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Quand il faut parcourir des kilomètres pour fuir la violence conjugale

Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes

Des ressources pas toujours accessibles pour les femmes victimes de violence

Photo : iStock

Radio-Canada

Les maisons d'hébergement pour femmes victimes de violence débordent. Au Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie, des femmes doivent rouler plusieurs kilomètres pour trouver une ressource d'hébergement prête à les accueillir.

Un texte de Joane Bérubé avec la collaboration de Xavier Lacroix, Caroline Cyr et Ariane Perron-Langlois

Il existe seulement trois maisons d’hébergement pour femmes victimes de violence de La Pocatière jusqu'aux Méchins. Cette réalité amène parfois les responsables de ces maisons à transférer les femmes en détresse loin de chez elle. C’est aussi le cas en Gaspésie même si on compte cinq maisons.

On a toujours un taux d’hébergement qui est extrême. On est toujours autour de 90 % de taux d’occupation. On ne peut pas faire davantage avec les subventions que nous avons.

Une citation de Guylaine Lévesque, intervenante à la maison La Gigogne et déléguée régionale au Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale
Guylaine Lévesque de la maison d'hébergement La Gigogne

Guylaine Lévesque de la maison d'hébergement La Gigogne

Photo : Radio-Canada

Les maisons sont ouvertes 24 heures par jour, sept jours sur sept, 365 jours par année. Les besoins sont de plus en plus importants et les ressources ne suffisent plus, clament les responsables de maisons d’hébergement.

Ainsi à Matane où la Gigogne accueille une cinquantaine de femmes ainsi que de trente à quarante enfants par année, il existe aussi la maison L’Entre-Temps. L’immeuble compte six logements pour de l’hébergement transitoire pour aider les femmes et les enfants victimes de violence domestique à rebâtir leur vie. Ces appartements sont tous occupés.

La maison L’Entre-temps ne reçoit aucun financement de base.

Les bénévoles et les travailleuses ont mis sur pied une campagne de financement pour payer les factures. « Et c’est sans compter les services qu’on offre à l’externe », rapporte Mme Lévesque, qui regrette de ne pas pouvoir faire plus et mieux, notamment en prévention.

Guylaine Lévesque admet qu’il lui est arrivé, faute de places, de devoir référer des femmes à la maison La Débrouille à Rimouski, à L’Autre-Toit à Cabano ou à Centre Louise-Amélie de Sainte-Anne-des-Monts, ce qui n’est pas sans conséquence.

Moment crucial

Intervenante à la maison La Débrouille de Rimouski, Émilie observe que plusieurs femmes n’ont pas de voiture et ne disposent pas de transport pour se rendre à la maison d’hébergement, encore plus, si elle est située très loin de chez elle.

« D’autres ne veulent pas venir parce que c’est trop loin, parce qu’elles ne veulent pas quitter leur réseau aussi drastiquement. Donc, ça peut arriver qu'on perde des femmes », poursuit l’intervenante.

La situation est aussi critique au bout de la péninsule gaspésienne. L’été dernier, la maison L’Aid’Elle de Gaspé a connu un taux d’occupation record de 130 %. La moyenne cette année sera de 115 %, indique la directrice générale Marie-Noëlle Marcoux.

Marie-Noëlle Marcoux  de la maison hébergement violence conjugale L'Aid'Elle

Marie-Noëlle Marcoux de la maison hébergement violence conjugale L'Aid'Elle

Photo : Radio-Canada

Là aussi, les ressources, notamment financières, sont insuffisantes pour répondre à la demande. « On y arrive, mais en faisant des pieds et des mains », indique Mme Marcoux.

Comme au Bas-Saint-Laurent, il arrive que des femmes soient référées à des centres voisins. « Mais, rapporte Mme Marcoux, en général, on vit tous la même situation, on se retrouve tous dans le même contexte. Les femmes vont alors rester dans des milieux où elles vivent de la violence en attendant d’avoir une place. »

Elle rappelle que la décision d’appeler une ressource d’hébergement pour violence conjugale est souvent difficile à prendre.

Ce n’est pas quelque chose qui vient du jour au lendemain, généralement ça fait longtemps que les femmes vivent ces situations. Lorsqu’elles prennent la décision d’appeler, on doit pouvoir être en mesure de l’accueillir à ce moment précis pour éviter qu’elle se décourage.

Une citation de Marie-Noëlle Marcoux, directrice générale de L'Aid'Elle

Marie-Noëlle Marcoux estime que le phénomène de la violence conjugale est plus présent que jamais et les femmes qui en sont victimes sont souvent aux prises avec de multiples problématiques.

C’est aussi le constat d’Émilie, intervenante à Rimouski.

Les besoins se complexifient, dit-elle. « Avec toutes les coupures des dernières années, à droite, à gauche, à l’aide sociale, à l’OMH [NDLR Office municipal d’habitation], dans les banques alimentaires, dans les services sociaux, on retrouve des femmes de plus en plus pauvres », observe l’intervenante.

Une des chambres de la résidence La Gigogne

La maison d'hébergement La Gigogne de Rimouski est régulièrement contrainte de refuser des femmes et leurs enfants, faute de places disponibles.

Photo : Radio-Canada / Jean-Luc Blanchet

Le soutien demandé se fait ainsi plus exigeant et compliqué au moment même où les ressources d’hébergement se disent en mode survie.

#moiaussi

Et ce n’est pas terminé, jugent les travailleuses en maison d’hébergement.

La récente campagne « #moiaussi » sur les réseaux sociaux aura permis d'échanger sur une forme de violence faite aux femmes, la violence sexuelle. C'est un pas dans la bonne direction, mais les gens n’ont encore rien vu, croit Marie-Noëlle Marcoux de la maison L’Aid’Elle.

Selon moi et mes consoeurs qui travaillent dans les mêmes contextes que nous, c'est la pointe d'un gros, gros, gros iceberg.

Une citation de Marie-Noëlle Marcoux de la maison L’Aid’Elle

Aujourd'hui, huit municipalités de la Matanie se sont ajoutées aux 250 municipalités québécoises qui s'affichent comme étant des « Municipalités alliées contre la violence faite aux femmes ».

Avec la campagne provinciale « 12 jours d'action pour l'élimination de la violence envers les femmes », les organismes espèrent sensibiliser la population et le gouvernement.

Le plan d’action contre la violence conjugale du gouvernement du Québec arrive à échéance en décembre 2017.

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