La cigarette électronique Juul arrive au Canada

Les cartouches aromatisées de la cigarette électronique Juul viennent dans un emballage attrayant.
Photo : Radio-Canada / Katie Nicholson/CBC
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Après avoir conquis le marché américain, le géant américain du vapotage vient de lancer au Canada sa cigarette électronique Juul. Le produit, qui fait un tabac auprès des jeunes Américains, est dans la mire des autorités publiques américaines, déterminées à contrer le vapotage chez les adolescents.
Un texte de Sophie-Hélène Lebeuf
Discrète, légère, compacte : Juul a tout pour plaire à ses utilisateurs, notamment les jeunes.
Avec un design qui se démarque des marques rivales, cette cigarette électronique ressemble à un produit technologique. Juul Labs a du reste été cofondée par un ancien ingénieur concepteur d'Apple.
Le dispositif se recharge d'ailleurs facilement avec un port USB.
Au dispositif s'apparentant à une clé USB viennent se greffer des cartouches aux couleurs vives et aromatisées à des saveurs comme la menthe, la vanille, la mangue, le concombre ou la crème brûlée.
L'entreprise affirme que les différentes saveurs aident les fumeurs d'âge adulte à cesser de fumer. Le hic, disent ses détracteurs, c'est que ces saveurs en font un produit séduisant pour les jeunes.
Juul Labs fait même l'objet d'au moins trois poursuites aux États-Unis : les plaignants l'accusent entre autres d'avoir causé une dépendance à la nicotine chez des adolescents.
La teneur en nicotine de la Juul est d'ailleurs plus élevée que celle des marques concurrentes.
À l'image des publicités pour le tabac par le passé, les campagnes de marketing de Juul aux États-Unis, par exemple sur les réseaux sociaux, la présentent comme un produit branché, qui aide à la détente.
La croissance de l'entreprise, basée à San Francisco, est fulgurante. Depuis qu'elle a pénétré le marché américain en 2015, Juul Labs a accaparé 72 % du marché des cigarettes électroniques, selon une analyse de données effectuée par le groupe financier Wells Fargo.
La valeur du jeune géant du vapotage est évaluée à 16 milliards de dollars américains.
Preuve de la notoriété du produit, les utilisateurs américains de la cigarette Juul en ont fait un verbe.
La FDA passe à l’attaque
Sa popularité n’est pas étrangère à l’offensive lancée, mercredi, par la Food and Drug Administration (FDA) pour contrer le vapotage chez les jeunes.
Pour endiguer ce qu'elle qualifie d’« épidémie », l'agence américaine de réglementation des aliments et des médicaments somme les détaillants de cesser de vendre des cigarettes électroniques, toutes marques confondues, aux mineurs.
Elle donne en outre 60 jours aux fabricants pour lui soumettre leurs stratégies pour faire chuter la consommation de leurs produits chez les jeunes. Sans quoi, menace-t-elle, elle pourrait aller jusqu’à retirer des tablettes les produits aromatisés de façon temporaire ou permanente.
Même si la FDA, tout comme Santé Canada d'ailleurs, reconnaît que la cigarette électronique peut aider les fumeurs adultes à écraser pour de bon, elle ne veut pas que celle-ci contribue à créer une nouvelle génération de fumeurs.
La FDA n’a pas rendu public le nombre d'utilisateurs de produits de vapotage chez les jeunes, mais la consommation de cigarettes électroniques chez les élèves américains du secondaire aurait augmenté de 75 % en un an, selon le Washington Post.
Les adolescents qui vapotent courent plus de risques de passer plus tard à la cigarette, selon les National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine des États-Unis. Le phénomène a aussi été observé dans une vaste étude menée au Canada.
Une situation qui préoccupe aussi Santé Canada
« Santé Canada s’inquiète de l’attrait que peuvent avoir les produits de vapotage, comme Juul, pour les jeunes », reconnaît par courriel Sindy Souffront, porte-parole de Santé Canada.
Le ministère concentre ses efforts de prévention auprès des jeunes, souligne-t-elle, notamment parce qu'ils peuvent plus facilement devenir dépendants à la nicotine. « Nous ne voulons pas que le vapotage mène au tabagisme », plaide-t-elle.
En 2016-2017, l’Enquête canadienne sur le tabac, l’alcool et les drogues a relevé que 23 % des élèves de la 7e à la 12e année ont essayé une cigarette électronique, comparativement à 20 % deux ans plus tôt.
Même si c'est l'argument de vente avancé par les manufacturiers de vapoteuses, elles ne semblent pas pour les jeunes un outil pour arrêter de fumer. Une étude menée en Alberta en 2016 a démontré que 75 % des élèves de 14 et 15 ans qui utilisaient la cigarette électronique le faisaient parce qu'ils trouvaient cela amusant.
C'est le message que semblent envoyer les publicités de Juul aux États-Unis.

Une publicité de Juul
Photo : Juul
Sindy Souffront souligne qu'au Canada, la cigarette électronique est soumise aux mêmes règles que les produits du tabac, notamment en matière de prévention chez les jeunes.
Entrée en vigueur cette année, la Loi sur le tabac et les produits de vapotage interdit la promotion des produits de vapotage dans les médias, y compris dans les médias sociaux, rappelle-t-elle.
La loi a permis de mettre en place des « contrôles rigoureux », fait-elle valoir, « y compris l’interdiction de toute publicité attrayante pour les jeunes, de la publicité de style de vie, des promotions de commandite, des recommandations ainsi que des promotions de produits de vapotage et de marchandises de marque ».
Nous voulons éviter les pratiques de marketing précoces utilisées par les entreprises de vapotage aux États-Unis, y compris Juul, qui peuvent avoir contribué à accroître l’attrait des produits de vapotage chez les jeunes.
La loi restreint également la vente de produits de vapotage aux jeunes et exige une vérification de l’âge pour l'achat de produits en ligne, ainsi que pour leur livraison.
Le gouvernement du Canada compte par ailleurs lancer cet automne une campagne pour sensibiliser les jeunes aux risques associés à l’utilisation des produits de vapotage.
Des risques pour la santé
Selon un rapport récent des National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine, les cigarettes électroniques sont moins néfastes que les cigarettes traditionnelles, parce qu’elles produisent moins de substances toxiques, mais elles représentent tout de même un risque pour la santé.
Leurs utilisateurs courent notamment un risque supplémentaire de développer un cancer ou des maladies cardiaques.
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Avec les informations de Washington Post