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Des commerçants dénoncent les pratiques d'un vendeur de terminaux de paiement

Un homme tient un terminal Interac. Une femme a les bras croisés.

Julien Poirier et Nancy St-Laurent

Photo : Radio-Canada / Thomas Deshaies

Radio-Canada

Plusieurs commerçants de l'Abitibi-Témiscamingue affirment avoir été victimes de fausse représentation par des vendeurs de terminaux de paiement œuvrant pour l'entreprise Services aux Marchands GJ, et offrant les services d'Evo Payments international Canada.

Un texte de Thomas Deshaies

Des promesses qui ne se concrétiseraient pas, des informations incomplètes, une nette différence entre les promesses orales et les clauses du contrat. Selon quatre entrepreneurs de la région qui ont accepté de nous raconter leur histoire, les pratiques de certains vendeurs de Services aux Marchands GJ ne seraient pas toujours éthiques.

Ils regrettent amèrement d'avoir signé un contrat avec Evo Payments international Canada. C'est le cas des propriétaires de l'épicerie gourmande La Tanière à Val-d'Or. Selon la copropriétaire, Nancy St-Laurent, les vendeurs auraient proposé des économies alléchantes et une période d'essai de trois mois, sans aucune obligation.

Déçue par le terminal, elle aurait voulu retourner l'appareil un mois plus tard, et se serait ensuite fait dire qu'elle avait signé un contrat pour plusieurs années. « Ils m'avaient pourtant clairement [oralement] dit qu'il n'y avait pas d'engagement [pour trois mois] », déplore Mme St-Laurent.

Le problème ce n'est pas d'en rentrer, mais d'en sortir.

Une citation de Nancy Saint-Laurent

Ce n'est qu'après avoir effectué de multiples appels qu'elle se rend compte qu'elle fait affaire avec trois entités, dont Services aux Marchands GJ et Evo Payment international Canada. Elle comprend alors qu'elle devra s'adresser à plusieurs interlocuteurs pour régler la situation. « C'est vraiment difficile d'y voir clair », commente un second entrepreneur ayant vécu une situation similaire.

Nancy St-Laurent affirme avoir signé un contrat, mais qu'on ne lui aurait pas laissé de copie. Elle se serait fiée aux explications du vendeur lors de la signature. À la suite de nombreux appels, on lui a toutefois envoyé par courriel son contrat, mais avec des pages manquantes.

Plusieurs cas

Trois autres entrepreneurs, qui n'ont pas voulu que leur identité soit dévoilée, nous ont raconté des histoires similaires. Dans un des cas, le vendeur de Services aux Marchands GJ aurait promis qu'il assumait les coûts reliés au bris du contrat avec un compétiteur, ce qu'il n'aurait jamais fait.

Une troisième entreprise de Val-d'Or soutient qu'on lui aurait fait croire que le terminal était une location, et non qu'il s'engageait à l'acheter, après cinq ans de paiement. « 26 000 $ pour une machine, ce sont des prix absolument litigieux, nous a confié le propriétaire du commerce. Il a fallu faire une opposition bancaire, parce qu'il n'y avait aucune communication avec la compagnie. »

Un terminal de paiement de la compagnie Ingenico.

Le terminal débit/crédit en question

Photo : Radio-Canada / Thomas Deshaies

Tous les entrepreneurs clament qu'ils n'auraient jamais signé de contrat avec Evo Payment international Canada si le vendeur leur avait verbalisé des informations exactes et complètes. Ils racontent tous qu'il a été très ardu de mettre fin à l'entente.

Deux autres entreprises avec qui nous avons pu parler, et faisant nouvellement affaire avec Services aux Marchands GJ, affirment ne pas avoir de problème majeur avec les représentants de l'entreprise.

Services aux marchands GJ martèle que les contrats sont clairs

Joint au téléphone à sa propriété au Mexique, le président de Services Marchands GJ, Jean Émond, affirme avoir donné l'ordre à son bras droit de régler l'ensemble des litiges en Abitibi-Témiscamingue. « Je ne suis pas content des choses qui se passent », a-t-il affirmé.

