L’asexualité, une orientation sexuelle méconnue

L'asexualité
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Les personnes se définissant comme asexuelles, une orientation selon laquelle on n'a pas ou peu de désir pour autrui, vivent encore une certaine stigmatisation dans la population. Pourtant, environ 1 % des gens seraient asexuels, soit environ 80 000 personnes au Québec.
Un texte de Catherine Bouchard (Nouvelle fenêtre)
Le psychiatre Richard Montoro, du Centre d’orientation sexuelle de l’Université McGill (COSUM), est spécialiste des questions d’identité sexuelle. Selon lui, la recherche démontre qu’il n’y a pas de raisons physionomiques à l’absence de désir chez ces personnes.
Pour certaines personnes, la capacité d’être sexuel ou ce désir-là d’être sexuel avec quelqu’un d’autre ne s’est tout simplement pas manifesté dans leur esprit. C’est juste une variante à la sexualité humaine, ce n’est pas une maladie
, explique Richard Montoro.
Une personne asexuelle qui a des relations sexuelles, c’est comme quelqu’un qui mange quand il n’a pas faim. Ça se fait, mais c’est sans intérêt.
Selon la fondatrice de la Communauté asexuelle de Montréal, Isabelle Stephen, la population croit souvent à tort que les personnes asexuelles ont été agressées sexuellement dans leur enfance.D’après les données qu’on a, ça existe, mais c’est très, très minoritaire
, souligne le psychiatre de l’Université McGill.
Diversité
Au sein de cette communauté, plusieurs variantes de l'asexualité existent. Certains se définissent, par exemple, comme étant demi-sexuels. Ils peuvent ainsi à l’occasion ressentir une attirance physique lorsqu'ils vivent un lien affectif très fort. D’autres n’ont aucun désir pour les autres, mais ont tout de même une libido.
À l’intérieur de cette population très hétérogène, il y a beaucoup de monde qui vont pouvoir se masturber, même utiliser de la pornographie pour se stimuler, mais n’avoir aucun intérêt à s’investir sexuellement avec une autre personne
, mentionne le psychiatre.
On a souvent des discours “pathologisants” pour toutes les choses qu’on ne comprend pas. Souvent, la seule façon de passer par-dessus ces préjugés-là, c’est de rencontrer ces personnes.

Hypersexualisation
La sexologue Renée Coulombe estime que cette orientation sexuelle est encore méconnue, entre autres en raison du rapport qu'entretient la société à l’égard de la sexualité.
Il y a une hypersexualisation de la société et on associe souvent l'amour et la sexualité comme étant une seule chose. C'est comme si c'était indissociable. Les personnes asexuelles, ce sont des personnes qui ne ressentent pas le besoin d'avoir des relations sexuelles
, note Mme Coulombe.
Bon nombre d'entre elles ont d'ailleurs des relations amoureuses. Leur préférence pour un sexe ou l'autre n'a pas de corrélation avec leur asexualité, disent les experts.
Certaines personnes au sein de la communauté asexuelle se définissent également comme aromantiques, c’est-à-dire qu’elles n’ont pas le besoin de vivre une relation de couple. Il y a des personnes asexuelles qui n’auront aucune attirance pour des relations amoureuses
, affirme Mme Coulombe.
Même s'il y a eu beaucoup de progrès dans l'acceptation de la diversité sexuelle, il reste encore du chemin à faire. Un des obstacles, selon moi, c'est que les gens ne savent pas que ça existe. Souvent, quand on essaie de l'expliquer à quelqu'un, on se fait dire : non, ça ne se peut pas. C'est un déni total de ce qu'on est. On se fait dire : bien c'est parce qu'on n'a pas encore trouvé la bonne personne, ou c'est nos hormones, ou on a été abusé dans le passé. Non, ça n'a rien à voir avec ça
, dit Isabelle Stephen, fondatrice de la Communauté asexuelle de Montréal.
Pour écouter l'entrevue que nous avons réalisé avec la sexologue Renée Coulombe au sujet de l'asexualité et l'aromantisme, cliquez ici (Nouvelle fenêtre).
Pour joindre la journaliste Catherine Bouchard :
catherine.bouchard@radio-canada.ca
819 694-0114, poste 2030