Étienne Poirier, auteur jeunesse : « Je veux écrire la vie »

L'auteur Étienne Poirier lors d'une rencontre avec les jeunes de l'école secondaire Otapi à Manawan en février 2018.
Photo : Radio-Canada/Pierre Lévesque
De retour à Manawan devant ses anciens élèves après une longue absence, l'auteur Étienne Poirier s'est senti comme le personnage Siméon de son roman Niska : un étranger qui revient.
Un texte de Sophie Cazenave
Un reportage de Nabi-Alexandre Chartier
Étienne Poirier a écrit son roman Niska quand il enseignait le français aux jeunes de l’École secondaire Otapi. Il leur en lisait même des extraits en classe.
Depuis, le livre a fait son chemin : il a été finaliste du prix TD de littérature jeunesse l’an passé et connaît une deuxième vie en version audio, lu par Samian.
C'est pour souligner cette collaboration qu'Étienne Poirier est retourné à Manawan, en février dernier, accompagné du rappeur et conférencier Samian. Ce dernier est arrivé, casquette vissée sur la tête, et s'est mêlé à la dizaine d’élèves venus écouter leur ancien prof leur parler d'écriture.

À l'occasion de l'enregistrement en livre audio du roman jeunesse Niska, qui aborde le sujet des pensionnats autochtones et dont la narration est assurée par Samian, l'auteur Étienne Poirier est allé rencontrer ses anciens élèves de l'école secondaire Otapi, à Manawan
Fuir l'apitoiement
Étienne Poirier leur a expliqué que ce livre était né d’une commande de son éditrice, et qu'au début, il était plutôt réticent à l'idée d'écrire sur le sujet des pensionnats autochtones.
Il avait lu d’autres romans sur la question, mais il trouvait le sujet lourd et bon nombre de ces livres lui semblaient « atrocement mauvais ». Leur principal défaut selon lui? L’apitoiement. Or lui, comme auteur, cherche à « écrire la vie ».
Une histoire de relation père-fils
Mais parler des pensionnats l'intéressait, alors il s'est demandé comment « mettre de la lumière dans cette histoire ». Il voulait aussi faire entendre la voix des parents, qu’on entend généralement peu dans ces récits.
Il a donc choisi de raconter avant tout l’histoire d’un père et d’un fils, et de leurs retrouvailles après l'épreuve du pensionnat. Un moment de joie, mais aussi un moment où l'on mesure la distance qui les sépare désormais.
Partir pour revenir
La plus belle image qu'il a trouvée pour symboliser cet attachement et cet éloignement, c'est celle de la bernache du Canada, l’outarde, « niska » en attikamek, qui part à l’automne et revient au printemps.

Un élève de l'école secondaire Otapi de Manawan pendant l'enregistrement d'un lexique attikamek/français.
Photo : Nabi-Alexandre Chartier
Dans le livre, après le départ de son fils, le personnage du père sombre dans la folie et se met à sculpter des centaines et des centaines d’outardes en bois. Son fils, et avec lui le lecteur, ne le découvre que plus part, en ouvrant son cabanon.
Mais Étienne Poirier a semé pour le lecteur de petits indices tout au long de son livre. La première fois que Siméon revient du pensionnat, son père a des copeaux de bois accrochés à son pantalon. Un peu plus tard, il a des copeaux à hauteur du genou. Vers la fin, les copeaux de bois sont dans ses cheveux.
Quel conseil Étienne Poirier donnerait-il à un étudiant qui rêve d’écrire? Lire! Pour apprendre à aiguiser son point de vue.
« »
La fin d'une « superbe parenthèse »
Petit, Étienne Poirier rêvait d'écrire, et aujourd'hui, il vit son rêve. Arrivé à Manawan en 2002 « pour payer ses dettes », il y a enseigné presque 15 ans et travaille désormais dans une maison d’édition, Les Écrits des Forges, à Trois-Rivières.
Quand ses anciens élèves lui demandent s'il va aller enseigner ailleurs, il répond qu'en quittant Otapi, il a quitté l’enseignement. « Vous avez été une superbe parenthèse dans ma vie », dit-il, ému, à ses anciens élèves.
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