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Les aînés, grands oubliés de cette campagne électorale?

Des aînés dans une résidence de Trois-Rivières.

Des aînés dans une résidence de Trois-Rivières

Photo : Radio-Canada

Radio-Canada

Les partis politiques font-ils tout pour convaincre les personnes âgées de voter pour eux dans cette élection au Québec? Certains aînés se sentent mis de côté dans cette campagne.

Un texte de Frédéric Arnould

Dans sa maison de retraite située à Trois-Rivières, la ville où la moyenne d'âge est la plus élevée au Québec, Marcel Marchand, 82 ans, s'estime privilégié de pouvoir passer ses jours heureux dans un endroit confortable où les services abondent. En ce vendredi matin, il participe à une petite fête où quelques pensionnaires se balancent au son du piano qui résonne dans le lobby de la maison de retraite.

Marcel Marchand regarde la caméra.

Ferblantier de métier, Marcel Marchand est à la retraite depuis 24 ans.

Photo : Radio-Canada

Cela fait 24 ans que le ferblantier a pris sa retraite. Aujourd'hui, la presque totalité de sa pension et les économies qu'il avait accumulées au sein d'un REER servent à payer le montant mensuel dû à la résidence pour sa place et celle de sa femme, qui a besoin de soins additionnels.

Élections Québec 2018

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Assis dans un des fauteuils du salon qui donne sur une rue commerciale de Trois-Rivières, il songe à l'une des revendications politiques pour les aînés. « Que les personnes aient de l'aide à la maison, parce que si moi et mon épouse on avait eu de l'aide à la maison, on ne serait pas ici. On serait encore chez nous et on vivrait bien, très bien »

Population vieillissante

Depuis 2011, les 65 ans ou plus sont plus nombreux que les personnes de 0 à 14 ans au Québec. Et cette tendance au vieillissement de la population va s'accentuer d'ici 2061. Pas étonnant que le Québec soit dans le trio de tête des sociétés qui vieillissent le plus rapidement, juste derrière le Japon et la Corée du Sud.

Des futurs retraités pris au dépourvu

Que ce soit sur le sujet de la santé, des services sociaux, de l'économie, des loisirs ou du logement, ces aînés en ont long à dire sur ce que devrait faire le prochain gouvernement pour répondre aux besoins des baby-boomers qui sont à l'aube de la retraite ou qui y ont plongé depuis quelques années.

Dans son animalerie, Marie-Claire Côté.

Pour Marie-Claire Côté, 64 ans, la retraite n'est pas encore une possibilité.

Photo : Radio-Canada

Propriétaire d'une animalerie à Trois-Rivières, Marie-Claire Côté, 64 ans, gère l'entreprise avec sa fille Kathy. À son âge, certains pensent plutôt à prendre leur retraite, mais pour elle, la retraite est un luxe inaccessible. « C'est impossible, si tu veux un loyer qui est décent, payer [les frais liés à] ton auto. Il y a trois ans, je pense que j'ai pris une semaine de congé, mais ça m'inquiétait. » Elle se disait que sa fille ne pouvait pas effectuer tous les quarts de travail pendant cinq jours de suite.

Pour que son entreprise garde la tête hors de l'eau financièrement, elle se donne une rémunération qui est bien en deçà de ce qu'elle gagnerait si toutes ses heures travaillées étaient payées au salaire minimum.

