Iran : les manifestants « paieront le prix », avertit le gouvernement

Les gens protestent à Téhéran, en Iran, samedi. Cette photo a été obtenue par Reuters par l'entremise des réseaux sociaux.
Photo : Reuters
Prenez note que cet article publié en 2017 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Les manifestants antigouvernementaux ont à nouveau pris la rue, dimanche, en Iran, malgré l'avertissement des autorités d'une répression sévère, prolongeant pour un quatrième jour l'une des critiques les plus audacieuses lancées aux dirigeants religieux depuis les demandes de réforme, en 2009.
Les manifestants « paieront le prix » de leurs actions, avait pourtant averti le gouvernement, dimanche matin, après que deux personnes ont perdu la vie dans des manifestations qui frappent tout le pays.
Le ministre de l'Intérieur, Rahmani Fazli, qui a lancé l'avertissement, ajoute que la « mauvaise utilisation » des réseaux sociaux par certains « cause la violence et la peur » et que « ce comportement sera écrasé », selon l'IRNA, l'agence de presse officielle du régime iranien.
Les manifestants ont largement utilisé les réseaux sociaux Twitter, Instagram et Telegram pour diffuser de l’information au cours des derniers jours. La couverture médiatique à l'intérieur de l'Iran a été grandement limitée, les médias officiels fournissant peu de détails sur les manifestations.
Les commentaires de M. Fazli, dimanche, ont quant à eux été publiés par divers médias publics.
« Les événements des derniers jours ont inquiété, attristé et blessé notre peuple bien-aimé, a déclaré M. Fazli, selon l'agence de presse semi-officielle ILNA. Ceux qui détruisent les biens publics, créent le chaos, l'anarchie et l'insécurité dans notre société seront tenus légalement responsables et devront répondre de leur comportement et en payer le prix. »

Sur cette photo obtenue par Associated Press, des étudiants manifestent dans l'enceinte de l'Université de Téhéran alors qu'une grenade fumigène est lancée par la police antiémeute iranienne.
Photo : Associated Press
Réseaux sociaux bloqués
Afin de reprendre le contrôle de la situation et de mater le mouvement de contestation, l’Iran a d’ailleurs restreint l’accès à certains réseaux sociaux, dimanche matin.
« Il a été décidé au plus haut niveau de la sécurité de restreindre l'accès à Telegram [application de messagerie sécurisée] et à Instagram », a-t-on appris sur les ondes de la chaîne publique iranienne IRIB.
Le PDG de Telegram, Pavel Durov, a déclaré sur Twitter que l'application avait bel et bien été bloquée pour la majorité des Iraniens.
Des utilisateurs iraniens ont aussi confirmé dimanche que l'application était désormais inaccessible par les réseaux de téléphonie mobile, par l’entremise du wi-fi et des connexions Internet à domicile.
Facebook, propriétaire d’Instagram, n'a pas fait de commentaires.

Manifestations mortelles
Deux personnes ont été tuées par balles samedi lors de manifestations à Dorud, dans la province du Lorestan, dans l’ouest du pays, selon l'agence de presse semi-officielle Mehr News.
Dimanche, Habibollah Khojastehpour, vice-gouverneur du Lorestan, a confirmé les deux morts à Mehr News. Il a nié que les forces de sécurité étaient à blâmer, et a plutôt attribué les deux morts à des « agents étrangers ».
À Dorud, de nombreuses vidéos diffusées sur les réseaux sociaux ont montré la violence des manifestations. Dans ces vidéos, dont l’authenticité n’a pu être vérifiée, des blessés jonchent le sol et on peut entendre des coups de feu dans les rues.

Des étudiants iraniens se frottent à la police à l'Université de Téhéran, samedi.
Photo : AFP/Getty Images
Du jamais-vu depuis 2009
Cette nouvelle vague de manifestations en Iran – décrite comme la plus grande manifestation publique de mécontentement depuis le mouvement vert de 2009 – a émergé dans un contexte de hausse des prix des denrées alimentaires et de l'essence.
Dans un acte rare de défiance face aux autorités, certains manifestants ont dirigé leur colère contre l’ayatollah Khamenei, guide suprême de l’Iran, selon ce que l’on peut voir sur certaines vidéos publiées sur les réseaux sociaux.
Les manifestations ont débuté jeudi à Mechhed, deuxième ville du pays, et se sont vite étendues aux villes de toute la République islamique.
Depuis de nombreuses années, le taux de chômage chez les jeunes Iraniens oscille autour de 25 %.
Pas moins de 200 manifestants ont été arrêtés samedi à Téhéran, selon le vice-préfet de la ville, Ali Asghar Nasserbakht, cité par l'agence Ilna, proche des réformateurs.
Le président iranien Hassan Rohani a prononcé dimanche soir son premier discours depuis le début des protestations. Dans une allocution télévisée, il a rejeté « la violence et la destruction de biens publics » mais a affirmé qu'il fallait créer « un espace pour que les partisans de la révolution et le peuple puissent exprimer leurs inquiétudes quotidiennes ».
Le président iranien a aussi dénoncé les déclarations de son homologue américain Donald Trump, qui avait affirmé que « le gouvernement iranien devrait respecter » les droits des manifestants. « Ce monsieur aux États-Unis qui veut montrer de la sympathie à l'égard du peuple iranien oublie qu'il l'a traité de terroriste il y a quelque mois. Il n'a pas le droit de compatir avec le peuple iranien », a déclaré M. Rohani.
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Avec les informations de Associated Press et Reuters