Pénurie de main-d'oeuvre : des entreprises lancent un SOS

Une affiche devant le siège de la compagnie Canimex, à Drummondville.
Photo : Radio-Canada / Frank Desoer
Prenez note que cet article publié en 2017 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Des entreprises manufacturières en région cherchent désespérément à embaucher des travailleurs non qualifiés pour combler leurs besoins. Dans la région de Drummondville, la demande est particulièrement criante.
Un texte de Frank Desoer, de Désautels le dimanche
C’est l’avenir de notre entreprise qui est en péril, faute de main-d’œuvre suffisante.
En poussant ce cri du cœur, Nathalie Joyal, directrice des ventes à l'entreprise Sixpro, près de Drummondville, se fait le porte-voix du désarroi de très nombreuses entreprises manufacturières qui peinent à trouver les employés nécessaires pour assurer leur croissance.
Dans la région de Drummondville, où l’on retrouve quelque 650 entreprises du secteur manufacturier, 2000 emplois sont à pourvoir. À l’instar d’autres entreprises, la difficulté de recruter du personnel oblige Sixpro, qui se spécialise dans le revêtement de peinture de pièces métalliques, à refuser d’importants contrats.
On a dû procéder à une attrition de nos clients […], certains de très longue date. Ça a été un exercice extrêmement difficile.

Nathalie Joyal, directrice des ventes chez Sixpro
Photo : Radio-Canada / Frank Desoer
Pour une entreprise compétitive à l’échelle internationale, il s’agit là d’un exercice contre nature.
On n’a pas été habitué à dire au département des ventes de ralentir. Ce n’est pas une orientation d’entreprise normale […]. Ça n’a aucun sens, mais c’est une réalité.
Les travailleurs étrangers à la rescousse
Pour combler leurs besoins de personnel, de plus en plus d’entreprises n’ont d’autre choix que de faire appel à la main-d’œuvre issue de l’immigration. Certaines d’entre elles fréquentent ainsi les salons de l’emploi de la région de Montréal où se trouve le plus grand bassin d’immigrants.
Toutefois, leurs efforts pour essayer de convaincre les nouveaux arrivants de déménager en région ne sont pas toujours couronnés de succès.

Speed dating de l'emploi avec les immigrants récents organisé par la Maisonnée, à Montréal
Photo : La Maisonnée
L’autre piste est de recruter à l’étranger des travailleurs temporaires. Sixpro, qui compte 225 employés, a recours depuis environ un an à quelques travailleurs des Philippines pour effectuer des tâches de base en usine.
Il s’agit cependant d’une démarche longue et fastidieuse auprès des bureaucraties fédérale et provinciale. Pour chaque employé, les entreprises doivent investir plusieurs milliers de dollars pour les faire venir, les héberger, les former et assurer leur francisation.

Kenedy Vilarin Tadique, travailleur philippin recruté par Sixpro il y a un an
Photo : Sixpro
SGT transport, à Saint-Germain-de-Grantham, près de Drummondville, a dû recruter des dizaines de camionneurs d’Europe, d’Afrique et des Caraïbes. Malgré cela, cinquante camions demeurent immobilisés dans son stationnement faute de chauffeurs.
Recruter un travailleur étranger, pour nous, c’est un dernier recours. Or, au lieu d’alléger le processus, les gouvernements rajoutent d’autres paliers. Est-ce que c’est logique?

Camion de SGT Transport à Saint-Germain-de-Grantham
Photo : SGT Transport
Le reportage de Frank Desoer est diffusé à l’émission Désautels le dimanche, à 10 h, à ICI Radio-Canada Première.
Pour répondre à leurs besoins, des entreprises comme le Groupe Soucy, qui transforme du caoutchouc, font également appel à des réfugiés syriens qui ne demandent pas mieux que de travailler pour s’intégrer à leur société d’accueil.

Jihad Al Hussein, réfugié syrien depuis un an et demi et opérateur à l’usine du Groupe Soucy de Drummondville
Photo : Radio-Canada / Frank Desoer
Dans une certaine mesure, le fait que des entreprises aient recours à des travailleurs temporaires ou à des réfugiés est révélateur des failles de notre système d’immigration permanente, selon la vice-présidente de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), Martine Hébert.
Ce système favorise au Québec la sélection d’immigrants francophones très qualifiés, ce qui ne correspond pas forcément aux besoins de l'économie.
Au Québec, on se retrouve avec un paradoxe migratoire qui fait en sorte que la clientèle immigrante est beaucoup trop qualifiée par rapport aux besoins de main-d’œuvre dans les régions du Québec.