Une sénatrice métisse appelle à l'action contre la stérilisation forcée de femmes autochtones

Yvonne Boyer, avocate métisse et ancienne infirmière, aujourd'hui sénatrice de l'Ontario.
Photo : La Presse canadienne / Adrian Wyld
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Une nouvelle étude montre que la stérilisation forcée de femmes autochtones n'est pas seulement une partie honteuse de l'histoire canadienne, mais qu'elle a encore cours en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba, en Ontario et dans les territoires. La sénatrice Yvonne Boyer veut mettre la question en lumière au niveau national.
Yvonne Boyer, avocate métisse et ancienne infirmière, aujourd'hui sénatrice de l'Ontario, a souligné que la ligature des trompes menée sans le consentement d'une patiente autochtone demeurait l'une des pratiques les plus odieuses en matière de soins de santé au Canada.
En 2017, Mme Boyer a été contactée par Liz, une adolescente qui lui a demandé de taire son nom de famille. Liz avait pris connaissance d'un article détaillant la recherche qu’Yvonne Boyer avait produite avec la chercheuse et médecin métisse Judith Bartlett.
Leur rapport expliquait comment les femmes autochtones avaient été contraintes à la ligature des trompes après un accouchement à Saskatoon. Durant cette opération, les extrémités des trompes sont sectionnées, scellées ou brûlées pour empêcher le transport des ovules vers l'utérus et empêchant ainsi la fécondation.
À l'âge de 17 ans, Liz a été forcée par un travailleur de l'aide à l'enfance à subir un avortement et à se faire stériliser dans un hôpital du nord-ouest de l'Ontario, affirme-t-elle, une expérience qui la hante encore après 40 ans.
Elle a soutenu que le travailleur en santé lui avait signifié que même si elle refusait de se faire avorter, « de toute façon, [ils allaient] prendre [son] enfant ».
Mme Boyer souhaite maintenant que le Sénat étudie l'étendue de la question à l'échelle nationale.
« Si cela s'est passé à Saskatoon, ça s'est passé aussi à Regina, à Winnipeg, où il y a une forte population de femmes autochtones », a fait valoir Mme Boyer en entrevue. « Beaucoup de femmes à travers le pays m'ont contactée et m'ont demandé de l'aide. »
Action collective
Certaines femmes autochtones interviewées pour le rapport se sont également senties poussées à signer les formulaires de consentement pour les procédures, alors qu'elles étaient en travail actif ou sur une table d'opération, a dit Mme Boyer, soulignant qu'une action collective contre l'agence régionale de la santé de Saskatoon avait été lancée en 2017 par deux des femmes touchées.
Chacune réclamait 7 millions de dollars en dommages et intérêts. Aujourd'hui, environ 60 femmes font partie de l'action collective, a-t-elle indiqué.
Alisa Lombard, une associée de Maurice Law, le cabinet orchestrant l'action collective, a souligné que des femmes de l'extérieur de la région de Saskatoon avaient également déclaré avoir été stérilisées sans leur consentement éclairé et approprié.
Elle dit avoir eu des informations d'autres femmes autochtones en Saskatchewan, de même qu'au Manitoba, en Ontario et en Alberta.
L'étude et certains dossiers montrent aussi que la pratique était répandue dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, a-t-elle ajouté.
Mme Lombard a indiqué que son bureau soulèvera le problème des stérilisations forcées de femmes autochtones devant le Comité des Nations unies contre la torture ce mois-ci.
Réaction de la ministre

La ministre des Services aux Autochtones Canada, Jane Philpott,a présenté le 23 janvier 2018 ses priorités pour les années à venir.
Photo : The Canadian Press / Adrian Wyld
Selon la ministre des Services aux Autochtones, Jane Philpott, le Canada doit veiller à ce que la pratique cesse, par des politiques, par l'éducation et par la sensibilisation.
« La question de la stérilisation forcée de personnes vulnérables, y compris des femmes autochtones, constitue une très grave violation des droits de la personne », a-t-elle affirmé, soulignant que cette situation avait cours au Canada depuis longtemps.
La ministre a également qualifié ce qui est arrivé à Liz d'« absolument effroyable et répréhensible ».