Mystérieuses attaques à Cuba : des diplomates canadiens racontent leur histoire

Ambassade du Canada à Cuba
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
On le surnomme « le syndrome de La Havane ». C'est le résultat d'une mystérieuse attaque dite acoustique qui aurait eu lieu entre les murs des résidences diplomatiques canadiennes et américaines à Cuba. De retour au pays, des diplomates canadiens en parlent pour la première fois.
« Je me souviens d'avoir entendu des sons du fond du jardin. Un bruit métallique », raconte, sous le couvert de l'anonymat, un diplomate canadien de retour de Cuba.
L’affaire a été dévoilée en août dernier. Une vingtaine de membres du personnel diplomatique américain à Cuba présentent d’étranges symptômes, comme des troubles de l’audition, de l’équilibre et du sommeil, ainsi que des nausées, après avoir entendu des sons dont ils ignoraient la provenance. Ils sont rapatriés aux États-Unis. On décèle chez eux des lésions cérébrales traumatiques légères.
Les autorités américaines parlent alors d’« attaque acoustique » d'une « nature inconnue ». Washington accuse le régime cubain d'avoir rendu ses diplomates malades. Le gouvernement Castro proteste. L’énigme est totale.
L'affaire est ouvertement débattue par un comité sénatorial présidé par le sénateur Marco Rubio.
Une affaire gardée sous silence
Au Canada, l'histoire ne fait pas grand bruit. Pourtant, huit membres de familles de diplomates canadiens en poste à Cuba sont affligés de symptômes semblables.
J'avais des maux de tête, des problèmes de sommeil, des pertes d'équilibre.
Pendant des mois, ils n'en parlent pas. La consigne était claire, disent-ils. Mais aujourd'hui, ils veulent raconter publiquement leur histoire, invoquant leur santé et celle des membres de leur famille.
« Parler comporte des risques, mais ces risques en valent la peine, explique un diplomate. C'est pour tous les diplomates canadiens qu'on parle aujourd'hui. On ne devrait pas cacher des informations pendant des mois. La santé et la sécurité devraient passer avant. »
Laissés à eux-mêmes
Même si un médecin a été dépêché à La Havane, les diplomates estiment avoir été laissés à eux-mêmes dans toute cette affaire.
« Je n'ai vu aucun spécialiste pendant six mois et je n'avais aucune idée de quel était mon diagnostic final. Je savais que j'étais malade, même si la Défense avait fermé mon dossier. Et je savais que mes symptômes étaient similaires à ceux des Américains », dit une diplomate.
Désespérés, certains de ces diplomates se sont rendus de leur propre moyen à la prestigieuse école de médecine de l'Université de Pennsylvanie afin d’être évalués par les mêmes experts que leurs collègues américains.
Nous avons rencontré un médecin. Tous les quatre, nous avons été diagnostiqués avec une lésion cérébrale traumatique.
Les familles seront rapatriées
Faisant le point sur la situation lundi, le gouvernement du Canada a annoncé qu'il allait rapatrier les membres des familles de ses diplomates travaillant à son ambassade de La Havane. Le gouvernement a changé la désignation de cette dernière pour « poste non accompagné ». Les membres de familles de diplomates sur place seront de retour au pays au cours des prochaines semaines.
Le gouvernement a également indiqué que, selon de nouvelles informations provenant de médecins spécialistes canadiens et américains, le mystérieux mal pourrait être un nouveau type de lésion cérébrale. La cause demeure inconnue, ajoute Affaires mondiales Canada, mais pourrait être d’origine humaine.

Pour le Dr Douglas Smith, les États-Unis doivent se préparer à d'autres attaques du genre dans l'avenir.
Photo : Radio-Canada
« C'est un mystère », affirme le Dr Douglas Smith, une sommité des questions qui touchent aux commotions cérébrales.
Nous ne comprenons pas comment quelqu’un peut avoir les symptômes d’une commotion cérébrale sans avoir eu de commotion.
Pour le Dr Douglas, il n'y a aucun doute que c'est le cerveau qui a été visé.
Une enquête menée par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) est en cours pour tenter de déterminer ce qui a pu être à l’origine de ces symptômes inhabituels.
D’après un reportage d’Azeb Wolde-Giorghis