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Le pardon facilité dans les cas de possession simple de cannabis

Deux joints avec une extrémité brûlée.

Deux joints dans du papier aux couleurs du drapeau canadien.

Photo : La Presse canadienne / Christopher Katsarov

Radio-Canada

Les Canadiens qui ont déjà été condamnés pour possession simple de cannabis et qui ont purgé leur peine pourront bientôt obtenir un pardon, a promis mercredi le gouvernement Trudeau. Un projet de loi encadrant un processus « simplifié » sera déposé à la Chambre des communes cet automne.

« À partir d'aujourd'hui, nous avons un nouveau régime dans lequel la possession simple de marijuana n'est plus illégale. Alors nous proposons un processus pour obtenir un pardon qui sera simplifié et qui sera gratuit pour les gens qui ont un dossier criminel pour possession simple de cannabis », a confirmé le premier ministre Justin Trudeau.

Les jeunes et les gens issus de minorités ethniques ou de collectivités raciales sont représentés de façon « disproportionnée » parmi ces condamnés, a poursuivi M. Trudeau, et cela constitue un « défi supplémentaire » qu'ils doivent surmonter lorsqu'ils cherchent un emploi.

Cela va faire une différence pour les gens qui ont subi les conséquences injustes du régime précédent.

Une citation de Justin Trudeau, premier ministre du Canada

Quelques minutes avant les commentaires du premier ministre, le ministre canadien de la Sécurité publique Ralph Goodale avait confirmé le dépôt d'un projet de loi à ce sujet cet automne lors d'une conférence de presse marquant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi légalisant le cannabis.

Cannabis : les effets de la légalisation

Consulter le dossier complet

La feuille d'érable du drapeau canadien est remplacée par un plant de cannabis, avec en arrière-plan, l'édifice principal du gouvernement fédéral.

Les Canadiens condamnés pour possession simple de cannabis pourront présenter une demande aussitôt qu'ils auront purgé leur peine, et ils n’auront pas à engager de frais pour leur démarche, a-t-il précisé. Selon lui, le processus « sera aussi simple que possible. »

J'ai dit à plusieurs reprises que je ne suis pas un consommateur de drogue. Je ne bois pas beaucoup d'alcool, je ne bois pas de café. Je n'ai aucune intention de consommer de la marijuana.

Une citation de Justin Trudeau, premier ministre du Canada
« Le cannabis au Canada », peut-on lire sur un écran situé près de la table devant laquelle sont assis les quatre ministres participant à la conférence de presse.

De gauche à droite, les ministres fédéraux Ralph Goodale, Ginette Petitpas-Taylor, Jody Wilson-Raybould et Bill Blair.

Photo : La Presse canadienne / Adrian Wyld

Jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, une personne arrêtée en possession de cannabis à des fins personnelles pouvait écoper d'une amende allant jusqu'à 1000 $ et d'une peine de six mois de prison.

Près de 500 000 Canadiens potentiellement touchés

Selon des données fédérales, près d'un demi-million de Canadiens ont déjà été condamnés pour possession simple de cannabis. À l'heure actuelle, ils doivent attendre quelques années après avoir purgé leur peine pour demander un pardon, et cette procédure coûte 631 $.

Les gens qui ont obtenu un dossier criminel pour possession simple de cannabis devraient pouvoir se débarrasser du fardeau et de la honte associés à ce dossier.

Une citation de Ralph Goodale, ministre de la Sécurité publique

Le ministre de la Sécurité publique a aussi fait valoir que ces pardons permettront d’éliminer les conséquences néfastes encourues par les Canadiens déjà condamnés pour ce qui n'est plus considéré comme un crime à compter d'aujourd'hui. Cela inclut leur capacité à se trouver un emploi, à louer un logement ou même à participer aux activités de certaines organisations caritatives.

M. Goodale a précisé qu’Ottawa aura besoin de la collaboration des provinces dans ce dossier, puisqu’une partie du travail administratif nécessaire à l'obtention d'un pardon leur incombera.

Interrogé sur les raisons qui ont poussé le gouvernement fédéral à ne pas opter pour une amnistie générale, M. Goodale a expliqué que les citoyens condamnés pour possession simple de cannabis n'ont tout simplement pas subi une injustice sociale historique.

Les Canadiens qui été condamnés dans le passé pour des relations homosexuelles consentantes ont par exemple obtenu le droit de réclamer une radiation de leur dossier criminel, parce que leurs droits et libertés fondamentales ont été brimés, ce qui n'est pas le cas des consommateurs de cannabis.

Sa collègue à la Justice Jody Wilson-Raybould, aussi présente à la conférence de presse, a pour sa part rappelé qu'Ottawa ne donne aucune consigne au sujet des causes qui sont toujours devant les tribunaux. Cette prérogative appartient au Service des poursuites pénales du Canada.

La mesure du succès : une baisse de la consommation

La ministre fédérale de la Santé, Ginette Petitpas-Taylor, a pour sa part réitéré les objectifs de la nouvelle loi sur le cannabis énoncés par le gouvernement Trudeau.

Il s'agit de mettre un terme à une approche répressive qui n'a jamais fonctionné, en s'assurant que les jeunes n'ont pas accès au cannabis, que les adultes peuvent se procurer une substance contrôlée et réglementée, et que le tout prive le crime organisé de juteux profits.

