Des sénateurs proposent de retarder la légalisation du cannabis

Le gouvernement canadien vise la légalisation du cannabis à usage récréatif d'ici juillet 2018.
Photo : Getty Images / Donald Weber
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
La légalisation du cannabis devrait être retardée pour mieux tenir compte de la réalité autochtone, concluent des sénateurs. Plusieurs comités de la Chambre haute sont à l'étape de formuler des recommandations sur le projet de loi sur la légalisation du cannabis (C-45). Leur rapport va ouvrir la voie à des amendements qui seront débattus dans quelques semaines au Sénat.
Un texte de Louis Blouin, correspondant parlementaire à Ottawa
Le Comité sénatorial des peuples autochtones recommande un amendement pour « retarder d'au plus un an » l'entrée en vigueur du projet C-45. Dans leur rapport, les sénateurs constatent « un manque de consultation avec les collectivités et organisations autochtones », lors de l'élaboration du projet de loi.
Selon eux, un sursis permettrait aux communautés autochtones de négocier une entente avec le gouvernement sur le partage de la taxe d'accise sur le cannabis et des revenus générés par la production « sur les terres des Premières Nations ».
Le chef national de l'Assemblée des Premières Nations déplorait mardii matin, en assemblée extraordinaire à Gatineau, avoir été écarté des discussions lorsque les provinces et Ottawa ont décidé de s'attribuer respectivement 75 % et 25 % des recettes de la taxe d'accise.
Nos gouvernements seront aussi touchés par cet enjeu. Nous avons été laissés de côté.
Le comité recommande que le ministère de la Santé réserve au moins 20 % des permis de production de cannabis pour les producteurs établis « sur les terres relevant de gouvernements autochtones ou leur appartenant ».
Les sénateurs suggèrent aussi que du matériel éducatif adapté soit produit à l'intention des communautés autochtones.
Le rapport réclame que le gouvernement fédéral augmente considérablement son financement dans les programmes de santé mentale et de lutte contre les toxicomanies.
Le Canada ne se retirera pas des traités qu'il violera
Dès l’entrée en vigueur de la légalisation du cannabis, le Canada contreviendra « avec réserve » à trois conventions internationales. Toutefois, la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, estime que se retirer de ces traités serait une « réaction excessive » et « nuisible » aux intérêts du pays et de la communauté internationale. Ce serait « une erreur », parce que ces traités internationaux encadrent « la circulation de plus d'une centaine de drogues et de substances, dont plusieurs jouent un rôle dans la crise des opioïdes qui sévit actuellement en Amérique du Nord », a expliqué Mme Freeland. (Avec La Presse canadienne)
Le cannabis et la frontière
Le Comité sénatorial de la sécurité nationale et de la défense a aussi déposé son rapport mercredi. Il s'est surtout penché sur les écueils qui pourraient se présenter à la frontière américaine une fois le cannabis légalisé.
Ses membres craignent que des Canadiens soient refoulés ou arrêtés à la frontière par les douaniers américains s'ils admettent avoir déjà consommé du cannabis.
Ils demandent au gouvernement Trudeau d'entamer un dialogue formel et de conclure une entente avec les États-Unis pour encadrer le traitement des voyageurs canadiens à la frontière en ce qui a trait au cannabis.
Le comité plaide aussi pour une campagne de sensibilisation plus large auprès des voyageurs, pour leur rappeler qu'il va demeurer illégal de traverser la frontière avec de la marijuana en leur possession.
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Une étape d'un long processus
Au total, cinq comités sénatoriaux se penchent sur la légalisation du cannabis. Le Comité permanent des affaires sociales sera chargé de réviser tous les rapports qui seront déposés.
À la fin du mois de mai, les sénateurs commenceront à débattre d'une série d'amendements avant un vote final sur le projet C-45 prévu le 7 juin. Le projet de loi amendé retournerait ensuite à la Chambre des communes. Une partie de va-et-vient pourrait s'ensuivre entre le Sénat et le gouvernement, c'est pourquoi la date précise de la légalisation est difficile à prévoir.
Une fois que le projet de loi aura reçu la sanction royale, le gouvernement fédéral a prévenu que huit à douze semaines seront nécessaires pour mettre en oeuvre la légalisation.