La cégépienne explique que les étudiants qui ne sont pas indépendants de fortune ont besoin de travailler en dehors de leur stage. Au bout du compte, ce sont des heures en moins qu’elle et ses camarades de classe consacrent à leur formation.
En fait, c’est les gens qui paient le prix parce que nous, on ne peut pas mettre autant de temps qu’on voudrait dans nos études parce que nous ne sommes pas rémunérés.
Selon les Comités unitaires sur le travail étudiant, plus de 55 000 étudiants et stagiaires à travers le Québec vont débrayer aujourd’hui.
Ils demandent au gouvernement de « garantir le plein salaire et des conditions de travail convenables » pour l’ensemble des étudiants en situation de stage, et ce, dans tout le système d’éducation.

Des étudiantes dénoncent que certaines stages soient non rémunérés.
Photo : Radio-Canada / Ariane Perron-Langlois
Discriminatoire envers les femmes?
La coalition étudiante observe que les stages non rémunérés sont concentrés dans les programmes d’études historiquement et majoritairement féminins.
À l’inverse, les stages offrant un salaire concernent souvent des secteurs à prédominance masculine, comme la gestion et le génie.
« Les entreprises reçoivent des subventions et des crédits d’impôt du gouvernement pour payer les stagiaires, tandis que nous, on n’est pas payées », déplore Emma.
Statistiquement, c’est 74 % des stages majoritairement féminins qui sont non rémunérés. Donc, c’est encore un manque d’égalité au travail.
Mandats de grève
À Québec, la plupart des associations étudiantes qui prennent part à la mobilisation ne tiendront qu'une seule journée de grève.
Le Regroupement des étudiantes et étudiants en sociologie de l’Université Laval (RESUL) fait bande à part. Ses quelque 200 membres ont voté une grève de 3 jours qui a débuté hier.
Au moins cinq autres associations étudiantes lavalloises (anthropologie, histoire, philosophie, physique, théâtre) ont prévu débrayer aujourd’hui.
Associations étudiantes et programmes en grève à Québec :
Cégep Limoilou
- Techniques en soins infirmiers
Université Laval
- Association des étudiants et étudiantes en anthropologie
- Association des étudiants et étudiantes en physique
- Association générale des étudiants et étudiantes prégradué(e)s en philosophie
- Regroupement des étudiantes et étudiants en sociologie
- Association générale des étudiantes et étudiants en théâtre
- Association des étudiantes et étudiants en histoire
Solidarité
Les étudiants qui prennent part à la mobilisation ne sont pas tous inscrits dans des programmes offrant des stages. Ils souhaitent néanmoins afficher leur appui à la cause des stages rémunérés.
C’est le cas des membres de l’Association des étudiantes et étudiants en histoire de l'Université Laval, qui ont voté pour la grève mardi.
Le responsable de l’association, Rémi Duchesne, précise que certains de ses collègues pourraient éventuellement être concernés par cet enjeu, notamment ceux qui se dirigeront vers un programme d’enseignement au terme de leur baccalauréat.
Le mouvement s’étend également au collégial. Les étudiants en soins infirmiers du Cégep Limoilou se sont prononcés à 91,6 % en faveur de la grève.

Le ministre de québécois de l’Éducation Jean-François Roberge.
Photo : Radio-Canada
Prématuré, selon le ministre
Le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, Jean-François Roberge, assure être à l’écoute des préoccupations soulevées par les étudiants.
Selon lui, il est prématuré d’entamer des moyens de pression étant donné que son gouvernement n’a pas encore fini d’étudier la question.
« Les étudiants sont un peu en train de défoncer des portes ouvertes en ce moment. Nous sommes au travail pour faire un état de la situation et ensuite mettre des choses sur la table, puis on discutera avec les associations étudiantes », a déclaré M. Roberge lundi.
Les étudiants préviennent toutefois que le ministre devra répondre à leurs attentes, sans quoi ils pourraient accentuer leurs moyens de pression.
« On espère que ça va continuer dans cette direction-là, mais tant que le sujet ne sera pas réglé, les mobilisations et les actions vont continuer, c’est bien évident », affirme Emma.