Le ministre de la Sécurité frontalière et de la Réduction du crime organisé, Bill Blair, a d'ailleurs dit espérer que la vente légale de cannabis réduise de moitié les profits des groupes criminels qui en contrôlaient jusqu'ici la production et la distribution. Selon lui, il s'agissait d'un marché de 8 milliards de dollars par année.

Si on parvient à prendre la moitié de ce marché dans une année, est-ce que ce sera assez? Laissez-moi vous dire, j'ai combattu le crime organisé toute ma carrière [...], enlever 4 milliards par année des poches du crime organisé est une bonne année de travail.

Une citation de Bill Blair, ministre de la Sécurité frontalière et de la Réduction du crime organisé

Selon Mme Petitpas-Taylor, le gouvernement est prêt à mener une « transition ordonnée » vers ce nouveau régime juridique, qui s'accompagne de campagnes d'éducation et de sensibilisation auprès du public, et il surveillera les répercussions de la nouvelle loi.

Le succès de la nouvelle approche gouvernementale, a-t-elle affirmé, sera mesuré en fonction d'une baisse espérée de la consommation de cannabis.

Ma priorité va être de m’assurer qu’il va y avoir un déclin dans le taux de consommation auprès des jeunes. C’est finalement ça qui serait une définition de succès pour moi.

Une citation de Ginette Petitpas-Taylor, ministre fédérale de la Santé

Elle a par ailleurs répété que Santé Canada se donne un an pour encadrer la vente de produits comestibles à base de cannabis.

Il faut effacer les dossiers criminels, soutient le NPD

Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh réaffirme pour sa part que la légalisation du cannabis est « quelque chose de bon » pour les Canadiens. Il dénonce cependant le plan annoncé par le gouvernement Trudeau pour offrir un pardon aux citoyens déjà condamnés pour possession simple de cannabis.

« Je suis déçu que le ministre de la Sécurité publique ait dit que ce n'est pas une injustice historique. Moi, je ne suis pas d'accord. Je pense que oui, c'est une injustice historique », a-t-il fait valoir avant la période des questions à la Chambre des communes.

M. Singh a illustré son point de vue en expliquant, à l'instar de Justin Trudeau, que les communautés marginalisées ou racisées et les Autochtones ont été condamnées de façon disproportionnée pour ce crime aujourd'hui caduc. À Regina, en Saskatchewan, les Autochtones comptent pour 40 % des condamnations, même s'ils ne forment que 10 % de la population, a-t-il souligné.

« Donc, il faut immédiatement effacer le dossier judiciaire de ces gens », a-t-il conclu. Selon lui, un pardon n'a tout simplement « aucun impact sur [la] capacité à voyager » des gens qui le recevront.

Le chef néo-démocrate affirme aussi qu'il est « inacceptable » que le gouvernement n'intervienne pas pour que les dossiers de possession simple de cannabis actuellement devant les tribunaux soient tout simplement abandonnés.

Lors de la période de questions aux Communes, les députés néo-démocrates Guy Caron et Matthew Dubé sont revenus à la charge pour presser le gouvernement d'effacer le dossier judiciaire des gens condamnés pour possession simple de cannabis, mais en vain; le premier ministre Trudeau a soutenu qu'offrir des pardons constituait une réponse « appropriée ».

Position attentiste du chef conservateur

Le chef conservateur Andrew Scheer n'a pas voulu s'avancer sur cette question. « On va examiner le projet de loi et on va déterminer notre position », a-t-il laissé tomber. Il s'est contenté de souligner que l'approche fédérale ne devait pas « annuler » les condamnations de citoyens ayant commis d'autres crimes que la possession simple de cannabis.

Il n'a pas voulu dire s'il entend faire campagne sur l'enjeu du cannabis lors de la prochaine élection générale l'automne prochain. « On va proposer des changements au régime en fonction des commentaires que nous recevrons », s'est-il contenté de dire.

M. Scheer a toutefois prophétisé que la population pourra constater à partir d'aujourd'hui les conséquences néfastes de la légalisation du cannabis. Le gouvernement a mis son projet à exécution trop rapidement et « a ignoré les inquiétudes des experts en santé, des policiers et des gouvernements provinciaux ».

Plus tôt en matinée, le député conservateur de Charlesbourg-Haute-Saint-Charles, Pierre Paul-Hus, avait aussi pourfendu l’empressement et l’improvisation dont a fait preuve, à ses yeux, le gouvernement Trudeau dans ce dossier.

« Ce processus a été réalisé à la hâte pour des raisons purement politiques dans le but de respecter une échéance qu’il a lui-même proposée », a-t-il dénoncé.

Justin Trudeau ne peut pas expliquer comment son plan bâclé atteindra l’objectif annoncé de garder la marijuana loin des enfants et d’enlever aux organisations criminelles les profits découlant du trafic de drogue.

Une citation de Pierre Paul-Hus, député conservateur de Charlesbourg-Haute-Saint-Charles

Les conservateurs affirment en outre que l'approche libérale laisse de nombreux Canadiens face à des règles mal définies, en particulier ceux qui veulent traverser la frontière canado-américaine.

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