Maire-Claire Côté pensait pouvoir vivre sa retraite grâce à la revente de son fonds de commerce, mais aujourd'hui, elle déchante, car elle devrait verser environ la moitié au gouvernement comme gains en capital. « Je les ai payées, leurs taxes, à tous les mois; on leur a payé tout ce qu'on leur devait. Là, ce que tu as à toi, ce qu'on a augmenté au fil des années, eh bien il faut encore que tu leur en redonnes la moitié, je trouve ça assez aberrant. On peut pas dire que c'est du vol, mais dans ma tête, ça ressemble à ça. »

Son mari Jean-Yves, qui a œuvré pendant 35 ans dans le milieu des assurances, continue aussi de travailler pour pouvoir payer toutes les dépenses familiales. Augmenter la pension minimale payée par le gouvernement serait un timide début selon lui. « Je trouve que quelqu'un qui est rendu à un âge respectable, à 65 ans et plus, on devrait au moins doubler la rente. Si tu as 600 $ et que tu doubles, ça fait rien que 1200 $ par mois. »

Retourner au travail après la retraite

La situation du couple Côté n'est pas unique. En fait, elle ressemble aussi à celle de salariés qui ont travaillé toute leur vie, mais qui peinent à joindre les deux bouts.

À 68 ans, Diane Neveu se retrouve sur les bancs du Centre de recherche d'emploi de la Mauricie pour réapprendre la façon de postuler à un emploi et pour bien se vendre à un éventuel employeur. Il y a quelques années, elle a été licenciée à la suite d'une restructuration. Les premières années, elle a réussi à vivoter avec son conjoint grâce à son chèque de pension. Mais face à l'ennui, au besoin d'être en société, elle a décidé de retourner sur le marché du travail pour aller chercher un revenu supplémentaire devenu nécessaire à cause du coût de la vie.

Cinq femmes autour d'une table.

Un atelier du Centre de recherche d'emploi de la Mauricie

Photo : Radio-Canada

« Les gens ont beau dire : "on va changer notre qualité de vie parce qu'on est à la retraite", mais automatiquement tout s'ensuit, les factures rentrent quand même », ajoute Mme Neveu.

Son cas est loin d'être rare, selon Diane Cossette, directrice générale du Centre de recherche d'emploi de la Mauricie. Elle observe depuis quelques années une augmentation de l'âge moyen de la clientèle qui fréquente son organisme. Les gens, précise Mme Cossette, doivent prolonger leur vie active sur le marché du travail ou interrompre leur retraite « pour arriver financièrement à avoir de meilleurs revenus ».

Diane Neveu et Marie-Claire Côté sont les premières à reconnaître que l'épargne n'a pas vraiment été à l'ordre du jour lors de leur vie active. « Il y a des travailleurs qui ont été à petits revenus toute leur vie, donc d'épargner, de mettre des sous de côté, c'est pas toujours évident et possible », souligne Diane Cossette.

Le reportage de Frédéric Arnould est présenté ce soir au Téléjournal dès 21 h à ICI RDI et 22 h à ICI Radio-Canada Télé.

Les mêmes revendications

Manque d'argent pour vivre, difficulté de prendre sa retraite, les personnes âgées ne sont donc pas un bloc d'électeurs monolithique. Il est donc difficile pour les partis politiques de rejoindre l'ensemble de cette clientèle d'électeurs. Mais ce qui unit ces trois personnes, aux parcours très différents, c'est assurément un besoin de coussin financier qu'elles n'ont pas réussi à accumuler.

« Ma sœur, elle travaille encore. Elle a 72 ans, explique Marie-Claire Côté. On a plein d'amis qu'on connaît qui travaillent. Il y en a qui aime ça, mais quand même à 80 ans, quand tu vends encore de l'assurance, c'est sûr qu'il y a des besoins. » Elle plaide pour des hausses plus marquées des prestations du Régime de rentes du Québec pour ceux « qui ont construit le Québec ».

Quand on demande à Marcel Marchand ce qu'il pense de cette campagne électorale et s'il a l'impression que ses doléances ont été entendues par les politiciens, sa réponse est sans appel : « Non, non! Les personnes âgées sont oubliées. Là, ils veulent mettre le monde dans les CHSLD, mais à part de ça, non il n'y a rien. »

Ces aînés ont beau avoir vu bien des changements de gouvernements, aujourd'hui, ils attendent encore que leur qualité de vie soit améliorée. Sans trop y croire...

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