Il prétend cependant que la faute revient aussi aux commerçants, puisque les conditions des contrats sont très claires. « Je peux bien croire que le vendeur dit plein de choses, mais à un moment donné, on est en affaires. Moi aussi j'en ai perdu de l'argent en publicité avec des gens qui disaient n'importe quoi », a-t-il rétorqué, martelant que les commerçants auraient dû lire attentivement les documents.

Le vendeur aurait beau dire n'importe quoi, le document que tu signes, tu le lis.

Une citation de Jean Émond

Il souligne par ailleurs que les contrats utilisés par Evo Payments international Canada sont beaucoup plus détaillés que ceux de certains compétiteurs. « C'est le seul contrat qui n'a pas d'astérisque [invitant à lire les détails en ligne] sur le marché, mais le problème, c'est que le client ne le lit pas », a-t-il ajouté. Pour les pages manquantes du contrat envoyé à La Tanière, il a affirmé qu'il s'agissait d'une « défaillance du vendeur ». « Ce sont des pages qui n'ont aucune signature dessus », a-t-il précisé pour expliquer la situation.

À propos du manque de clarté concernant l'ensemble des entités impliquées, Jean Émond n'y voit pas une situation problématique. « Les gens ne savent même pas c'est quoi un processeur. Il ne faut pas rentrer dans le détail parce que c'est clair qu'on ne vendra pas », a-t-il déclaré.

Il affirme que les commerçants auraient dû appeler directement à Evo Payment international Canada ou encore au numéro 1-800 de Services aux Marchands GJ s'ils étaient insatisfaits du vendeur. « Le service d'Evo est [ouvert] 7 jours, 24 h, c'est quoi le problème de prendre un mois à rejoindre quelqu'un? », a-t-il rétorqué, lorsque questionné sur la difficulté qu'ont eu certains commerçants à obtenir de l'aide de la part de ses représentants aux ventes.

Evo Payments international Canada n'a pas voulu nous accorder d'entrevue, ou encore répondre à nos questions par courriel. « EVO Canada a réglé cette situation avec le marchand et nous ne répondrons à aucune question », nous a-t-on écrit, après plusieurs relances.

Consentement éclairé

Jean Émond prétend que les promesses faites oralement par le vendeur n'ont que bien peu d'importance lors d'un règlement d'un litige face à un juge. Le professeur à la faculté de droit de l'Université de Sherbrooke, Pascal Fréchette, a toutefois une vision beaucoup plus nuancée.

Un juge pourrait d'ailleurs faire invalider une entente, si des fausses représentations avaient bel et bien été effectuées. « La signature [d'un contrat] fait présumer de notre consentement, mais c'est possible de remettre en cause le consentement valable qu'on a donné lors de la signature, si on établit qu'on nous a fait de fausses représentations », a-t-il expliqué.

Un appel à la prudence

Selon la vice-présidente à la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, Martine Hébert, il n'est pas rare que des commerçants soient confrontés à ce type de problème avec des fournisseurs de services de paiement. « Ça ne concerne pas juste une compagnie en particulier, a-t-elle toutefois tenu à préciser. Certains fournisseurs semblent avoir des stratégies qui mettent à mal davantage certains petits entrepreneurs. »

Je pense qu'il faut qu'il y ait des drapeaux qui se lèvent.

Une citation de Hélène Paradis

La Chambre de commerce de Val-d'Or (CCVD) a été informée de la situation et invite ses membres à la prudence. « [Les vendeurs itinérants] sont de passage. Ils donnent un délai très court pour signer, sinon ils repartent. Je pense qu'il faut être alerte et faire attention à ces approches », a expliqué la directrice générale de la CCVD, Hélène Paradis.

Depuis notre entrevue avec Nancy St-Laurent, Services aux Marchands GJ affirme qu'Evo Payment international Canada s'est engagé à résilier le contrat. Les propriétaires de La Tanière avaient déposé une plainte en lien avec le Code de conduite destiné à l'industrie canadienne des cartes de crédit et de débit du gouvernement du Canada.

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