Les aides familiales migrantes se mobilisent contre la précarité

Aimee Beboso (à gauche) entourée de Milanio Napolitano (deuxième à partir de la droite) et ses deux enfants, arrivés au Canada il y a cinq mois.
Photo : Radio-Canada / Dominique Degré
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Contrats de travail restrictifs, séparation familiale, précarité d'emploi... Dans un rapport lancé dimanche, des organisations représentant des aides familiales migrantes de plusieurs grandes villes au pays dénoncent conjointement les conditions de travail difficiles réservées aux femmes qui veulent travailler au Canada.
Un texte de Dominique Degré
Une dizaine de femmes philippines assistaient à une réunion dans une petite salle communautaire du centre-ville d’Ottawa, dimanche. Le ton des conversations y était convivial et léger, même si les sujets, eux, n’avaient rien d’agréable.
Exploitation et obstacles bureaucratiques pour l’obtention de la résidence permanente ne sont que quelques-unes des préoccupations soulevées par ces femmes venues de loin pour se façonner une vie meilleure.
Ce que nous avons vu, c’est que des travailleurs avec des statuts temporaires sont vulnérables aux abus. Quand le statut des gens est limité, ce n’est pas surprenant de voir que les gens ont des droits limités
, souligne la présidente de l’organisme Migrante Ottawa, Aimee Beboso.
Aujourd’hui, il y a beaucoup d’attaques envers les immigrants et encore plus envers les migrants temporaires.
L’atelier visait à renseigner les participantes sur leurs droits en tant que travailleuses et sur les façons de les faire respecter par leur employeur. C’est pour cette raison que Milanio Napolitano était de la partie.
Mon expérience de travail avec mon premier employeur s’est mal déroulée. Je travaillais techniquement vingt-quatre heures sur vingt-quatre [pour m’occuper des enfants] mais je n’étais rémunérée que pour neuf heures de travail
, relate-t-elle.
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Un programme à revoir
Le regroupement que représente Mme Beboso fait partie de ceux qui revendiquent que le gouvernement fédéral fasse une refonte en profondeur de son Programme des aides familiaux résidants pour accorder automatiquement le statut d’immigrant reçu aux travailleuses.
Une telle révision pourrait aussi accélérer la réunification des familles, un autre problème de taille éprouvé par les femmes qui viennent travailler dans les foyers canadiens.
Milanio Napolitano est au Canada depuis quatre ans et demi, mais ses deux enfants n’ont pu la rejoindre qu’il y a cinq mois à peine. Ça a été très difficile pour moi, j’ai perdu de vue mes enfants quand ma fille avait quatre ans et mon fils en avait trois ans. J’ai travaillé loin d’eux pendant trois ans avant de venir au Canada
, raconte la femme de trente-six ans.
Il faut un changement fondamental qui fera en sorte que les droits des travailleurs seront respectés, peu importe leur statut.
Le programme qui régit actuellement les aides familiales est entré en vigueur en novembre 2014 et arrivera à échéance en novembre 2019. Malgré tous les reproches faits à l’endroit de ce programme, c’est l’absence de détails sur un programme de remplacement qui suscite l’inquiétude chez Mme Beboso.
Nous ne savons pas s’il y aura un programme, et quel genre de critères ou de changements il y aura après la fin du Programme des aides familiaux résidants. C’est ce qui préoccupe beaucoup les travailleuses : on ne sait pas ce qui va venir ensuite
, explique Mme Beboso, qui a participé a une consultation pour un éventuel programme de remplacement, mais qui n’a eu aucune mise à jour sur le projet depuis plusieurs mois.
En 2017, 22 253 aides familiales ont été admis à titre de résidents permanents, selon les dernières statistiques du gouvernement canadien.
Revendications du rapport lancé dimanche :
- Les nouvelles exigences éducatives devraient être supprimées. Présentement, les aides familiales doivent avoir complété une année d’éducation postsecondaire au Canada pour pouvoir demander le statut de résident permanent. Cependant, leur employeur ne leur donne souvent pas le droit ni le temps d’aller à l’école pendant leur travail.
- Les aides familiales devraient pouvoir faire application pour le statut de résidence permanente après un an, et non deux comme c'est le cas avec le programme actuel.
- L’accumulation de dossiers d’applications pour la résidence permanente doit être rectifiée. Des milliers d’aides familiales attendraient depuis plus de dix ans pour la réunification familiale.
- Les membres de la famille de l'aide familiale devraient pouvoir venir au Canada à travers des visas de travail ouverts et des permis d’éducation.